L’Iran renforce l’arsenal militaire du Hezbollah et du Hamas
Malgré son engagement à poursuivre les négociations sur le nucléaire, l’Iran continue d’armer et de former le Hezbollah, le Hamas et le Jihad islamique palestinien.
Téhéran a fourni des roquettes, des missiles (sol-sol), des drones, des systèmes anti-aériens sophistiqués ainsi que des radars de pointe, destinés à limiter la marge de manœuvre de l’aviation israélienne, principalement au Liban.
Le Guide suprême, l’Ayatollah Khamenei, a déclaré récemment que “tous les Palestiniens devraient être munis des meilleurs armes pour combattre les Sionistes ». Il a précisé que son objectif principal est de « renforcer la résistance de ses frères palestiniens à Gaza et en Cisjordanie. » Ils forment, selon lui, une seule et unique entité sous la direction du Hamas…
L’Iran cherche ainsi à resserrer l’étau sur Israël, au Nord (Hezbollah), au Sud (Gaza) et à l’Est (Cisjordanie).
Nous constatons que ces derniers mois, parallèlement aux négociations avec les Occidentaux sur l’avenir du projet nucléaire, l’Iran a enfin dévoilé le secret de la fourniture de roquettes et de missiles à des organisations terroristes. Aujourd’hui, l’Iran avoue publiquement son soutien au terrorisme anti-israélien sans aucune crainte des réactions de la part des Occidentaux.
Pour les Iraniens, la dernière opération de Tsahal à Gaza ainsi que les pourparlers sur le projet nucléaire avec les Américains renforcent leur doctrine de dissuasion, et écartent toute tentative des Israéliens de lancer des raids contre les sites nucléaires. Au départ, l’Iran craignait en effet que l’échec des négociations sur le nucléaire provoque, tôt ou tard, une attaque israélienne.
En augmentant la capacité de tir des missiles fournis au Hezbollah et aux Palestiniens, l’Iran dissuade ainsi Israël d’attaquer ses installations nucléaires. Toutefois, si Israël décidait un jour d’attaquer, les représailles iraniennes seraient alors « foudroyantes et réciproques ».
Les fournitures d’armes sont quotidiennes et passent par des contrebandes vers Gaza pour le Hamas et le Jihad islamique, et via la Syrie pour les convois destinés au Hezbollah. Selon la presse internationale, Israël a saboté plusieurs livraisons d’armes en territoire syrien. Ces armes sont considérées comme une menace réelle à la liberté d’action de l’aviation et de la marine israéliennes et font porter un danger sur les sites stratégiques de Tsahal. Toujours selon ces informations, le 7 décembre 2014, l’aviation israélienne aurait détruit des systèmes antiaériens de fabrication russe (probablement des S-300 SA), des missiles Fatah-110 et des drones iraniens.
La Syrie et l’Iran ont longtemps voulu acheter des S-300 de la Russie. Juste après le dernier raid attribué à Israël, et de manière inhabituelle, Moscou a protesté et a demandé des explications au gouvernement israélien. Le ministre syrien des Affaires étrangères Walid Mouallem a déclaré quelques semaines auparavant que la Russie fournissait à la Syrie des S-300PMU pour se défendre contre les attaques de l’aviation américaine opérant contre Daesh (l’Organisation de l’Etat islamique).
Toujours selon des dépêches parues dans la presse internationale, Israël avait déjà attaqué en janvier 2013 un convoi au Liban transportant une cargaison de missiles antiaériens S.A 17. Puis, en mai 2013, des missiles Fatah-100 à l’aéroport de Damas, et en juillet et en octobre 2013, dans le port de Lattaquié, des missiles de croisière Yakhont (P-800) ainsi que des radars destinés au Hezbollah.
Soulignons que quelques heures seulement avant l’attaque du 7 décembre 2014, l’envoyé spécial de Vladimir Poutine au Moyen-Orient, Mikhaïl Bogdanov, avait rencontré le Secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, dans le cadre des cérémonies marquant le 70e anniversaire des relations diplomatiques russo-libanaises. La Russie, l’Iran et le Hezbollah ont en effet un intérêt commun à assurer la survie du régime de Bachar al-Assad. Pour cette cause, le Hezbollah paie un lourd tribut et a perdu des centaines de combattants dans la guerre civile syrienne.
