Un retrait de Tsahal de Cisjordanie : lieu de refuge pour des groupes extrémistes ?!

sécuritéJCPA2– Pour pouvoir accorder la moindre chance de succès, tout mouvement de révolte ou groupe terroriste a nécessairement besoin d’un lieu de sûreté pour y opérer. Israël est parfaitement conscient du phénomène et du fait que des groupes hostiles auront le champ libre et pourront contrôler les terres qui jouxtent à ses propres frontières, au sud du Liban, et dans la bande de Gaza. Toute initiative similaire à céder complètement le contrôle aux Palestiniens de Cisjordanie ou une partie de Jérusalem entraînerait un risque immense.

– Certains argumentent qu’un Etat moderne de haute-technologie peut surveiller les activités hostiles hors de ses frontières. Mais la surveillance et la collecte des renseignements contre un réseau extrémiste agissant dans le secret, profondément ancré, et opérant au sein d’une population dense, demeure une mission compliquée et une cible difficile à cerner. Aucun service de renseignements au monde ne pourra garantir un taux de réussite élevé contre tel objectif.

– L’idée qu’une force internationale, soit une force de l’Otan, remplacerait la présence de Tsahal en Cisjordanie, soulève un nombre de questions très sérieuses. Qui seront ses membres et combien de temps resteront ces troupes sur le terrain? Certaines nations ne sont pas toujours préparées à mettre leurs troupes sous danger excessif. Au Liban, pour exemple, en 1983, des bombes suicidaires ont tué 300 soldats et ont conduit au retrait des forces françaises et américaines. Et à Madrid, l’attaque d’Al-Qaïda à conduit au retrait des forces espagnoles de la campagne en Irak. Justement, comment pourrons nous être certains que l’électorat de ces pays contributeurs au maintien de la paix, permettrait à leurs forces de se déployer en Cisjordanie, dans ces conditions et pressions.

– Dans quelle mesure une mission de l’Otan obtiendrait-elle l’assurance de pouvoir permettre à Israël de protéger son propre peuple?

Enfin, toute mission de l’OTAN qui échouera en Cisjordanie encouragera et renforcera les djiadistes de poursuivre leur activités de plus belle à travers le monde.

Le conflit du Vietnam fut un exemple classique de l’utilité du refuge. Plus récemment, dans la campagne de l’Irak, les extrémistes sunnites se sont enfuis en trouvant un lieu de sûreté en Syrie. Damas demeure leur base principale et la plaque tournante pour un soutien logistique et une voie directe pour les kamikazes pour pouvoir s’exploser quotidiennement en Irak. L’Iran aussi sert de refuge aux Shiites insurgés qui attaquent fréquemment les forces de coalition. Les Gardes de la Révolution islamique et le Hezbollah sont également responsables de la formation et de l’organisation des attentats en fournissant des explosifs, des armes et des munitions.

Au mois de mars dernier, le général américain Petraeus, a révélé devant le comité des Relations étrangères du Sénat que Téhéran permet aux dirigeants d’Al Qaïda de voyager librement entre le Pakistan et l’Afghanistan, utilisant efficacement le territoire iranien comme refuge sûr, tout en leur permettant également de tenir des réunions en Iran pour planifier les attaques terroristes contre les Etats-Unis et d’autres cibles occidentales.

La suprématie inégalée sur le plan technologique de l’armée américaine a échoué contre la capacité des Talibans de poursuivre la contrebande de munitions et infiltrer des groupes de combattants à travers la frontière afghane. Dans le cas d’Israël, on ne peut compter sur le soutien de la Jordanie ou sur son efficacité dans la lutte contre les activités des extrémistes, rappelons qu’ils cherchent également à déstabiliser le régime jordanien, une étape importante, selon eux, pour poursuivre la lutte armée jusqu’à la destruction d’Israël.

L’Otan emploie un effort considérable pour coordonner les mesures de sécurité transfrontalières avec le gouvernement Pakistanais. Cela parfois réussit. Certains membres du gouvernement pakistanais ont des objectifs différents, en soutenant les Talibans quand cela leur convient, ou du moins en fermant les yeux. Toutefois, ce pays souffre d’une aggravation dangereuse de la part de ses propres Talibans qui ont l’intention de faire tomber le gouvernement actuel, un objectif partagé par les dirigeants d’Al-Qaïda. Le départ des forces de l’Otan de l’Afghanistan, aggraverait la situation et permettrait qu’un Etat doté de l’arme nucléaire tombe un jour entre les mains des extrémistes.

Je n’exclue pas l’idée dans son principe qu’une force internationale, tel que l’Otan remplace la présence de Tsahal en Cisjordanie pour pouvoir maintenir la paix. Toutefois, cette idée soulève un certain nombre de questions très graves. Cela concerne, les pays, le temps de présence des troupes et toutes les difficultés à rassembler ces forces. Face à une opinion publique hostile à un engagement militaire extérieur et dangereux, certaines nations refuseront de participer à cette aventure pour également essayer de développer et maintenir de bonnes relations avec toutes les parties et tous les antagonistes. Les exemples sont nombreux et nous les avons mentionnés pour le Vietnam, l’Irak, le Liban ou l’Afghanistan et nous avons évoqué l’attaque d’Al-Qaïda à Madrid qui a conduit au retrait des forces espagnoles de la campagne irakienne. Le seul succès de l’Otan fut au Kosovo.

Des forces néerlandaises ont combattu vaillamment et efficacement en Afghanistan. Ils ont été courageux et ils ont eu de nombreuses victimes, mais Srebrenica ne pouvait être oubliée! En 1995, plus de 8000 civils ont été massacrés sous les yeux des casques bleus néerlandais. Pour conclure, je ne voudrais pas exclure la possibilité d’un retrait de Tsahal de la Cisjordanie, ou son remplacement par une force de l’Otan, mais avant que cela ne puisse être sérieusement envisagé, nous devons résoudre plusieurs questions fondamentales. Elles sont essentielles pour l’Otan, pour l’Occident dans son ensemble, et pour tout le Moyen- Orient.

Cet article est basé sur les propos du Colonel Richard Kemp, ancien commandant des forces britanniques en Afghanistan, lors d’une conférence du JCPA- CAPE tenue à Jérusalem.