Les enjeux de la guerre de Gaza
Israël est profondément conscient de la complexité de la guerre dans la bande de Gaza, un territoire de 360 km2, d’une superficie d’environ un tiers de la taille de l’Ile-de-France, peuplé de 1,82 millions d’habitants, dont 75 % vivent dans des zones urbanisées.
Les réalités cauchemardesques imposées au peuple de Gaza durant les 50 jours de la guerre, et notamment les 5 226 frappes aériennes contre des cibles du Hamas incorporées dans des infrastructures civiles, ne peuvent être ignorées. Toutefois, il faut reconnaître que le nombre des victimes palestiniennes aurait pu être beaucoup plus lourd si Israël n’avait pas été aussi expérimenté sur les conséquences de la guerre dans un environnement civil.
Tandis que le Hamas a investi ses ressources dans le terrorisme et les tunnels de la terreur, Israël a développé le Dôme de Fer, un système efficace pour intercepter des missiles.
Avec un taux de précision de plus de 90 %, Dôme de Fer a intercepté avec succès des milliers de roquettes et de missiles dirigés sur des centres de la population israélienne. Il est terrible de constater que sans ce système, le bilan des victimes israéliennes aurait été infiniment plus élevé, sans parler des dommages causés sur les infrastructures.
La guerre de Gaza de l’été 2014 fut, sur plusieurs plans, déterminante pour Israël, surtout en ce qui concerne les objectifs destructeurs du Hamas.
Cette guerre n’a pas été voulue par Israël. Il aurait préféré l’éviter et il a fait tout ce qui était en son pouvoir pour limiter les hostilités et aboutir à des cessez-le-feu avec l’aide de la communauté internationale. Israël a agi ainsi pour ne pas embraser la région, déjà explosive, et ce, au risque de laisser intacte l’infrastructure militaire et terroriste du Hamas.
C’est une guerre qui a éclaté à un moment délicat pour Israël. L’initiative américaine dirigée par le Secrétaire d’Etat John Kerry pour relancer le processus de paix entre Israël et l’Autorité palestinienne arrivait à sa fin le 14 mai 2014. Israël et les Etats-Unis furent surpris par Mahmoud Abbas qui annonça, tout de go, la formation d’un gouvernement de réconciliation nationale avec le Hamas. Sans attendre, le Hamas a profité de la situation pour renforcer son influence en Cisjordanie, caractérisée par des manifestations anti-israéliennes, mais aussi des efforts constants pour planifier des opérations terroristes contre l’Etat Juif dans l’espoir de déstabiliser l’Autorité palestinienne et de perturber sa coopération sécuritaire avec Israël.
L’émergence du Hamas fut accompagnée d’une augmentation de la violence en Cisjordanie : tirs sporadiques, attentats à l’arme blanche, voiture bélier, et notamment des affrontements entre Arabes et policiers sur le Mont du Temple ont augmenté les craintes et ont été considérés comme potentiellement explosifs. Dans le nord du pays, sur le plateau du Golan, l’apparition de groupes djihadistes à proximité de la frontière avec la Syrie a ajouté au sentiment d’instabilité générale un risque réel d’embrasement.
Malgré une pluie constante de roquettes sur le territoire israélien, le gouvernement a préféré ne pas mener de représailles contre les lanceurs de roquettes et les infrastructures militaires du Hamas à Gaza. Israël ne voulait pas envenimer la situation en Cisjordanie ou à Jérusalem, ni agir d’une manière qui pouvait attirer l’attention sur le conflit avec les Palestiniens plutôt que sur les djihadistes de Syrie. Jérusalem ne souhaitait pas non plus ouvrir un autre front.
En outre, Israël a été parfaitement conscient de la complexité de la bataille à Gaza : forte densité de population, bouclier humain, abus des infrastructures civiles à des fins militaires et des questions juridiques et des droits de l’Homme qui compliquaient et aggravaient une guerre de grande envergure.
