Les Etats-Unis qualifient les Pasdarans de terroristes
Le 8 avril 2019, les États-Unis ont désigné les Gardiens de la Révolution iranienne comme organisation terroriste étrangère et leur ont imposé des sanctions immédiates.
Cette décision a suscité des réactions contrastées en Iran.
Tandis que les dirigeants du régime se sont empressés de menacer l’Amérique et de réagir sévèrement à cette mesure, certains dans l’opposition iranienne, notamment à l’étranger, l’ont approuvée en affirmant que les Pasdarans étaient en effet bien responsables des problèmes socio-économiques en Iran et des tensions dans la région.
Le chef des Gardiens de la révolution islamique, Mohammad Ali Jafari a averti les Etats-Unis des conséquences en cours :
« Si les Américains appliquent cette mesure stupide et mettent en péril la sécurité nationale de l’Iran, nous prendrons des mesures de rétorsion comme l’exige la politique iranienn…. Si une telle mesure est effectivement mise en œuvre, l’armée et les forces de sécurité américaines ne pourront plus bénéficier de la sécurité dont elles disposent aujourd’hui en Asie occidentale. Dans ce contexte, l’Iran exercerait des représailles, à leur juste mesure et de la même ampleur, qui seront plus fortes encore. Ce geste ridicule ne ferait que renforcer les capacités défensives et offensives des Pasdarans. »
De son côté, le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, Zarif, a déclaré que cette mesure entraînerait les forces américaines dans un véritable bourbie : « En fait, c’est Nétanyahou qui a longtemps cherché à faire désigner les Pasdarans [comme terroristes] et entraîne maintenant les États-Unis dans un bourbier. Donald Trump devrait savoir qu’il sera victime d’un autre désastre américain. »
Le président de la commission des Affaires de défense au Parlement iranien (Majlis) a également menacé les États-Unis et déclaré l’Iran devrait donc désigner les forces américaines stationnées dans la région comme organisation terroriste.
D’autres membres du Majlis ont exprimé leur soutien inconditionnel aux Pasdarans en louant leurs efforts, et leur contribution à la sauvegarde du régime islamique et à son succès dans tous les domaines. Ils ont averti les États-Unis qui, selon eux, soutiennent des organisations terroristes dans la région : « ils paieront un lourd tribut s’ils franchissent cette étape stupide et inutile » ont-ils précisé.
Quant à l’opposition, elle espère mettre fin à la terreur et aux actes terroristes des Pasdarans. Sur les réseaux sociaux, et particulièrement sur Twitter, elle a exprimé son soutien à la décision anticipée des États-Unis et a appelé à sanctionner le terrorisme des Pasdarans.
Mohammad Javad Zarif (à gauche) et le chef des Pasdarans, Mohammad Ali Jafari (Isna Photo)
De nombreux iraniens considèrent que les Gardiens de la révolution sont en réalité une branche bien huilée du régime, directement responsable des violations des droits de l’Homme, de la profonde crise que traverse le pays. Ils sont également responsables de l’oppression des manifestations de contestation populaires, de la situation économique du pays et de son taux de chômage élevé. On leur doit enfin les frictions régionales et internationales lorsqu’ils s’aventurent militairement avec la force al Qouds au Yémen, en Syrie, au Liban, dans les États du Golfe et même en Amérique du Sud et en Afrique.
Dans plusieurs tweets nous pouvons lire : « Le Moyen-Orient sera plus sécurisé sans les Pasdarans », « ils présentent une cellule cancéreuse en Iran et au Moyen-Orient », « leur désignation en tant qu’organisation terroriste est une bonne nouvelle pour des millions de personnes », « la fin des Pasdarans marquera enfin un début de la liberté en Iran et dans la région », « les gardiens de la Révolution ont ravagé le sol iranien et semé la terreur, la destruction et la désolation dans toute la région ».
La décision américaine de désigner les Pasdarans comme organisation terroriste, si elle est finalement appliquée, plongera les États-Unis et l’Iran dans la confrontation. Les opposants au régime – à l’intérieur et à l’extérieur de l’Iran – qui considèrent les Pasdarans comme la racine du Mal peuvent être encouragés par la détermination de l’Administration Trump à poursuivre la lutte contre le régime.
Les milieux réformistes du régime iranien soutiennent également cette initiative, mais discrètement. Cela pourrait entraîner un affaiblissement des Pasdarans devenus progressivement les véritables propriétaires du pays. Ils avaient mal interprété l’article 150 de la nouvelle Constitution iranienne en pensant l’élargir pour leur entreprise révolutionnaire en Iran et pouvoir l’exporter également à l’étranger.
Rappelons que l’ancien président iranien Rafsandjani, décédé il y a plus de deux ans, était le plus ardent opposant à l’implication des Pasdarans dans l’économie et dans les arcanes du pouvoir.
Dans ce contexte, et suite à la décision américaine de désigner les Pasdarans comme organisation terroriste, il est clair que les semaines à venir seront décisives pour l’avenir de cette organisation islamique.
Michael Segall
Pour citer cet article
Michael Segall, « Les Etats-Unis qualifient les Pasdarans de terroristes », Le CAPE de Jérusalem, publié le 17 avril 2019 : http://jcpa-lecape.org/les-etats-unis-qualifient-les-pasdarans-de-terroristes/
Photo de couverture : les députés iraniens revêtent un uniforme militaire pour afficher leur soutien aux Pasdarans après l’annonce de la décision américaine (photo Fars).
NB : Sauf mention spéciale, toutes les illustrations sont libres de droits.