Les Musulmans se disputent l’hégémonie sur Jérusalem-Est

Depuis la fin de la guerre des Six Jours en 1967, Jérusalem-Est a développé un système politique autonome, en dépit du fait qu’elle est liée à la fois à l’Etat d’Israël et à la Cisjordanie.

Les principales activités publiques et politiques des mouvements islamiques se déroulent sur l’esplanade des mosquées, avec la mosquée al-Aqsa et le dôme du Rocher, située sur le Mont du Temple. Dans ce contexte, plusieurs factions politiques et religieuses palestiniennes, des pays arabes et également de Turquie, se disputent l’hégémonie sur la Ville sainte.

En absence d’élections démocratiques et du fait du refus systématique des résidents palestiniens de participer aux élections municipales, il est bien difficile d’estimer la force des mouvements islamiques opérant à Jérusalem. Le seul critère qui permet d’évaluer leur force réside dans leur capacité de rassembler les foules sur la place d’al-Aqsa.

Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, se plaint souvent que la Ligue arabe n’ait pas honoré, à ce jour, sa promesse de transférer des fonds pour le « développement » de Jérusalem-Est. Il est conscient que le royaume saoudien s’y oppose farouchement.

En réalité, l’Arabie saoudite ne souhaite pas promouvoir le statut de Jérusalem car le royaume wahhabite considère la ville sainte comme « concurrente » de La Mecque.

Rappelons que les Salafistes (Wahhabites) considèrent le Hedjaz et La Mecque comme les centres spirituels de la foi islamique, tandis que les Frères musulmans ont choisi Le Caire et l’Université d’Al-Azhar. Fondée en l’an 970, celle-ci est devenue un centre important et influent des études islamiques par ses décrets sur l’Islam et la culture arabe. Cependant, comme Le Caire ne représente pas une sainteté religieuse particulière, la Confrérie a choisi Jérusalem comme centre religieux pour ses fidèles. De fait, les Salafistes se sont opposés farouchement aux Frères musulmans craignant que le statut spécial accordé à Jérusalem ne constitue un camouflet, voire un véritable danger, pour l’avenir de La Mecque.

Un imam jordanien exfiltré du mont du Temple en 2015 (ArabPress)

Le débat théologique, transformé en lutte politique et militaire entre Salafistes et Frères musulmans, se focalise toujours sur le statut des Lieux saints. Les Salafistes autorisent le pèlerinage et le sacrifice à la Mecque et à Médine uniquement. Ils détruisent systématiquement tout autre sanctuaire et lieu de culte musulman ou chrétien. Concernant la campagne controversée sur « Al-Aqsa est en danger » propagée par les Frères musulmans dans toute la région, les Salafistes, eux, la minimisent et préfèrent se concentrer plutôt – non pas sur Jérusalem et Al-Aqsa – mais sur un autre objectif : « la conquête de Rome » ; autrement dit, le monde chrétien.

Ainsi, nous pouvons le constater en analysant le site web intitulé La Sainte Mosquée d’Al-Aqsa. Des érudits salafistes s’y interrogent : Pourquoi le Prophète a tout d’abord conquis La Mecque et d’autres lieux, avant de se tourner vers Jérusalem ? Pourquoi le premier calife, Abu Bakr, ne l’a pas conquise ? Pourquoi Omar ne l’a pas prise en priorité, et l’a conquise beaucoup plus tard ? Et Pourquoi donc Saladin est-il entré en vainqueur à Jérusalem après avoir vaincu les Fatimides en Egypte et seulement après avoir répandu les pensées de l’école sunnite de l’Université al-Azhar du Caire ?

En d’autres termes, Jérusalem n’est pas une priorité. Elle se trouve toujours au bas de l’échelle : pour le Prophète et pour ses successeurs, seule La Mecque comptait.

Les craintes des Palestiniens et des Jordaniens concernant les intentions de l’Arabie saoudite à l’égard du Mont du Temple sont une autre cause de tensions. Lorsqu’une délégation d’urgence du Waqf de Jérusalem-Est s’est rendue dans le Golfe et a affirmé que la mosquée Al-Aqsa était en danger, les dirigeants du Golfe ont répondu : « Il n’existe aucun problème. Si la mosquée Al-Aqsa était détruite un jour, eh bien, nous en construirions une nouvelle, plus somptueuse ».

