Les sanctions contre l’Iran sont-elles efficaces?
Les nouvelles sanctions proposées par les Etats-Unis et l’Union européenne contre le programme nucléaire de l’Iran n’ont pas empêché le président Mahmoud Ahmadinejad de déclarer tout de go: « le monde devrait savoir que malgré toutes les pressions exercées contre nous, l’Iran ne reculera jamais de ses principes et de ses droits et toutes ces pressions sont quasiment inutiles ».
Dans les années 80, les Etats-Unis avaient déjà imposé des premières sanctions mais elles ont été réellement adoptées contre le programme nucléaire iranien que seulement en 2007 par une résolution du Conseil de Sécurité. Et pourtant, l’Iran a poursuivi son programme atomique et a continué à enrichir son uranium. Jusqu’à ce jour, seules les sanctions contre le régime de l’Apartheid instauré en Afrique du Sud avaient modifié le comportement du gouvernement de l’époque. Rappelons qu’en 1977, le Conseil de Sécurité de l’ONU avait imposé au départ un embargo général. En 1985, L’Europe et les Etats du Commonwealth ont imposé des sanctions économiques et commerciales mais ce n’est qu’en 1994 que l’Afrique du Sud a annulé officiellement l’Apartheid et a présenté une nouvelle constitution. Ce n’est donc que neuf ans plus tard que les sanctions ont eu une influence réelle sur la politique de l’Afrique du Sud. Si nous comparons l’Iran à l’Afrique du Sud il en résulte qu’il faudrait attendre un changement sérieux dans le comportement de l’Iran qu’à partir de 2016.
Un autre exemple est celui de l’Irak. En 1991, vers la fin de la première guerre du Golfe, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté la résolution 687. Elle a imposé un cessez-le-feu entre l’armée de Saddam Hussein et les forces de la coalition dirigées par les Etats-Unis. Selon cette résolution l’Irak fut contraint de divulguer tous les systèmes d’armes nucléaires, chimiques et biologiques ainsi que les missiles à longue portée qu’il possède en s’engageant à les détruire. Il fut également interdit à l’Irak d’exporter son pétrole jusqu’au jour où l’exécution des mesures soit approuvée par des inspecteurs internationaux.
Et pourtant, en dépit des sévères sanctions, Saddam Hussein a refusé durant douze années à coopérer sérieusement avec les inspecteurs de l’ONU, et ces derniers n’ont pas pu confirmer qu’il avait effectivement détruit tout son arsenal. Les sanctions n’ont pas conduit aux résultats politiques souhaités, et la suspicion des services de renseignements occidentaux a été l’une des raisons du déclenchement de l’invasion américaine en Irak en 2003.
Ces précédents posent de sérieux problèmes concernant l’Iran. Les experts sont partagés sur le laps de temps nécessaire pour que l’Iran soit capable d’achever son programme nucléaire : certains pensent que quelques mois seulement suffiraient pour que Téhéran puisse exploiter l’uranium enrichi qu’elle possède à des fins militaires, d’autres, estiment que cela pourrait mettre deux ans pour pouvoir installer une ogive nucléaire sur les missiles balistiques « Shiab 3 » dont leur portée pourrait atteindre Israël.
Lors d’une séance tenue au Congrès américain le 31 janvier dernier, le chef de la CIA, le général David Petraeus, a admis que les nouvelles sanctions « mordent » en effet l’économie iranienne, mais la question cruciale demeure et se pose à savoir si ces sanctions provoqueront un réel changement dans la politique des ayatollahs.
Lors de cette séance, le chef des services de renseignements, James Clapper, a avoué que: « les sanctions telles qu’elles ont été appliquées jusqu’à présent, n’ont pas réussi à faire changer le comportement ou la politique des Iraniens ».
Il ne fait aucun doute, que contrairement aux sanctions contre l’Irak, il n’existe pas aujourd’hui un consensus général au sein de la communauté internationale pour opposer des sanctions paralysantes contre l’Iran.
L’Iran exporte plus de 2.3 millions de barils de pétrole par jour. La consommation européenne estimée à 600 mille barils par jour devrait être achevée au mois de juillet prochain. Ainsi, la Chine et l’Inde refusent de respecter ces nouvelles sanctions, continueront probablement à importer plus de 860 mille barils de pétrole iranien par jour. C’est bien évidement une violation flagrante du mécanisme utilisée.
Les sanctions économiques peuvent être efficaces à condition de pouvoir les appliquées à la lettre et par tous les pays. Les facteurs qui ont incité
L’Afrique du Sud à abolir l’Apartheid était l’effondrement de l’Union Soviétique et la réduction des menaces des Etats voisins, l’Angola et le Mozambique ; l’idée que Nelson Mandela et le Congrès national africain (ANC) ont opérée au service des soviétiques a perdu toute crédibilité.
Souvent la menace de l’usage de la force est cruciale pour appliquer des sanctions ; En 1988, après que Saddam Hussein ait chassé les inspecteurs d’UNSCOM d’Irak, la menace américano-britannique de lancer une attaque aérienne l’a forcé à ramener les inspecteurs. Dans la même veine, si des sanctions furent imposées en 2009 à l’heure où Téhéran affronté un soulèvement intérieur, leur influence auraient été plus importante.
L’efficacité des sanctions demeure dans la compréhension du message par l’ennemi et la détermination de la communauté internationale. Dans les mois à venir l’Iran mettra à l’épreuve cette détermination de l’Occident et nous saurions dès lors si ces sanctions seront efficaces.