Le nouveau front palestinien à la Haye

Les Palestiniens poursuivent leurs démarches unilatérales et se dérobent à chaque fois pour ne pas reprendre les pourparlers  de paix directs avec Israël. Ces jours-ci, ils ont choisi de soulever leur cause devant la Cour Pénale Internationale de la Haye. Ce tribunal  a été fondé en 2002 pour poursuivre  tous ceux qui se livrent à des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité, et des génocides. Malgré ce noble objectif Israël et les Etats-Unis ont refusé de signer le Traité de Rome car il a servi de base au nouveau tribunal. Ils craignaient à juste titre que le procureur général, pourrait un jour, pour des raisons politiques,  abuser de ses pouvoirs pour agir injustement contre leurs propres soldats.

Bizarrement, le 22 janvier 2009, l’Autorité palestinienne a publié une lettre officielle adressée au procureur général, reconnaissant l’autorité juridique du tribunal, la CPI.

J’ai eu ce privilège d’être invité au bureau du procureur à la Haye pour pouvoir confronter la demande palestinienne. Il était évident que l’Autorité palestinienne visait deux objectifs: le ministre palestinien de la Justice, Ali Kashan, avait  expliqué lors de sa demande à la Cour en 2009 qu’il reconnaissait l’autorité juridique de la Cour Pénale Internationale selon la clause très spécifique du traité de Rome réservée uniquement aux « Etats ».

En d’autres termes, afin que la Cour Internationale puisse donner suite effectivement à cette missive, celle -ci devrait tout d’abord reconnaître l’Autorité palestinienne en tant qu’Etat. Une démarche rusée dont le but était de solliciter l’aide d’une autorité juridique prestigieuse afin de définir l’Autorité palestinienne comme étant déjà un Etat. Une amorce   d’une stratégie globale  qui a pour but de proclamer unilatéralement la création d’un Etat palestinien indépendant.

En 1999, les Palestiniens ont déjà évoqué la possibilité d’une déclaration unilatérale  et ils ont fait valoir que l’accord intérimaire d’Oslo signé en1994 n’était plus valable après cinq ans.

En utilisant le cas du Kosovo et en présentant d’Israël comme Etat dont ses soldats effectuent des crimes de guerre, la voie serait tracée pour la reconnaissance des Palestiniens.

En février 2008, lorsque le Kosovo a déclaré son indépendance de l’ancienne Yougoslavie, les Palestiniens ont en effet calqué  cette procédure mais se sont retrouvés devant un dilemme complexe : l’accord intérimaire Israélo-palestinien de 1995 interdit clairement aux deux parties d’agir unilatéralement de manière à changer le statut juridique de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza.

Une déclaration unilatérale pour la création d’un Etat palestinien aurait donc constitué une violation substantielle des Accords d’Oslo, et aurait créé des défis internationaux pour l’Autorité palestinienne lorsque celle-ci aurait sollicité la reconnaissance internationale.

Dans ce contexte, les Palestiniens ont choisi une autre option selon laquelle les institutions internationales reconnaîtront à leur place  l’existence de l’Etat palestinien et le fait qu’il existe déjà.

L’initiateur de ce projet est l’ancien ministre des Affaires extérieures de la Communauté européenne, Javier Solana. Il a déclaré le 12 juillet 2009, à Londres: ” si les deux parties ne parvenaient pas à aboutir à un accord jusqu’à un certain délai, le Conseil de Sécurité de l’ONU reconnaîtra alors l’Etat palestinien et déterminera ses frontières sur les lignes de 1967 et décidera de l’avenir de Jérusalem. “

Ce scénario aurait ainsi résolu la question des frontières étant donné que la reconnaissance des lignes de 67 comme tracé des frontières serait la conséquence d’une décision de l’ONU et non des Palestiniens. Cette option aurait permis aux Palestiniens de préserver leurs revendications territoriales sur d’autres parties d’Israël qu’ils auraient exigées au futur.

Dans une lettre officielle envoyée en 1999 par Nasser Al Kidwa, observateur de l’OLP à l’ONU, au Secrétaire général Kofi Annan, il se réfère pour les revendications territoriales palestiniennes sur la résolution 181de l’ONU, connue également comme le plan de partage de 1947.

Abou Alla, Président du Parlement palestinien a aussi soulevé ce sujet.

Il est bien difficile d’ignorer le fait que dans la missive envoyée à la Cour Pénale Internationale, les Palestiniens n’ont pas mentionné clairement le tracé des  frontières. S’agit-il des lignes de 67? De 47? Ou autres tracés ? Les Palestiniens ont préféré le flou en soulignant que les compétences juridiques de la CPI se baseraient sur « le territoire de la Palestine ».

Le deuxième objectif des Palestiniens en s’adressant à la CPI de la Haye est d’initier des mesures juridiques internationales contre les officiers israéliens suite à l’opération « Plomb durci » dans la bande de Gaza. Cet objectif a reçu un soutien considérable dans le rapport Goldstone, qui a déjà appelé le procureur de la CPI pour décider d’accepter la déclaration des Palestiniens de 2009.

La démarche est claire. En présentant l’Etat d’Israël comme un Etat dont ses soldats effectuent des crimes de guerre, et en nuisant à sa réputation internationale, les Palestiniens préparent le terrain pour bénéficier d’une légitimité lorsqu’ils décideront de prendre à l’avenir des décisions unilatérales. Ils ont une bonne raison d’y croire : il est possible de supposer que l’indépendance du Kosovo n’aurait pas été reconnue aussi largement par la communauté internationale si la Serbie n’avait pas été accusée à plusieurs reprises de crimes de guerre au cours des hostilités en Bosnie.

En conclusion, l’acceptation par la PCI de la proclamation palestinienne, risque de l’accuser de politisation  et contribuera à l’érosion des Accords d’Oslo et en fait sapera les fondements du processus de paix.