Cette réponse prouve que l’Arabie saoudite et les pays du Golfe perçoivent la mosquée Al-Aqsa dans un « contexte de compétition » comme une rivale de la ville sainte de La Mecque. L’Arabie saoudite ne fournit d’ailleurs aucune assistance à Jérusalem-Est et les Saoudiens ont empêché la Ligue arabe de transférer 500 millions de dollars à cette cause.

Bien que tous les mouvements islamiques soient divisés et diffèrent dans leur approche sur Jérusalem, ils ont plusieurs caractéristiques communes, et tous ont pour but de maintenir le caractère religieux islamique des sanctuaires musulmans installés sur le mont du Temple.

En plus des querelles internes au sein de la ville, il existe une autre compétition entre divers acteurs étrangers tels que la Jordanie, la Turquie, l’Arabie Saoudite et la Russie.

La Jordanie conserve un lien spécial à Jérusalem-Est où elle a régné pendant 19 ans, entre 1948 et 1967. Le premier roi Abdallah (grand-père du roi actuel) a été assassiné sur le mont du Temple en 1951 par un membre du clan Husseini. Et le roi Hussein a vendu des biens immobiliers à Londres afin de payer la restauration du Dôme du Rocher.

Israël a un grand intérêt à préserver le statu quo et la sauvegarde des accords de paix signés en 1994 avec la Jordanie. Par conséquent, l’administration Waqf, qui est liée au royaume hachémite, est la seule adresse reconnue par Israël dans la Vieille Ville.

Le Roi Hussein de Jordanie sur le Mont du Temple avant la guerre des Six Jours (photo Library of Congress)

Cependant, la Jordanie s’inquiète des interventions de la Turquie et de son soutien au mouvement islamique de Raed Salah. L’absence de l’Arabie saoudite offre à la Turquie une bonne occasion pour intervenir. Ankara finance une association importante appelée « l’Amour pour la protection des enfants en détresse », située à Ras al-Amoud. Sa page Facebook prouve que cette association s’occupe également d’affaires religieuses. On aperçoit aussi de nombreux stands et restaurants avec des drapeaux turcs flottant aux quatre vents, où la cuisine turque, comme le shawarma, est présentée avec fierté.

Le site Web Tika est directement identifié avec le président turc Erdoğan. Son but est de reconquérir tous les anciens territoires de l’Empire et de réhabiliter l’héritage ottoman.

La reconnaissance de la Palestine par l’UNESCO le 31 octobre 2011 a également créé un grave problème avec la Jordanie, qui était jusqu’alors la seule à représenter la question de Jérusalem au sein des instances internationales. Suite aux pressions exercées par le roi hachémite, l’Autorité palestinienne et la Jordanie ont signé un accord stipulant que c’est bien le Royaume hachémite qui est le représentant sur les questions relatives à Jérusalem à l’UNESCO tandis que l’Autorité palestinienne représente Bethléem.

Pourtant, les querelles se poursuivent. Après le gel de l’installation de caméras sur le mont du Temple en juillet 2017, une autre tension a émané à propos des liens existants sur la citoyenneté. La Jordanie révoque la nationalité de toute personne qui obtient la citoyenneté palestinienne ou israélienne. Cette pratique dissuade les Palestiniens de Jérusalem-Est de se joindre à l’Autorité palestinienne de Ramallah.

Il est aussi important de mentionner la part des chrétiens orthodoxes dans les querelles intestines palestiniennes. Le 22 janvier 2016, le parti Tahrir a publié un pamphlet contre les chrétiens orthodoxes de Jérusalem, qui ont acheté des biens du Waqf, tout en critiquant sévèrement la conduite de la Russie en faveur du régime d’Assad en Syrie et des chiites contre la Turquie et les sunnites.

Toutefois, il semble que les chrétiens orthodoxes soient eux-mêmes divisés. Alors que le clergé grec reste fidèle à la Grèce et la Russie, les prêtres nationalistes arabes souhaitent maintenir de bonnes relations avec les Frères musulmans.

