Le Hamas face au pouvoir des Frères musulmans : les dilemmes
- Le Hamas abandonne le navire en perdition qu’est la Syrie et nombreux de ses cadres supérieurs se sont déjà installés dans la bande de Gaza. Dans le même temps, l’Iran a réduit sa subvention au Hamas. Elle repose désormais sur les revenus du commerce de la contrebande à travers les tunnels mais elle ne peut soutenir l’ensemble de l’économie des Gazaouis.
- Le Hamas cherche de trouver de nouvelles installations dont des logements et des bureaux pour Khaled Mashaal et ses troupes. Il devrait aussi payer un prix politique en diminuant les actions terroristes. Dans ce contexte, le but est de transformer le Hamas d’un mouvement pro iranien/syrien “muqawama” (résistance) en un parti politique typique de la confrérie des Frères Musulmans dans le cadre d’un long processus et qui a pour objectif la prise du contrôle du monde arabe.
- Le leadership du Hamas à Gaza préfère s’engager avec le Caire en raison des perspectives de domination des Frères Musulmans en Egypte et son proche voisinage, et ce pour une éventuelle union de toutes les forces islamiques vers une restauration d’un Califat mondial.
- Cependant, l’armée égyptienne aussi bien que les Frères Musulmans ne peuvent admettre la présence d’un mouvement militant menaçant la situation sécuritaire précaire en Egypte et l’équilibre délicat que les Frères Musulmans veulent établir avec l’armée. Certes, les Frères Musulmans ne se soucient pas du fait que le Hamas continue d’être un mouvement de “résistance”, bien au contraire, mais ils ne souhaitent pas que le Caire serve de tremplin à leurs activités. D’autre part, le Hamas ne peut pas non plus déplacer la “résistance” en Cisjordanie car il sait parfaitement qu’il sera confronté à l’armée israélienne.
Quant à la Jordanie, le nouveau Premier ministre, Awn Khasawneh, a clairement indiqué qu’il était intéressé à ouvrir une nouvelle page avec le Hamas et que la décision de fermer ses bureaux à Amman a été une erreur. Selon certaines informations, le chef du Hamas Khaled Mashaal devrait rencontrer prochainement le roi Abdallah II dans son palais royal, mais aucune date n’a été encore fixée.
Dans cette perspective, il existe également des tiraillements ultérieurs liés aux affaires interarabes.
Les déclarations du Premier ministre jordanien aussi bien que les résultats des élections au Maroc qui ont conduit au pouvoir le Parti de la Justice et du Développement – à savoir une filière des Frères Musulmans – n’ont pas été approuvé à Riyad, où les Saoudiens ont pris une position ferme contre les Frères Musulmans. En conséquence, le prix que la Jordanie pourrait payer pour l’hébergement du Hamas pourrait être le refus de son adhésion au Conseil de la Coopération du Golfe (GCC) qui pourrait infliger un coup dur à l’économie jordanienne. Cela pourrait s’impliquer également au Maroc, surtout après que le dirigeant des Frères Musulmans en Tunisie, Rashid al-Ghannouchi, vient de menacer toutes les monarchies au Moyen Orient en affirmant qu’elles ne sont plus à l’abri.
Alors que l’Arabie Saoudite salafiste prend une position ferme contre les Frères Musulmans, son minuscule voisin, l’Emirat du Qatar, demeure champion de la propagande des Frères Musulmans à travers tout le Moyen Orient. Le Qatar souhaite être intermédiaire dans la “réconciliation” avec le roi hachémite et insiste à désigner un membre important de la famille de l’émir pour accompagner Mashaal lors de sa visite prévue à Amman.
L’Arabie saoudite est donc en colère contre la campagne orchestrée du Qatar de promouvoir les Frères Musulmans, mais elle n’est pas la seule, l’Iran et la Syrie sont aussi furieuses pour d’autres raisons et différents intérêts.