Dans l’esprit des responsables sécuritaires et politiques israéliens, la menace de roquettes en provenance de Gaza devait être traitée techniquement par la dissuasion sans se lancer dans une nouvelle confrontation.
D’aucuns estimaient qu’après l’échec des pourparlers de paix, le Hamas lancerait des roquettes pour prouver que l’Autorité palestinienne et son président Mahmoud Abbas se trompaient en engageant un processus de paix avec Israël.
Le Hamas avait aussi lié ses attaques à la levée du blocus maritime et à l’arrêt des restrictions sur les marchandises imposées après l’Opération Pilier de défense (novembre 2012), d’autant plus que les Frères musulmans n’étaient plus au pouvoir en Egypte depuis l’été 2013. Le nouveau président égyptien Abdel Fattah el-Sissi avait détruit des centaines de tunnels qui avaient été une source de revenus considérable pour le Hamas à travers les impôts qu’il imposait aux creuseurs de tunnels.
La perte de ces recettes a aggravé la situation économico-financière dans la bande de Gaza:
- 42 000 fonctionnaires ne touchaient plus leur salaire;
- Le chômage a augmenté de 46% (58% pour les moins de 30 ans);
- Le PIB/habitant fut réduit de moitié par rapport à celui de la Cisjordanie, avec une moyenne de 4 $/jour.
Ces réalités économiques, combinées à la cruauté du Hamas envers ceux qui ne respectent pas la charia, ont conduit à un mécontentement populaire contre le régime.
De fait, il était impératif pour le Hamas de focaliser l’attention ailleurs, à savoir de relancer les tirs de roquettes sporadiques contre l’Etat Juif et d’utiliser les tunnels pour prendre en otages des Israéliens.
La dynamique a pris une mauvaise tournure lorsque, dans la nuit du 12 juin 2014, des terroristes du Hamas en Cisjordanie, ont enlevé trois adolescents israéliens près de Goush Etzion. Le plan de l’enlèvement avait été conçu et orchestré par un haut responsable du Hamas, expulsé en 2010 vers la Turquie.
Pour localiser les adolescents kidnappés et appréhender les auteurs de cet enlèvement, les forces de défense israéliennes ont entrepris un important déploiement avec des opérations de ratissage contre des activistes, des récidivistes et contre des institutions du Hamas en Cisjordanie.
Trois jours plus tard, le 15 juin 2014, quatre roquettes furent tirées depuis Gaza sur Ashkelon, une ville israélienne au nord de la bande de Gaza. Deux de ces missiles ont été interceptés par le système Dôme de Fer ; deux autres sont tombés dans des terrains vagues, ne causant aucun dommage ni victime.
Quatre jours plus tard, le 19 juin 2014, cinq membres d’une unité spéciale du Hamas étaient tués lors de l’effondrement d’un tunnel dans le sud de Gaza. Le Shin Beit avait mis en garde contre une attaque imminente dans un kibboutz de la région, prévue pour la fin de juin-début juillet. Israël avait bombardé ce tunnel dans l’espoir de le détruire. Son effondrement avait, nul doute, contrecarré la tentative d’enlèvement.
Le 30 juin 2014, les corps des trois adolescents israéliens ont été retrouvés dans une fosse au nord d’Hébron. Il s’est avéré qu’ils avaient été enlevés puis assassinés par des membres de la famille Qoeïsima, connue pour ses liens étroits avec le Hamas et ses activités terroristes meurtrières pendant la Deuxième Intifada.
Le 2 juillet 2014, à Jérusalem, un jeune Palestinien âgé de 16 ans, Mohamed Ahmed Khdeir, est enlevé puis brûlé vif dans une forêt de Jérusalem. Quatre jours plus tard, la police israélienne arrête 6 suspects juifs, qui avoueront être motivés par la vengeance des trois adolescents israéliens assassinés.
C’est le cycle de la violence en Cisjordanie et à Jérusalem, notamment sur le Mont du Temple. Il fallait à tout prix apaiser les esprits et espérer que la diplomatie agisse pour prévenir les hostilités et régler la situation explosive dans les Territoires.
