Les objectifs et les menaces des Iraniens
Interview du Général de brigade Yossi Kuperwasser réalisée le 24 avril sur le plateau de la chaîne internationale I24 NEWS en anglais.
Question : « De quelle manière le retranchement de l’Iran en Syrie représente-t-il un danger pour Israël ?
Yossi Kuperwasser : « Ce que les Iraniens essayent de faire, c’est de transformer la Syrie en une base avancée à partir de laquelle ils pourront menacer Israël d’une manière beaucoup plus facile et efficace que depuis loin en Iran. Même s’ils essaient d’avoir des armes nucléaires, ils savent que cela prendra du temps. En attendant, ils doivent renforcer leurs capacités, et ils essaient d’apporter des éléments pour leur permettre de menacer Israël de trois manières :
La première consiste à améliorer les capacités du Hezbollah. L’objectif principal à cet égard est d’essayer de permettre au Hezbollah d’avoir des armes plus précisément guidées. Israël essaie d’empêcher cela.
Deuxièmement, ils essayent de construire une base pour mener des attaques terroristes contre Israël depuis les zones adjacentes à la frontière sur les hauteurs du Golan.
Troisièmement, les Iraniens essaient de construire une base à l’intérieur même de la Syrie, d’où ils pourraient attaquer Israël en utilisant leurs diverses capacités militaires, et utiliser la Syrie comme un lieu de production d’armes qu’ils ne peuvent pas produire en Iran.
Ce sont des menaces directes pour Israël, et nous l’avons vu le 10 février, quand ils ont tenté de mener une attaque contre Israël directement depuis la Syrie. »
Q : On dit que des représailles iraniennes contre Israël sont probables. Êtes-vous d’accord avec cette évaluation ?
Kuperwasser : « Ils ont beaucoup d’options. Ils peuvent envisager de mener des attaques terroristes contre des cibles israéliennes en dehors de la région. Ils l’ont fait par le passé à Buenos Aires, donc tout est possible. Nous devrions être sur le qui-vive, et oui, les Iraniens vont essayer de trouver un moyen de riposter. Mais ce ne sont pas des ‘représailles’ parce que ce sont bien eux qui ont provoqué et ont commencé en lançant une attaque contre Israël. » ]Le fameux drone d’attaque armé d’explosifs[
« C’est une guerre en cours. L’idée d’utiliser le territoire syrien comme base à partir de laquelle ils peuvent menacer Israël était une idée iranienne qui n’a pas été contrecarrée par les Russes en dépit de ce qu’Israël leur a dit. Nétanyahou est allé huit fois à Moscou fois pour raconter tout cela à Poutine… »
Q : Comment vont-ils réagir ? Sont-ils capables de lancer des opérations à partir de la Syrie ?
Kuperwasser : « Nous ne le savons pas, mais les choses auraient pu être bien pires maintenant. Il y a toutes sortes de choses qu’ils peuvent apporter d’Iran. En revanche, ils n’ont pas d’avions, et ils n’ont pas apporté de roquettes ni de missiles.
La présence iranienne croissante en Syrie est principalement le résultat de la décision prise par l’administration Obama de laisser l’Iran jouer un rôle en Syrie. Ce n’était pas le cas jusqu’à ce que les Américains et les Iraniens se soient mis d’accord sur le nucléaire et signent le JCPOA, à Vienne. Mais avec cet accord, les Américains acceptaient le rôle iranien en Syrie. Nous en subissons hélas les conséquences, aujourd’hui encore. »
Q : Le président Donald Trump devra décider d’ici le 12 mai prochain s’il faut rétablir les sanctions économiques américaines contre Téhéran. Le ministre iranien des Affaires étrangères Zarif a averti que si les Etats-Unis se retiraient de l’accords, “l’Iran a beaucoup d’options, et ces options ne sont pas plaisantes”.
Kuperwasser : « Ce qui inquiète vraiment les Iraniens, c’est que le président Trump va tenir sa promesse de prendre des mesures draconiennes concernant le JCPOA. Pour l’heure, les options des Iraniens seront très limitées. La chose la plus importante qui va arriver concerne l’économie : le rial iranien plonge déjà et Dieu sait ce qui va arriver à l’économie iranienne ? Personne dans les grandes entreprises du monde ne préférera faire des affaires avec l’Iran. »
Q : Le président français Macron ne veut pas que Trump quitte l’accord nucléaire. Est-ce que Macron peut vraiment l’influencer ?
Kuperwasser : « Je ne pense pas que sur cette question extrêmement importante, Trump puisse changer d’avis suite à quelque chose que Macron lui dira, à moins que Macron ait un moyen de résoudre le problème. Mais je ne pense pas qu’il ait une solution, et je pense que pour Trump, il est extrêmement important de diriger tout le dossier.
Il sait bien que cet accord est terrible pour l’Occident. Il ouvre la voie aux Iraniens pour avoir un grand arsenal nucléaire dans 12 ou 13 ans. Qui est prêt à soutenir un tel accord ? En fin de compte, Macron devra se tenir aux côtés des États-Unis. Il ne veut pas que cela se produise maintenant, et nous savons qu’une fois que les États-Unis se seront retirés de l’accord, cela signifiera la réimposition des sanctions américaines.
Les sanctions américaines sont des sanctions secondaires. Elles ne concernent pas les États-Unis, qui ne traitent pas avec l’Iran. Ils ne traitent avec personne qui s’occupe de l’Iran. Tout cela est si puissant et si douloureux pour les Iraniens. A présent, ils essaient de dissuader les Américains de le faire, mais une fois que cela sera fait, la France devra réévaluer sa position – tout comme les Iraniens eux-mêmes. »
Le CAPE
Retrouvez ici l’interview de Yossi Kuperwasser sur le plateau de I24 News en anglais, le 24 avril 2018.
Pour citer cet article :
Le CAPE, « Les objectifs et les menaces des Iraniens », Le CAPE de Jérusalem, publié le 26 avril 2018 : http://jcpa-lecape.org/les-objectifs-et-les-menaces-des-iraniens/