Au cours de cette dernière décennie et au fil des mois écoulés, nous observons un net consensus international sur le fait que l’Iran recherche sans relâche des armes atomiques et ne poursuit pas un programme nucléaire civil comme il le prétend constamment.
Certes, le traité de non prolifération nucléaire garantit les droits des signataires, comme l’Iran, à utiliser de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, mais en aucun cas lui permet d’enrichir de l’uranium pour produire des armes atomiques. Plusieurs pays avec des infrastructures nucléaires, comme la Corée du Sud, la Finlande, l’Espagne ou la Suède reçoivent leurs combustibles nucléaires de l’étranger. Même aux Etats-Unis et encore en 2010, 92% de l’uranium utilisé par les centrales nucléaires n’étaient que d’origine étrangère. Par contre, l’Iran, lui, a choisi d’établir sa propre infrastructure d’enrichissement d’uranium à Natanz et ce n’est qu’en 2002 seulement que l’opposition iranienne a divulgué le secret au monde entier. Un autre site d’enrichissement d’uranium enfoui profondément dans le sol près de Qom a été divulgué en 2009, et depuis les soupçons internationaux n’ont cessé d’augmenter. La ligne officielle iranienne prétextant une production d’électricité a perdu toute crédibilité et s’est effondrée pour une raison simple : l’Iran possède des réserves énormes de pétrole et de gaz.
Déjà en février 2006, le ministre français des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, déclare sans ambages qu’il s’agit “d’un programme militaire clandestin”. Et même les Russes ne pouvaient plus défendre l’argument iranien selon lequel ces sites sont utilisés à des fins purement civiles. En juillet 2010, le Président Dimitri Medvedev a franchement admis : ” Nous ne sommes plus indifférents sur les composants militaires du programme nucléaire iranien.”
Le 11 décembre 2011, le Secrétaire américain à la Défense, Léon Panetta, affirme à la chaîne CBS que l’Iran pourrait se doter d’une arme nucléaire dans: “environ un an… peut être un peu moins”. Pour Washington, ce n’était plus une question de savoir si l’Iran souhaite fabriquer une bombe nucléaire mais plutôt quand elle la produira!
Depuis 2007, le Conseil de sécurité a adopté six résolutions mais il existe malheureusement une tendance non alarmiste concernant l’imminence du danger de la menace nucléaire iranienne. Pour exemple, le 19 août 2011, le New York Times a publié un article important intitulé: “Les Etats Unis assurent Israël que la menace iranienne n’est pas imminente”. Les auteurs affirment que l’Iran est confronté à des problèmes majeurs avec son programme nucléaire, et l’administration Obama a donc conclu que cela prendrait un an ou plus pour que l’Iran se lance dans le sprint final pour acquérir l’arme nucléaire.
Ces hypothèses optimistes sur le programme nucléaire iranien se sont multipliées, et le Washington Post a osé titrer le 18 octobre 2011 : “l’Iran se retire du programme nucléaire”. Le journal explique que suite aux « cyber- attaques » contre les installations nucléaires iraniennes, son principal site d’enrichissement d’uranium a eu un rendement bien faible. Ses centrifugeuses pour enrichir l’uranium devenaient archaïques, et existait une pénurie de pièces de rechange. Le Time magazine ainsi que CNN ont poursuivi dans cette logique et ont mis en relief cet argument. Même la chaîne Fox a rapporté que l’Iran avait des “problèmes majeurs” concernant son programme nucléaire. L’un des célèbres analystes de la chaîne, Charles Krauthammer, a même affirmé que l’Occident serait capable de “désarmer ou retarder ce programme”.”
Les installations nucléaires iraniennes connues en Occident sont surveillées par l’AIEA qui utilise des caméras et effectuent des visites d’inspection régulières sur le terrain.
Selon le rapport de l’AIEA du mois de mai 2009, l’Iran avait 4920 centrifugeuses opérationnelles d’uranium enrichi à Natanz ; mais dans le rapport de l’année d’après, en mai 2010, le chiffre a chuté à 3936- soit moins d’un millier de centrifugeuses opérationnelles qu’en 2009. De ce fait, certains analystes ont conclu que le programme nucléaire iranien est en difficulté. Cependant, comment expliquer que les quantités globales d’uranium faiblement enrichis stockés ne cessent de croître. Si l’Iran avait 839 kilos d’uranium faiblement enrichi selon le rapport de juin 2009 de l’AIEA, il avait 2,427 kilos dans le rapport de mai 2010. En novembre 2011, l’AIEA affirmait que l’Iran possède 4,922 kilos d’uranium faiblement enrichi. Donc, si l’Iran a besoin de 914 kilos d’uranium faiblement enrichi pour produire une seule bombe, alors l’Iran a déjà assez d’uranium pour fabriquer au moins quatre ou cinq bombes atomiques.