Le 6 juillet 2014, le premier ministre Netanyahou déclarait :
« L’expérience du passé a montré que pendant des moments tendus de crise, nous devrions agir de manière réfléchie et responsable et non pas à la hâte »
Certains observateurs pensaient aussi que le Hamas ne souhaitait pas affronter une guerre de grande envergure et qu’il voulait sortir de sa quarantaine et gagner des gains politiques et économiques.
Cependant, avec l’aide d’experts, d’armes, de fonds, le soutien et les encouragements de l’Iran, de la Turquie, du Qatar et des Frères musulmans, le Hamas a élaboré une nouvelle stratégie permettant de frapper Israël. Il a construit une force de combat avec tous les éléments d’une armée régulière : une structure hiérarchique de commandement divisée en six brigades régionales avec des capacités de commandement et de contrôle sophistiquées, des unités telles que des hommes-grenouilles et des parachutistes, du matériel de détection thermique, des missiles antichars et antiaériens, et surtout la construction de 32 tunnels d’attaque.
Le Jihad islamique palestinien fut également intégré au Hamas et ces deux forces pouvaient compter sur 32 000 hommes qualifiés, bien équipés, totalement dévoués dans le combat contre Israël. De fait, l’armée du Hamas dans la bande de Gaza constituait désormais la plus grande menace d’attentats-suicide dans le monde.
Toutefois, le Hamas avait sous-estimé les intentions israéliennes. Il pensait qu’Israël serait tellement découragé par l’opinion publique internationale que, finalement, il céderait à ses exigences. Il mésestimait la capacité d’Israël à mener une longue bataille de plus de 50 jours. Israël aussi a initialement sous-estimé la menace des tunnels de terreur du Hamas.
Pour n’importe quel observateur objectif, c’est bien le Hamas, et non pas Israël, qui devrait être sur la sellette dans l’opinion mondiale. C’est bien le Hamas, et non pas Israël, qui devrait faire l’objet d’indignation de la part des associations et autres ONG des droits de l’Homme. Elles accusent Israël de mener une guerre disproportionnée, tout en restant indifférentes aux abus horribles perpétrés par le Hamas contre son propre peuple.
Condamner Israël en ignorant les crimes de guerre et les crimes contre l’Humanité commis par le Hamas équivaut à encourager le terrorisme. Aucune guerre n’est parfaite, elles sont toujours sales et laides. Mais la perversion de la vérité est cependant dangereuse.
Le Conseil des Droits de l’Homme a condamné Israël, sans mentionner le Hamas
Il serait facile de répertorier ici les dommages collatéraux causés par une coalition occidentale dans ses combats en Irak, en Libye, en Afghanistan et dans d’autres lieux éloignés, où des milliers de civils innocents furent victimes de dommages collatéraux, où des écoles et des hôpitaux ont été détruits par inadvertance.
Israël ne cherche pas de faire de comparaisons ni à présenter d’excuses pour sa conduite au cours de l’Opération Bordure Protectrice. Au contraire, il regarde sereinement la réalité en face. Il a accueilli les médias et les attachés militaires des armées étrangères afin qu’ils apprennent de l’expérience de Tsahal sur la façon de limiter les pertes civiles dans des circonstances intenables.
Vaincre le Hamas ne se fait pas seulement par la force militaire.
C’est aussi en rendant le Hamas responsable de ses crimes de guerre, de ses crimes contre l’Humanité, et par des processus libres et démocratiques qui permettront au peuple de Gaza de choisir un avenir meilleur pour lui-même, au lieu de subir une réalité dévastatrice que lui impose le Hamas.
Ainsi, nous pourrons échapper à une nouvelle guerre et éviter un autre cycle d’effusion de sang. C’est bien le principal message de la guerre de Gaza de l’été 2014.
Hirsh Goodman
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Pour citer cet article :
Hirsh Goodman, « Les enjeux de la guerre de Gaza », Le CAPE de Jérusalem : http://jcpa-lecape.org/les-enjeux-de-la-guerre-de-gaza/