Les sonnettes d’alarme de l’hebdomadaire britannique The Economist
L’hebdomadaire britannique The Economist recommande au président Obama d’imposer au gouvernement israélien des concessions à Abou Mazen afin que le Hezbollah ne puisse plus justifier le lancement de roquettes contre Israël. Et pourtant, il n’y a jamais eu de parallèle entre les négociations de paix et la situation sécuritaire.
Dans la couverture du dernier numéro de l’hebdomadaire prestigieux britannique The Economist, qui d’ailleurs gagne aussi de l’influence aux Etats-Unis, figurent le Président Obama, plongé dans ses pensées et en en arrière plan un char israélien, le Merkava, avec le titre ” SVP pas une nouvelle fois”.
On comprendra le sens du titre en lisant l’éditorial titré en rouge “Danger de guerre au Proche-Orient”. Le chroniqueur du magazine The Economist lance un cri d’alarme et affirme :”si Obama n’entreprend pas des démarches diplomatiques spectaculaires dans le processus de paix, le risque de guerre serait réel.”
L’éditorialiste souligne que les guerres en 2006 (Seconde guerre du Liban) et celle de 2009 (Plomb durci) n’étaient que des conflits armés à une échelle limitée. Mais depuis, l’Iran a fourni au Hezbollah 50 mille missiles et roquettes et de ce fait « pour la première fois, un acteur extrême et non étatique de la région, possède, en appuyant que sur un bouton, des moyens de tuer des milliers de civils résidants dans des villes israéliennes».
Le scénario que présente The Economist à ce sujet décrit qu’Israël réagira « en double force » et par conséquent la Syrie et peut être l’Iran risqueraient de se joindre à l’effort de guerre contre l’Etat juif.
Suite à la description sur la future guerre régionale, The Economist propose une solution : « dans ce contexte il est donc urgent de renouveler les négociations de paix israélo-arabe ». L’éditorialiste précise et recommande: “Offrez aux Palestiniens un Etat en Cisjordanie et il sera plus difficile de justifier une guerre ». The Economist reconnaît que les Etats-Unis ont échoué dans leurs efforts de paix par le biais des négociations directes et ainsi recommande à Obama de changer de tactique et d’imposer, avec l’aide de la communauté internationale, un accord aux deux parties.
Cet éditorial de The Economist est important parce qu’il décrit fidèlement le point de vue de leaders d’opinions européens concernant le Proche-Orient.
Cependant, cette perception est erronée sur deux points essentiels : Premièrement et historiquement parlant, les relations entre Israël et les Palestiniens ainsi que les conflits avec le Hezbollah et le Hamas se sont déroulées sur deux plans distincts.
Pour exemple, en avril 1996, le Premier ministre de l’époque, Shimon Pérès, a négocié avec les Palestiniens, mais la situation s’est dégradée le long de la frontière nord avec le Liban et Israël était dans l’obligation de lancer l’opération militaire « Raisins de la colère » contre le Hezbollah.
En 2008, alors que le Premier ministre, Ehud Olmert, était en pleine négociation avancée avec Abou Mazen et avec les Syriens (avec la médiation de la Turquie) on a enregistré une augmentation significative de tirs de roquettes lancées par le Hamas, ce qui a abouti à l’opération « Plomb durci”.
Il n’y a donc jamais eu de parallèle entre la diplomatie israélo-palestinienne et les points de friction avec les organisations soutenues par l’Iran. En fait, du point de vue iranien, s’il y avait un lien entre les deux, il serait fondé sur une logique inverse de celle proposée par l’Economist.
L’Iran a souvent essayé de promouvoir des activités terroristes dans le but de saboter les chances d’un accord israélo-arabe. Ainsi, tant que les pourparlers progressaient l’Iran tentait de les nuire.
La solution que l’éditorial de The Economist propose est détachée de toute réalité et pas moins de son interprétation. L’hebdomadaire invite l’administration Obama à adopter une stratégie alternative, et propose de tracer une autre carte comme « nouveau point de départ ». Celle-ci n’impliquerait qu’une nouvelle tension entre les parties et de ce fait les revendications territoriales sur les lignes d’avant juin 1967 leurs seront servies sur un plateau d’argent et Israël perdrait d’avance ses biens territoriaux et n’aura aucune possibilité de négociations ou revendications sur les concessions palestiniennes.
En fait, The Economist souhaite exercer des pressions américaines sur Israël, et non sur les deux parties, ainsi le monde arabe persuadé qu’Israël s’est affaibli radicalisera ses positions. La région entière ne s’orientera pas vers une acceptation et une reconnaissance mutuelle – mais vers une escalade rhétorique qui servira les intérêts de l’Iran.
The Economist conclut avec l’argument rabâché selon lequel les lignes du plan d’accord israélo-palestinien sont connues par avance : et pour plus de précisions, il rappelle les paramètres proposés par le Président Clinton suite à l’échec des pourparlers à Camp David et Taba en l’an 2000. Personne n’a approuvé officiellement et signé le plan Clinton et il est évident qu’il n’engage en aucun cas les gouvernements israéliens qui se sont succédés depuis.
En outre, les principaux responsables israéliens ont exprimé des réserves et l’ancien chef d’état-major Shaoul Mofaz a déclaré, selon les rapports du Conseil des ministres, que « la médiation Clinton ne correspond pas aux besoins de la sécurité d’Israël et si elle est acceptée cela menacerait la sécurité de l’Etat » Rappelons que les paramètres de Clinton ont inclus le remplacement de Tsahal dans la vallée du Jourdain par une force internationale.
Néanmoins, The Economist, lui, exige un arrangement imposé même si celui-ci renforce la vulnérabilité d’Israël. L’hebdomadaire ne se réfère pas à la nouvelle donne et aux changements dans l’arène internationale depuis que le plan a été présenté. Pour exemple, en l’an 2000, l’Iran n’était pas sur le point d’acquérir des armes nucléaires et n’a pas dominé en Irak et n’a pas non plus participé au processus transformant l’Irak en Etat satellite pouvant menacer un jour Israël.
La progression dans les relations israélo-palestiniennes est importante en elle-même, mais ne peut changer les aspirations de l’Iran pour conduire le Proche-Orient à l’escalade. The Economist conclut que nombreux sont ceux qui croient que la puissance des Etats-Unis au Moyen-Orient s’est considérablement affaiblie, une estimation erronée que The Economist d’ailleurs partage.
Toutefois, le meilleur moyen pour modifier la position américaine dans notre région et pouvoir la rendre plus efficace devant la menace iranienne, principal facteur de déstabilisation dans la région, n’est sans doute pas de forcer la main d’Israël.