Israël et la Turquie face à la menace iranienne
Les accords conclus entre Israël et la Turquie pour parvenir à une véritable normalisation nécessitent un examen plus approfondi à la lumière de l’instabilité actuelle au Moyen-Orient et en particulier de la crise syrienne et des menaces iraniennes.
Bien que la Turquie soit liée à l’Occident par le biais de nombreuses institutions et organismes tel que l’OTAN, elle est toujours contrôlée par le parti AKP, dont l’idéologie est « néo-ottomane ». La signification de ce terme largement repris dans les correspondances diplomatiques et dans la presse prouve que ce parti cherche à élargir ses cercles d’influence au sein de territoires conquis jadis par l’ancien empire ottoman.
En octobre 2009, le ministre turc des Affaires étrangères avait fait allusion à cet objectif en affirmant à Sarajevo que « les Balkans, le Caucase et le Moyen Orient se trouvaient dans une situation meilleure que quand ils étaient sous influence ou contrôle de l’empire ottoman ».
Cependant, et en ce qui nous concerne, nous pouvons lire cette semaine dans le journal turc de tendance islamique Zaman que le gouvernement d’Ankara ne souhaite pas un conflit permanent avec Israël. En décrivant Israël comme un « pays important dans la région », l’éditorialiste explique que « les évènements en Syrie, en Irak et le conflit avec les kurdes ont forcé la Turquie à entamer des consultations avec Israël ». Si cette approche devait être adoptée par le gouvernement turc, alors il existe des chances que la réconciliation avec l’Etat juif porte ses fruits.
La Turquie a accueilli des dizaines de milliers de réfugiés syriens mais ne se fait aucune illusion sur les dangers et les menaces pesant sur la stabilité du Moyen-Orient et sur ses propres intérêts vitaux.
L’ancien Secrétaire d’Etat américain, Henry Kissinger, grand spécialiste des relations internationales depuis le 19ème siècle, nous conseille de porter un regard plus réaliste à la situation. Selon lui, avant d’aboutir à une paix viable, les pays devraient accorder la priorité à l’instauration absolue de la stabilité régionale. Certes, la paix demeure un important objectif, mais elle ne pourrait être atteinte uniquement par le biais d’un processus de stabilité et de sécurité régionales. Ce processus dépend surtout de Washington et de l’administration Obama car la menace réelle et omniprésente dans notre région est l’Iran. Aujourd’hui, le pays des ayatollahs sabote toute tentative pacifique. Les Gardiens de la Révolution islamique sont déployés en Syrie et des avions cargo iraniens traversent l’espace aérien syrien pour réapprovisionner l’armée de Bachar el-Assad.
Dans ce contexte, Ankara devrait comprendre que ses intérêts les plus vitaux au Moyen-Orient seront complètement compromis le jour où Téhéran franchira la ligne rouge pour obtenir l’arme nucléaire. De ce fait, ses relations renouvelées avec Israël pourront être bénéfiques et solides pour affronter ensemble les menaces et relever les défis communs.
Dore Gold