Les motifs de la rage islamiste

La dernière vague anti-américaine qui a submergé le Moyen-Orient et s’est propagée jusqu’à Sidney en Australie, a été suivie par une série d’articles dans la presse internationale essayant d’expliquer les origines de la rage islamiste. On nous a expliqué que la colère a éclaté suite à la diffusion du film sur Mahomet, “la naïveté des Musulmans”.

Ce film  produit aux Etats-Unis a été diffusé  sur You Tube il y a plus de deux mois.

Juste après les attentats spectaculaires du 11 septembre 2001, divers commentateurs ont tenté de déterminer les motivations des pirates de l’air et se sont posés la même question à savoir: pourquoi cette colère noire a éclaté soudain? Pourquoi les islamistes sont-il fous de rage et ont lancé cette terrible opération suicidaire? ‘

Les questions sont justifiées et fondamentales et ce film n’est pas toujours la cause directe de la flambée de la violence, il existe sans doute d’autres facteurs.

L’un des principaux observateurs et analystes de la presse arabe, Ouraib Rantawi, a estimé dans un article publié dans le journal  jordanien “al-Doustour” que l’explication est nécessaire parce que Washington  a tenu les brides du “printemps arabe” et en a fait son propre cheval de bataille. De ce fait, la nouvelle vague anti-américaine a éclaté  dans ces même pays. Cet observateur privilégié va plus loin dans son analyse et pense que les dernières réactions contre l’Amérique sont semblables à un “nouveau 11 septembre”.

Dans ce contexte nous devrions donc examiner les motifs du “printemps arabe” et s’ils ont bien contribué à l’intensité de la dernière flambée de violence.

L’attaque du Consulat américain à Benghazi et  l’assassinat de l’ambassadeur Christopher Stevens avec ses trois collaborateurs ont été sans doute les plus cruels.  Cet attentat contre des diplomates occidentaux   n’est pas lié à la protestation générale. Il s’agit belle et bien d’une opération planifiée, préméditée et parrainée par Al Qaïda. Déjà  l’année dernière, des cellules d’al Qaïda ont mis en place et en toute liberté des camps d’entrainement dans des régions où le contrôle du gouvernement central de Libye est bien  limité. Une situation similaire a pris forme dans la  péninsule du Sinaï en Egypte et dans des régions du Yémen Sud. Cela se produira probablement en Syrie après la chute de Bechar el Assad.

Les capacités limitées des nouveaux régimes de mettre un terme à  la violence et leur manque de volonté d’agir fermement contre les émeutes aura sans doute un impact sur l’avenir. Les foules arabes ne craignent plus les régimes et n’ont plus peur de l’armée et des  services  de sécurité, et donc un incident marginal dégénère rapidement, une petite étincelle pourra mettre le feu aux poudres. L’escalade est immédiate et imprévisible et aura des conséquences graves pour la stabilité des nouveaux régimes.

L’objectif commun des manifestants et des régimes de limiter par tous les moyens l’influence des Etats-Unis au Moyen-Orient et de chasser les Américains de la région a réussi à établir en Tunisie, en Egypte et au Yémen des régimes islamiques liés à l’embryon des Frères musulmans.

Le “printemps arabe” a donc créé de nouvelles donnes dans le monde arabe alimentant et véhiculant une politique farouche et anti-américaine. Sur le plan économique, les révoltes arabes ont bien déçu. Elles n’ont pas réussi à apporter d’importantes transformations pour le bien être et la prospérité des populations. Bien au contraire, la perspective  d’investissements américains dans les pays contrôlés par les Frères musulmans n’est plus acquise.

Enfin, si la rue arabe pense que les Américains ont profité du “printemps arabe” en le transformant en leur propre cheval de bataille, alors il faudra s’attendre que les populations arabes condamneront demain l’Amérique en l’accusant d’être responsable de la crise économique qui les frappe et les plonge dans la misère.