L’Assemblée générale de l’ONU et les nouveaux Etats
L’Assemblée générale de l’ONU n’a aucun pouvoir à reconnaître de nouveaux Etats. Elle ne peut que recommander à d’autres Etats de le faire, et elle l’a déjà fait par le passé.
Le débat public mené actuellement en Israël sur l’initiative palestinienne d’obtenir la reconnaissance de l’ONU à un Etat est fondé sur une conception fondamentalement erronée. Le débat se base sur une hypothèse selon laquelle l’Assemblée générale de l’ONU a autorité de proclamer la création de nouveaux Etats.
La source de l’erreur est due probablement dans la fameuse résolution 181 de l’Assemblée générale de l’ONU connue également comme « plan de partage. » On se souvient parfaitement des images du vote historique du 29 novembre 1947. Nous étions tous scotchés à nos postes de radios pour écouter les résultats du vote crucial à l’ONU.
Cependant, la résolution 181 n’a pas fondé l’Etat juif et juridiquement elle n’était qu’une recommandation. Celle-ci a permis à assermenter un règlement moral significatif pour la fondation d’un foyer juif en terre d’Israël. La base juridique pour la création de l’Etat d’Israël n’a été que la déclaration de l’Indépendance par David Ben Gourion le 14 mai 1948.
En fait, l’Assemblée générale de l’ONU n’a pas autorité à reconnaître des nouveaux Etats. L’Assemblée peut accepter de nouveaux membres dans ses rangs mais seulement qu’après que le Conseil de sécurité présente la candidature. Cependant, rappelons qu’un des cinq membres permanents pourrait imposer son veto sur cette candidature.
Plus de 75 pays reconnaissent aujourd’hui le Kosovo mais celui-ci n’est pas membre de l’ONU car la Russie a imposé son veto au Conseil de sécurité. En termes clairs, cela signifie que l’Assemblée générale n’a pas la possibilité de proclamer la création d’un Etat palestinien ou de le reconnaître. Elle peut uniquement recommander à d’autres Etats de le faire.
Il est à noter que le 15 décembre 1988 l’Assemblée générale a adopté la résolution 43/177 qui a reconnu « la proclamation d’un Etat palestinien » par Yasser Arafat au Conseil national palestinien réuni le 15 novembre 1988 à Alger.
Cette résolution a bénéficié du soutien de 104 pays et a également paraphé « la nécessité de permettre au peuple palestinien de réaliser sa souveraineté sur un territoire occupé depuis 1967.” Seuls Israël et les Etats-Unis se sont opposés et ont voté contre, 36 pays se sont abstenus.
Depuis, d’autres résolutions ont été adoptées par l’Assemblée générale de l’ONU, dont celle du mois de décembre 2008, rappelant le droit des Palestiniens à un Etat palestinien. Aucune de ces résolutions n’a réussi à créer une nouvelle réalité sur le plan juridique ou sur le terrain.
Alors, pourquoi donc les Palestiniens s’acharnent tant. Il existe deux principales raisons pour lesquelles l’Autorité palestinienne a choisi cette stratégie.
Premièrement, Abbas est convaincu qu’en devenant membre de l’ONU et en obtenant un Etat sans ne rien donner en contrepartie cela lui épargnera une proclamation formelle à Ramallah. Abbas est conscient des conséquences qui suivraient à la proclamation palestinienne. Ainsi dans une interview au magazine Newsweek du 24 avril 2011, il affirme qu’il n’est pas intéressé de le faire.
En 1998, le Premier ministre Netanyahou s’est déjà trouvé dans une situation face à l’initiative de Yasser Arafat de proclamer la création d’un Etat palestinien juste après l’expiration de l’accord intérimaire de 1999. Le 11 novembre 1998, le gouvernement israélien a clarifié qu’une telle démarche serait « une violation substantielle et fondamentale de l’accord intérimaire » et que si cette violation se produisait, Israël pourrait réagir par tous les moyens, y compris l’application de la loi israélienne sur les blocs d’implantations et les zones de sécurité en Judée et Samarie. Ainsi, Israël et les Etats-Unis avaient réussi à dissuader Arafat de proclamer la création de son Etat.
Les dirigeants palestiniens déclarent ne pas être intéressés par une nouvelle proclamation et ils précisent qu’ils se basent sur la déclaration d’Arafat faite à Alger en 1988. Dans ce contexte, Abbas serait en mesure de nier toute responsabilité dans les démarches prises par l’ONU et en même temps il pourra jouir du soutien de 130 Etats.
L’importance de la décision de l’Assemblée générale des Nations Unies dépend des futures activités palestiniennes. Les dirigeants palestiniens savent parfaitement que leur initiative à l’ONU ne changerait en rien la réalité sur le terrain et donc ils seront exposés à la critique du Hamas et ainsi perdraient leur pouvoir politique.
Les conseillers de Mahmoud Abbas lisent probablement la presse israélienne et les divers scénarios du « jour du jugement”. Selon ces prédications les implantations israéliennes et les bases militaires de Tsahal passeraient du statut d'”occupants” au statut d’ “envahisseurs” d’un Etat étranger, et ils estiment que ce changement serait possible.
Il serait irresponsable de négliger des sanctions éventuelles contre Israël, mais il faudrait savoir que pour imposer des sanctions il est nécessaire d’obtenir une résolution du Conseil de sécurité. L’administration Obama critique et s’oppose aux implantations israéliennes, mais elle est loin de sanctionner Israël comme l’ont fait les Etats-Unis en 1990 au moment où l’Irak de Saddam Hussein a envahi le Koweït.
En outre, suite à l’initiative palestinienne engagée à l’ONU contre la position de Washington, Mahmoud Abbas ne pourra pas revendiquer le soutien des Etats-Unis pour sa démarche au Conseil de sécurité.
Israël ne devrait pas sous estimer l’initiative palestinienne mais il possède des moyens pour agir fermement, comme il l’a déjà fait en 1998.
Pour dissuader les Palestiniens, Israël pourrait soutenir les initiatives du Congrès américain d’arrêter toute aide économique aux nouvelles institutions palestiniennes, dont les salaires aux fonctionnaires servant de base au pouvoir politique de Salam Fayyad.
Israël devrait exprimer clairement et sans ambages que le processus entamé à l’Assemblée générale est une violation fondamentale des accords d’Oslo. Ces accords ont clarifié que la question des frontières serait déterminée uniquement dans le cadre de négociations et non par des dictats internationaux.
Enfin, Abbas et ses conseillers espèrent aussi affaiblir l’opinion publique israélienne afin qu’un retrait total vers les lignes d’avant 1967 serait inévitable.
Israël ne manque pas de moyens devant ce nouveau ballet diplomatique mais seule une riposte israélienne ferme et une conviction intérieure dissuaderait les dirigeants palestiniens de poursuivre leur démarche unilatérale.