Le taux de l’enrichissement de l’uranium selon ces rapports s’est également accéléré. Selon les données développées par l’Institut des Sciences et de la Technologie, publiées en mai 2009, les Iraniens ont produit chaque mois un peu plus de 80 kilos d’uranium faiblement enrichi.
Un autre sujet de préoccupation concernant le programme iranien est focalisé sur le site Fordow près de Qom. L’Iran avait gardé le secret jusqu’en septembre 2009. Rappelons que ce site est profondément enfoui sous terre.
En juin 2011, Fereydoun Abbas-Davani, directeur du programme iranien à l’énergie atomique, a annoncé que Téhéran avait l’intention de tripler sa capacité de production d’uranium enrichi à 20%. Cependant, deux mois plus tard, dans un entretien publié par l’Agence de presse iranienne, il a avoué que son pays a produit de l’uranium enrichi à 20% dans des quantités qui “ont déjà dépassé la quantité requise pour le réacteur de recherches situé à Téhéran.” En effet, le rapport de l’AIEA publié en novembre 2011 indique que l’Iran a déjà produit 73.7kg d’uranium enrichi à 20%; Etant donné qu’il faut seulement de 6 à 10 kilos par an pour alimenter le réacteur de recherche de Téhéran, l’Iran a donc suffisamment de carburant pour une période de 7 ans. En outre, ces stocks pourraient se développer considérablement si les Iraniens décident d’installer rapidement des centrifugeuses pour produire de l’uranium enrichi. Que fera t-ils avec l’excédent des quantités d’uranium?
Eh bien, Abbas-Davani propose clairement d’augmenter massivement la production à des fins militaires.
La principale question en suspens est de savoir combien de sites d’enrichissement l’Iran a-t-il aujourd’hui ? En août 2010, l’Iran a annoncé qu’il avait construit dix nouveaux sites d’enrichissement enfouis dans les montagnes. La construction de ces nouvelles usines de production devait commencer au début 2011. Mais où sont-ils? L’AIEA a avoué dans son rapport de mai 2011 que ses « connaissances sur les activités iraniennes diminuent à chaque fois”.
Le 23 juin 2011, Olli Heinonen, ancien directeur adjoint de l’AIEA et l’un de ses inspecteurs en chef, a affirmé devant le commission des Affaires étrangères de la chambre des représentants américains que l’Iran est capable, jusqu’à la fin de l’année 2012, de produire 250 kilos d’uranium enrichi, suffisant pour fabriquer deux bombes atomiques, et que l’ensemble du stock d’uranium enrichi pourrait être converti par la suite pour fabriquer plusieurs bombes atomiques.
En fait, il existe trois dimensions pour tout programme nucléaire à des fins militaires : l’uranium enrichi, les missiles balistiques et les ogives nucléaires.
Les données publiques publiées par l’Agence internationale de l’énergie atomique indiquent clairement que le programme nucléaire iranien progresse dans tous les domaines. Cependant, il existe toujours des appréciations contradictoires sur l’urgence du problème. Les Russes et les Chinois semblent préférer traîner les pieds sur les sanctions contre l’Iran au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies. Un rapport des Nations Unies en 2011 a estimé que les sanctions n’ont eu qu’un impact limité sur le régime des ayatollahs. Le rapport a conclu que les sanctions qui ont été imposées sur l’Iran “n’ont pas encore eu d’impact sur la décision que devrait prendre le dirigeant iranien à l’égard de l’enrichissement et sur les activités en matière d’eau lourde.” Et malgré que la Communauté européenne a convenu d’imposer un embargo sur le pétrole, plusieurs mois devraient s’écouler avant que ces sanctions seraient pleinement mises en vigueur.
Extraits d’un article pris du document “Iran: défi régional- menace mondial” (248 p;) publié et édité par le JCPA- CAPE. Voir l’intégralité de l’article et ses notes ainsi que le document en PDF sur le site en anglais du JCPA.