Sur le front Sud, le 14 décembre 2014, lors de l’anniversaire marquant la fondation du Hamas, le porte-parole de l’organisation palestinienne, Abou Obeida, a spécialement remercié l’Iran « pour son aide financière et militaire dans le combat que le Hamas mène contre les Sionistes. » Lors de ce rassemblement populaire, le Hamas a présenté au public des roquettes antichars, qui ont réussi selon lui à « briser le mythe de l’invincibilité du char Merkava », ainsi qu’un drone de type Ababil, et des fusils de pointe destinés aux tireurs d’élite du Hamas, tous de fabrication iranienne.
Le Guide suprême Khamenei a déclaré récemment devant un Congrès international de savants islamiques : « Nous avons traversé la barrière de la discorde confessionnelle. Nous avons aidé le Hezbollah au Liban – qui est un groupe chiite – de la même manière que nous avons aidé des groupes sunnites, tels que le Hamas et le Jihad islamique, et nous continuerons à le faire. Nous ne faisons aucune distinction entre eux – tous sont nos frères – à Gaza comme en Cisjordanie, en Irak comme en Syrie. » Les propos de Khamenei ont été repris et diffusés sur les réseaux sociaux illustrés par des caricatures antisémites et les slogans « Mort au sionisme ! » ou « Mort à Israël !»
Le ministre iranien de la Défense, le général Hussein Dehkan a déclaré dans une interview publiée le 20 décembre 2014 sur la chaîne iranienne en langue arabe Al-Alam TV : « le mouvement de résistance en Palestine occupée est capable grâce à notre aide technologique de concevoir et de produire des missiles » Il a précisé que la stratégie de l’Iran est de soutenir la résistance palestinienne par tous les moyens.
L’ancien ambassadeur iranien à Damas, Hussein Sheikholeslam, a été plus explicite sur le sujet : « notre principal ennemi [Israël] possède des armes nucléaires et dse missiles, et donc pour contrer ces menaces nous avons aidé le Hezbollah et nos frères palestiniens à fabriquer des roquettes afin, justement, de permettre à l’Iran de créer un « équilibre de terreur » et un bouclier de défense contre toute attaque israélienne éventuelle. »
Le chef des Pasdarans, Mohammad Ali Jafari, a déclaré « qu’il n’y a pas un lieu en Palestine qui sera à l’abri des missiles de la résistance palestinienne et que, tôt ou tard, le régime sioniste s’effondrera comme un château de cartes et avec lui viendra la capitulation de l’Amérique. » Jafari précise encore : « la libération de Jérusalem est assurée car elle est devenue une priorité absolue dans l’ordre du jour de la Révolution islamique ».
Dans le cadre des efforts de l’Iran pour démontrer ses capacités militaires, les médias iraniens ont publié toute sorte de photos de roquettes et de missiles qui se trouvent selon eux entre les mains des Palestiniens à Gaza et du Hezbollah au Liban, notamment le Fatah 110 d’une portée de 300 km et portant une ogive de 500 kg. Selon les Iraniens, ces missiles peuvent atteindre toutes les grandes villes israéliennes du Nord au Sud telles que Haïfa, Netanya, Herzliya, Tel-Aviv, Ashdod, Ashkelon et Beersheva. Il est à noter que pour les médias iraniens le réacteur nucléaire de Dimona reste une cible privilégiée.
Les Ayatollahs créent un lien direct entre les progrès dans les négociations sur le nucléaire et les efforts qu’ils investissent dans la fourniture de missiles et d’armes sophistiquées au Hezbollah et aux organisations palestiniennes.
Dans les mois à venir, l’Iran va donc intensifier ses efforts dans ce sens. La tâche du président, le « modéré » Hassan Rohani, ne sera pas facile car les Gardiens de la Révolution s’opposent à toute « réconciliation » avec l’Occident en précisant que ce n’est pas Rohani qui définit la politique de l’Iran dans le domaine des relations extérieures et de l’exportation de la révolution. Récemment, les Pasdarans ont même créé une sorte de « cabinet fantôme » avec d’anciens ministres d’Ahmadinejad pour justement contrecarrer les efforts de Rohani.
La récente baisse spectaculaire du prix du pétrole à moins de 60 dollars le baril intensifie encore plus la lutte interne, aggrave la situation économique et entrave la politique sociale promise par Rohani à ses électeurs.
L’affaiblissement de la présence américaine dans le Golfe et le renforcement de l’influence de l’Iran en Irak, en Syrie et au Liban, ainsi que les succès des organisations palestiniennes, du point de vue de l’Iran, dans les récentes séries de conflit avec Israël, redonnent confiance à Téhéran pour sa stratégie hégémonique et son inévitable confrontation avec Israël et l’Occident.
Michael Segall