Obstination française dans le règlement du conflit avec les Arabes
L’obstination d’accepter une solution « made en France » dans le règlement des conflits caractérise la politique française durant ces dernières décennies. Depuis le Général De Gaulle à nos jours, tous les présidents de la Cinquième République ont souhaité jouer un rôle d’influence. Chacun dans son style propre et avec une « certaine idée » de leur pays, ils s’efforçaient redorer le blason de la France, fortement terni après Vichy et l’époque coloniale.
Cet activisme dans l’arène internationale, particulièrement dans notre région, irrite et éveille une grande méfiance. Ces jours-ci encore, son cavalier seul au Liban, au Mali, face à la Turquie dans la crise libyenne, et son attitude à l’égard des Palestiniens, sème partout la zizanie.
Le double jeu est frappant car cette politique ignore au fil des ans le combat inlassable contre le terrorisme palestinien, et les efforts accomplis à la recherche de la paix par les Américains ou par les Arabes eux-mêmes.
Valéry Giscard d’Estaing avait une attitude frileuse à l’égard du geste magistral de Sadate et les accords de Camp David signés en 1979 avec l’Egypte. Il refusait d’applaudir également au coup spectaculaire d’Entebbe qui sauva l’équipage d’Air France et de nombreux otages.
François Mitterrand refusa en 1991 de participer à la fameuse Conférence de paix de Madrid soutenue conjointement par les Etats-Unis et l’Union soviétique.
Rappelons qu’il avait sauvé Arafat à Beyrouth lors de l’invasion israélienne en 1982. Des navires français l’avaient transféré avec ses troupes, sains et saufs, à Tunis.
Jacques Chirac a saboté l’initiative de paix du président Bill Clinton qui réunissait, en juillet 2000 à Camp David, Ehoud Barak et Yasser Arafat.
Nicolas Sarkozy reçoit à l’Elysée en décembre 2007 le colonel Mouammar Kadhafi. Puis en décembre 2010 Bachar el Assad, contrairement à l’avis des Américains et trois mois seulement avant le début de la répression en Syrie.
François Hollande avait réuni une Conférence internationale pour la paix au Moyen-Orient quelques jours seulement avant l’installation de Donald Trump à la Maison Blanche le 20 janvier 2017.
Ces jours-ci, au moment où les Emirats du Golfe persique normalisent leurs relations avec Israël, Emmanuel Macron garde le mutisme sur ses réelles intentions. Il félicite du bout des lèvres l’accord historique mais ne s’adresse pas directement au gouvernement Nétanyahou pour poursuivre le chemin de la paix. Macron préfère s’entretenir avec Mahmoud Abbas, lui affirmant que la reprise des négociations avec Israël restait « une priorité » pour « parvenir à une solution juste ». « Je lui ai dit ma détermination à œuvrer pour la paix au Proche-Orient », a affirmé le président français dans un message laconique publié sur Twitter.
Ignorant l’événement historique au Moyen-Orient, Macron persiste et signe :
« La reprise des négociations pour parvenir à une solution juste et respectueuse du droit international reste une priorité ».
En effet, elle demeure une priorité depuis 1975, le jour où Paris a ouvert un bureau diplomatique de l’OLP… Cette position française a-t-elle vraiment contribué à la paix ?
La France n’est pas capable de rallier les Européens face à la Turquie et à l’Iran, sans parler du fléau du terrorisme islamiste ou les problèmes de l’immigration. Comment donc promettre depuis plusieurs décennies de pouvoir régler le problème palestinien ?
Quand Macron affirme à Abbas sa « détermination à œuvrer pour la paix », la politique spectacle n’est certainement pas la bonne pour mener à bien les affaires diplomatiques d’un Etat qui se respecte et souhaite jouer un rôle d’influence.
Cette attitude à l’égard d’Israël et des Palestiniens est partagée sans aucun équivoque par la majorité de la presse française.
Le Monde intitule son éditorial : « soulagement trompeur. » Pour ce journal cet accord représente : « un vrai abandon : celui des Palestiniens par les Etats arabes du Golfe, en réalité, n’a que peu à voir avec la « paix » en Terre sainte. M. Nétanyahou peut se féliciter d’un accord qui n’impose à Israël aucune concession en faveur des Palestiniens, aucun retour à des négociations politiques, en échange de l’abandon d’une promesse électorale impréparée et impopulaire. Les Emirats ont choisi de se priver du moyen de pression le plus efficace sur Israël. Ils reconnaissent tacitement s’accommoder du régime d’occupation en vigueur dans les territoires depuis 1967. »
Et le journal de conclure : « Pour les nombreux Palestiniens qui ne croient plus à leur futur Etat, il risque de ne plus rester que la lutte contre l’occupation, avec tous les dangers que cela implique. »
Soulignons que le correspondant du Monde à Jérusalem, Louis Imbert, écrit le 22 août 2020 : « Le premier ministre israélien n’a cessé d’œuvrer à un rapprochement avec les monarchies arabes du Golfe grâce à des hommes de confiance, en dépit du conflit palestinien. » Imbert rappelle que l’ancien directeur du ministère des Affaires étrangères, aujourd’hui président du JCPA-CAPE, Dore Gold, est « dès novembre 2015, dépêché à Abou Dhabi pour y ouvrir une représentation israélienne. Les diplomates s’installent aux portes de l’aéroport international, au sein d’un organe crée par les Nations unies pour lutter contre le réchauffement climatique, l’Irena. « Je me sentais comme le premier homme qui marche sur la Lune. Nous pensions que nous posions des fondations », se remémore M. Gold.
Pourtant, la normalisation et la paix avec les pays arabes sont bizarrement interprétées comme une « véritable trahison ». Dans son article intitulé « la trahison d’Abraham », Sara Daniel du Nouvel Observateur écrit : « Le fait de ne pas parler avec Israël ne nous a rien apporté, affirment les Emirats par la voix de leur ministre. Mais on se demande ce que le fait de parler avec Israël avec le pistolet américain sur la tempe apporterait aux Palestiniens… »
Oublie-t-elle le terrorisme et le chantage des Palestiniens ? Les tirs de roquettes et les ballons incendiaires du Hamas ? Aucune condamnation non plus de la part des écologistes français sur les champs agricoles dévastés par les incendies sans mentionner les bunkers, les tunnels et les dépôts d’armes, d’explosifs et de roquettes sous les habitations de Gaza et de Beyrouth.
En conclusion, nous constatons que les dirigeants français comme la majorité des éditorialistes de la presse parisienne refusent de condamner les attaques quotidiennes du Hamas ni des autres organisations terroristes. En revanche, ils peuvent justifier « la lutte armée contre l’occupation ». Pour eux, aucune initiative de paix américaine ne devrait être prise au sérieux.
Combien d’années vont-ils encore attendre pour apercevoir un jour une première colombe de paix « made in France » ?