Bar Kohva : le mythe, la bravoure, et toujours l’audace
Cette semaine nous célébrons la Révolte des Juifs contre l’Empire romain dirigée par Shimon Bar Kohva. Cette révolte historique qui s’est déroulée dans les années 132-135 de notre ère symbolise notre combat inlassable pour notre libération nationale. Au fil des ans, Bar Kohva est devenu un héros légendaire et une source d’inspiration pour les futures générations. Cependant, la défaite de Bar Kohva, le résultat néfaste de la rébellion, notamment la dévastation du pays et le nombre impressionnant des pertes humaines, ont déclenché un débat public sur l’utilité du combat contre une grande puissance. Ne serait-il pas dans les circonstances voué à l’échec et perdu d’avance ?
Le Premier ministre David Ben Gourion, comme d’ailleurs la majorité de sa génération, a décrit Bar Kohva comme un dirigeant courageux et audacieux, source d’inspiration pour la nouvelle jeunesse israélienne ; ces sabras et nouveaux immigrants qui ont participé en 1948 à l’effort de la guerre de l’Indépendance et l’établissement de l’Etat juif. Quant aux Révisionnistes, dirigés par Zeev Jabotinsky, ils décidèrent que le nom de leur mouvement de jeunesse soit pris de Bétar, la dernière forteresse de Bar Kohva. En 1982, Menahem Begin avait honoré les derniers survivants de la Révolte par une cérémonie militaire de Tsahal. Soulignons que le mouvement Bétar fut aussi inspiré par un autre héros légendaire, Joseph Trumpeldor.
Dans les années 70, Yehoshafat Harkavi, ancien chef du renseignement militaire, et spécialiste de la question palestinienne, est de ceux qui avait accusé Bar Kohva et ses partisans d’être responsables du désastre national qu’à provoqué leur révolte. Il avait évoqué leur naïveté flagrante et leur engagement irresponsable dans une guerre sans espoir contre l’Empire romain.
Sans aucun doute, la tactique de la terre brulée employée par les Romains, les pertes humaines et les dégâts commis suite à trois longues années de guerre furent monstrueux. Selon l’historien romain Dion Cassius, 985 villages juifs ont été pillés et détruits et plus de 580 000 Juifs ont été tués ! Après la révolte, l’empereur Hadrien avait interdit à tous les Juifs le libre accès à Jérusalem. L’Autorité religieuse de l’époque, les membres du Sanhédrin et notamment le célèbre Sage Rabbi Akiva, qui considérait Bar Kohva comme le messie, ont été torturés et exécutés par les Romains.
Il faut dire que les opinions du général Harkavi ont influencé toute une génération de politiciens et d’hommes de lettres. L’ancien ministre des Affaires étrangères Shlomo Ben Ami, connu pour ses opinions sur la solution du problème palestinien, a souvent évoqué « l’érosion des mythes antiques ». Selon lui, il est possible de changer « l’obsession messianique » d’Israël dans les Territoires.
Certains historiens et observateurs prétendent également que les Juifs auraient dû se résigner après la destruction du Deuxième Temple et se contenter d’une identité spirituelle, comme la construction d’une Yeshiva par le Rabbin Yohanan Ben Zaccaï à Yavné. Selon eux, les Juifs de l’époque auraient pu ainsi bénéficier d’une certaine tolérance de la part des Romains. Mais en réalité, les Romains avaient manifesté haine et hostilité envers les Juifs en Judée mais également partout ailleurs dans les communautés de la diaspora.
Sous l’empereur Domitien (81-96) les armées romaines ont poursuivi tout dirigeant potentiel de la dynastie du roi David. Sous l’empereur Trajan (98-117) les forces romaines ont massacré des communautés juives installées en Mésopotamie, en Egypte, en Cyrénaïque (Libye) et à Chypre. Et 15 ans plus tard, l’empereur Hadrien interdit la circoncision et décide de construire un temple romain sous les décombres du Deuxième Temple détruit. Par tous les moyens, Rome a écrasé la volonté nationale du peuple juif et a déraciné toute présence hébraïque. Ainsi, Hadrien change le nom de Judée en Syrie-Palestine, et Jérusalem deviendra Aelia Capitolina.
Concernant la Révolte, l’un des grands mystères demeure dans la motivation extraordinaire de Bar Kohva et de ses compagnons de combattre courageusement contre pas moins de 12 légions romaines sur les 28 existantes au sein des provinces de l’Empire.
Dans le contexte d’aujourd’hui comment donc qualifier la Révolte ? Bar Kohva est-il vraiment un héros légendaire comme l’ont perçu les fondateurs de l’Etat d’Israël ? Le Professeur Yadin, ancien chef d’état-major de Tsahal mais aussi archéologue, a souligné la difficulté de juger rétrospectivement la sagesse de ceux qui ont combattu contre l’Empire romain. Dans cette période précise, il n’existait pas un seul historien de la trempe de Flavius Josèphe pour apporter un témoignage crédible.
En analysant les conséquences de la Révolte de Bar Kohva sur les questions politiques graves auxquelles Israël est confronté depuis sa création, Yadin estime que suite à un éventuel refus de la part du leadership de 1948 d’adopter une version héroïque, il est fort probable que Ben Gourion n’aurait pas proclamé l’indépendance d’Israël par crainte d’une invasion des Etats arabes qui possédaient une force militaire supérieure à celle du Yishouv. En outre, Israël n’aurait jamais déclenché une attaque préventive avant le déclenchement de la Guerre des Six Jours, au moment où l’Egypte, la Syrie, la Jordanie et l’Irak concentraient des forces considérables le long des frontières.
L’impact de la Révolte a marqué de son empreinte les générations futures. Enfin, n’oublions pas l’héroïsme dans l’Histoire des autres peuples. Celui de Sparte contre les Perses, des Américains contre les Mexicains à Alamo, ou la victoire des Russes sur les Allemands à Stalingrad.
En conclusion, deux mille ans se sont déjà écoulés depuis cette Révolte et le mythe est vivace et omniprésent. Le peuple juif est retourné à sa terre et a rétabli son propre Etat grâce à l’une de ses sources d’inspiration, celle de la bravoure et de l’audace exemplaires de Shimon Bar Kohva.
Dore Gold
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