La guerre des passions fait perdre la raison
La presse écrite israélienne vulgarise le débat public, certains journaux affichent des prétentions excessives et se conforment fidèlement et sans scrupule à la ligne des opposants à la réforme judiciaire. Ils ont même osé de publier à la une des « pages noires » payées avec générosité par les organisations protestataires. Les articles et les analyses des journalistes brossent la situation d’un tableau noir, cynique et féroce, qui exprime sans ménagements des sentiments immoraux avec une vanité impudente. La chaine 12 la plus populaire donne toujours le ton. Elle dramatise chaque évènement, chaque propos, et accentue les désaccords par des débats déséquilibrés et houleux. Sur la chaîne 13, l’animateur Raviv Drucker, mène la protestation avec la noirceur d’un regard. Tous les soirs, il se comporte comme l’insolite et l’indigne inquisiteur, tandis que les journalistes de la chaine 14 (pro-coalition) se conduisent vulgairement comme des propagandistes à outrance. Seule la chaine publique présente les informations et les commentaires avec retenue et une certaine objectivité.
Les caricatures parues dans le quotidien Haaretz illustrent parfaitement ce que pensent aussi nos ennemis et nos détracteurs. Celle publiée le 27 juillet 2023 a franchi toutes les sinistres imaginations : en présence du chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, Nétanyahou sur un tracteur, évacue le tas de ferrailles, l’amas de tous les symboles et les emblèmes enchevêtrés de l’Etat, tous les dégâts causés par la guerre civile israélienne…Le chef de la milice chiite lui propose de l’aide…et Nétanyahou répond fièrement, avec superbe : « non merci ! »
Bien évidemment, les images apocalyptiques, les commentaires cyniques, les menaces de nos ennemis, n’effrayent pas Tsahal qui demeure l’armée la plus puissante du Moyen-Orient, mais comment demeurait insouciant face au matraquage des médias qui prédisent la « mort d’Israël ». Comment s’associer à nos pires ennemis, tous ceux qui se frottent les mains, dansent de joie et sont en pleine euphorie devant « l’agonie de l’Etat juif. »
Certes, les protestations contre la réforme judiciaire sont légitimes et prouvent qu’après une trentaine de manifestations massives la démocratie israélienne est toujours vivace. Le gouvernement élu au scrutin universel a aussi le droit d’appliquer des réformes selon son programme électoral mais il doit tenir compte des craintes et des inquiétudes et rassurer une grande partie de la population israélienne.
Le dernier vote (64 : 0) à la Knesset a mis un K.O parlementaire à l’opposition mais la coalition devra dire maintenant : « O.K, nous avons gagné le premier round mais nous sommes prêts à aboutir sincèrement à un vrai compromis, nous constatons que la patrie est vraiment en danger. »
Jusqu’à ce jour, les deux parties campaient dans leurs positions intransigeantes et refusent, pour l’heure, tout dialogue, mais jusqu’à quand ? Le gouvernement devra voir la situation clairement, sans œillères. Son devoir est de prendre le taureau par les cornes, prendre de front les difficultés sans aucune étroitesse d’esprit.
Le mal est déjà fait. La violence verbale l’emporte dans les débats télévisés et dans les rues. La société israélienne est déchirée. On a franchi des lignes rouges car pour la première fois depuis la renaissance d’Israël la politisation touche les secteurs stratégiques, les plus sensibles de l’Etat : Tsahal, le Mossad, le Shin Beit et la police. Des réservistes officiers et soldats, des anciens agents et espions, des pilotes de chasse et mêmes des médecins menacent de ne plus être opérationnels. Certains hommes d’affaires retirent leur argent des banques et appellent à boycotter les investissements étrangers. On punit bêtement l’Etat pour des questions judiciaires et techniques dont la majorité des citoyens ignorent complètement leur sens. On rabâche des mots creux, on suit un troupeau en obéissant à des directives d’anciens généraux irresponsables, complexés et vengeurs, qui bafouent les fondements de la démocratie et incitent à la désobéissance.
Une folie qui ne porte pas de nom dans un pays en guerre permanente et où les menaces sont existentielles. Pourquoi bon Dieu allons-nous détruire, par nos propres mains, le seul et unique Etat du peuple juif ? Après la destruction du Deuxième temple, après deux millénaires d’exil, l’inquisition, les pogroms, et la Shoah ? N’a-t-il pas été construit avec des sueurs, des larmes et du sang. Que dirons-nous à nos petits enfants ?
Nous ne sommes pas capables de régler nous-mêmes nos problèmes ? Comment expliquer qu’Israël demeure le seul Etat démocratique de la région ? Que Tsahal applique à la lettre des consignes strictes pour éviter la mort d’innocents ? Comment pourrions-nous obtenir gain de cause à l’ONU et dans toutes les instances internationales ? Comment obtenir un soutien de nos amis et alliés et particulièrement des Etats-Unis. Garantir une diplomatie crédible et une campagne d’information efficace.
Pour éviter l’escalade sur tous les plans et domaines, il est temps de calmer tous les esprits. Arrêter les insultes réciproques et éviter que des députés et ministres, prononcent des paroles irresponsables et insensés.
Les querelles familiales mêmes les plus vives trouvent toujours une solution dans un esprit bon enfant. Il existe un consensus général pour appliquer des réformes, les divergences ne sont pas si profondes, il est possible avec une volonté réciproque et un dialogue sincère d’aboutir à un compromis.
Dans le cas d’échec des pourparlers, dans un système électoral qui a fait faillite et tant qu’il ne sera pas modifié, nous proposons un référendum national. C’est le seul moyen pour sortir de cette crise insensée.
Nous disons à tous les prophètes de malheur : Non ! la guerre civile n’aura pas lieu car le jour de la raison viendra, tôt ou tard.
Voir l’article de Richard Rossin qui analyse avec clarté la proposition d’un référendum.