Les actions subversives de l’Iran et le projet nucléaire
Le dilemme auquel est confronté Washington avec Téhéran sur l’avenir du projet nucléaire iranien rappelle le dilemme politique auquel les Etats-Unis étaient confrontés avec l’Union soviétique concernant les accords préliminaires sur la limitation des armes nucléaires.
Au cours des pourparlers entre les deux superpuissances qui aboutiront en 1971 à l’Accord SALT I, Henry Kissinger, alors conseiller à la Sécurité nationale, a voulu s’assurer que l’URSS ne profiterait pas de la Détente avec l’Occident pour poursuivre sa politique agressive au-delà de ses frontières. Kissinger a tenté de parvenir à un accord viable avec Moscou et a voulu poser des “principes fondamentaux » dans les relations entre les deux pays. Le but était de créer une véritable détente mais aussi de mobiliser l’Occident contre toute tentative d’agression de la part des Soviétiques. Kissinger voulait ainsi éviter de futures confrontations avec Moscou.
Cependant, en dépit de la signature des accords sur la restriction de l’arsenal nucléaire américain, des forces soviétiques et leurs alliés sur le terrain ont agi en Angola, au Mozambique et dans la Corne de l’Afrique, puis , quelques années plus tard, ont envahi l’Afghanistan.
La Détente s’est effondrée et le Sénat américain a rejeté l’accord SALT II, conclu entre les Etats-Unis et l’Union soviétique sur les armes stratégiques.
Certes, Kissinger n’a pas réussi à arrêter l’expansion soviétique, mais il a ancré dans les esprits un principe fondamental, à savoir qu’il est impossible de mener un dialogue sur la limitation des armes nucléaires tant que l’une des parties agit ouvertement pour modifier l’équilibre des forces.
Ces jours-ci, les Etats-Unis et leurs partenaires (la Grande-Bretagne, la France, la Russie, la Chine et l’Allemagne) sont intéressés à parvenir à un accord avec l’Iran sur l’avenir de son programme nucléaire. Cependant, l’Iran poursuit activement ses ambitions subversives en apportant son soutien militaire à des groupes terroristes, et en formant des troupes armées dans plusieurs zones de conflit. Depuis que les négociationssur le projet nucléaire ont débuté, rien n’indique que les Iraniens aient abandonné leurs actions subversives à travers le Moyen-Orient ; bien au contraire, ces actions se sont multipliées.
Depuis les années 1980, les Gardiens de la Révolution sont installés au Liban pour y promouvoir les intérêts stratégiques iraniens au Moyen-Orient. Des dirigeants iraniens, avec au premier chef l’Ayatollah Ali Khamenei, réitérèrent leur souhait d’ouvrir de nouveaux fronts contre Israël, notamment en Cisjordanie et à Gaza, dans le but de « libérer toute la Palestine. »
L’attaque ciblée sur le plateau du Golan syrien contre un général iranien et plusieurs Pasdarans montre parfaitement les véritables intentions de Téhéran. L’Iran a également envoyé des troupes en Irak pour protéger Bagdad et les villes saintes chiites, tandis que d’autres unités de Pasdarans combattent dans les rangs de l’armée syrienne, soutiennent le régime du président Bachar al-Assad et participent à des opérations militaires contre la population sunnite, en coopération étroite avec le Hezbollah.
Bahreïn, où la population chiite est majoritaire, est devenu un bastion privilégié des Iraniens. Cet émirat du Golfe persique est considéré par les Ayatollahs comme la 14ième province de l’Iran. Les Gardiens de la Révolution y ont formé des organisations terroristes et ont acheminé de là des armes vers le Liban et la bande de Gaza.
Nous assistons également à une expansion iranienne importante au Yémen. La capitale, Sanaa, est tombée aux mains de la milice chiite Houthi, soutenue par l’Iran. Cette milice a revendiqué le contrôle de Bâb-el-Mandeb, un détroit stratégique au sud de la mer Rouge oùtraversent de nombreux pétroliers transportant, chaque jour, plus de 3 millions de barils de pétrole. Cette prise confirme que l’Iran souhaite contrôler l’une des voies maritimes les plus importantes du marché internationale.
Déjà en 1991, le Guide spirituel, l’Ayatollah Khamenei, déclarait au journal Resalât : « l’Iran s’efforcera non seulement de défendre ses propres frontières territoriales mais devra absolument poursuivre son expansion.”
L’ancien conseiller du président américain, Denis Ross, interpelle les négociateurs occidentaux et remet en cause la sincérité des intentions de l’Iran.
Ross et deux autres experts américains,s’interrogent dans un article publié récemment dans Politico : « Comment se fait-il que le groupe 5 + 1 a cédé en permettant à l’Iran d’enrichir de l’uranium, contre l’avis de six résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU. Les Occidentaux n’ont pas exigé de réduire considérablement le nombre des centrifugeuses et n’ont pas non plus exigé le démantèlement des installations nucléaires problématiques, telle que Fordue. Toujours selon ces experts, l’Iran n’a fait aucune concession substantielle.
Dans ce contexte, nous constatons qu’il existe de nombreuses failles dans ce futur accord , et plusieurs questions n’ont pas eu de réponses tangibles :
Ce futur accord pourra-t-il vraiment réduire de manière significative la capacité nucléaire de l’Iran ? Rendra-t-il plus difficile la mission des inspecteurs de l’AIEA (Agence Internationale de l’Energie Atomique) ? Pourra-t-il empêcher l’Iran de fabriquer une bombe atomique ?
Dans son nouveau livre L’Ordre mondial, Henry Kissinger refuse de croire que les négociations nucléaires entre Washington et Téhéran produiront un changement fondamental dans les relations entre les deux pays. Il ne croit pas non plus que l’Occident y gagnera un avantage politique.
La politique expansionniste de l’Iran au Moyen-Orient confirme, une fois de plus, que l’Occident se trompe sur toute la ligne et commet une grave erreur en pensant très naïvement que Téhéran a amorçé un nouveau cap vers la modération.
Nous affirmons clairement que l’Iran cherche à atteindre par tous les moyens une hégémonie régionale et qu’il n’abandonnera jamais ses ambitions nucléaires. Une fois que les sanctions seront levées, eh bien, l’Iran accélérera le développement de ses armes atomiques et renforcera encore plus sa position dominante dans la région.
Dans ces conditions, l’Occident devrait parvenir à un mauvais accord et il serait donc préférable, et plus sage, de ne signer aucun accord.
Dore Gold