Offensive idéologique des Turcs sur le mont du Temple en 2017 

Face à toutes ces luttes politiques et religieuses, les autorités israéliennes devraient manœuvrer avec beaucoup de tact et d’habileté diplomatique pour pouvoir préserver, tant bien que mal, le statu quo à Jérusalem-Est.

L’Autorité palestinienne basée à Ramallah connaît des tensions avec d’autres centres de pouvoir palestiniens à Jérusalem-Est, Jénine, Naplouse et Hébron, ainsi qu’avec d’autres pays arabes.

L’Autorité palestinienne a cessé de financer les hôpitaux de Jérusalem-Est, notamment Makassed et Augusta Victoria. L’Université Al-Quds à Jérusalem-Est a demandé à rejoindre le Conseil israélien de l’Enseignement supérieur, amenant l’Autorité palestinienne à expulser des conférenciers de Jérusalem-Est.

L’ancien président de l’Université, Sari Nusseibeh, connu pour sa position en faveur de l’intégration de Jérusalem-Est à Israël, a été nommé par Abou Dhabi à la tête d’un fonds économique pour Jérusalem-Est sans lien avec Ramallah.

La jeunesse de Jérusalem-Est est toujours reliée à Ramallah par les événements culturels arabes qu’elle propose et par ses bons menus de restaurants… mais les dirigeants à Ramallah considèrent que les « touristes » Arabes israéliens, et les habitants de Jérusalem-Est, en visite à Ramallah, ont pris la voie contraire à l’esprit de la « lutte armée » que l’Autorité palestinienne veut nourrir chez les jeunes Palestiniens. Du point de vue de l’Autorité palestinienne, il est essentiel que les jeunes préservent l’esprit de résistance pour les générations futures, sachant que la génération actuelle de dirigeants a échoué dans sa mission de libération.

L’Autorité palestinienne était particulièrement choquée et stupéfaite par le fait que le 14 mai 2018, jour du transfert de l’ambassade des États-Unis à Jérusalem, de nombreux jeunes Arabes ne se sont guère manifesté contre les points de contrôle de Tsahal, mais ont fêté dans l’allégresse et l’alcool un festival inaugurant la nouvelle ville de Rawabi, en Cisjordanie.

Faute de réaction de la jeunesse face à l’ouverture de l’ambassade américaine, l’Autorité palestinienne a limogé des hauts fonctionnaires et le problème de la ruée des jeunes vers la ville moderne de Rawabi a été transmis aux services de sécurité. En conséquence, les autorités de Ramallah ont diffusé un décret selon lequel tout Arabe israélien ou résident de Jérusalem-Est doit signaler à la police son souhait de louer un appartement à Ramallah ou en Cisjordanie en général. Autrement dit, pour la première fois, l’Autorité palestinienne a reconnu que les habitants de Jérusalem-Est faisaient partie de la communauté arabe israélienne et pourraient être potentiellement recrutés par les services du Renseignement israélien…

La jeunesse palestinienne rassemblée au concert à Rawabi (photo Palpresse)

Jérusalem-Est se désengage de Ramallah et de la Cisjordanie et se connecte de plus en plus avec Israël. Cependant, les provocations sur le mont du Temple sont difficiles à contrôler et peuvent changer complètement la situation. Le processus de connexion à Israël façonne la ville, mais pourrait porter atteinte à la sécurité sur le mont du Temple, et de là, affecter l’ensemble de la ville.

Ce processus de lien, probablement irréversible, entre Jérusalem-Est et Israël va dans le même sens que l’effondrement de l’Autorité palestinienne. Divisée, la ville d’Hébron entretient des liens étroits avec la Jordanie, des tensions existent également entre Jénine et Ramallah. Cette dernière, qui représente plus que partout ailleurs le « concept palestinien », surveille avec vigilance la ville de Naplouse.

A la longue, il ne serait pas étonnant que les habitants de Jérusalem-Est décident de participer aux prochaines élections municipales de Jérusalem, un acte pour lequel certains Palestiniens étaient tentés dans le passé, avant d’en être découragés par les menaces de l’Autorité palestinienne.

Les villes de la Cisjordanie s’éloignent donc de Jérusalem-Est. Il est difficile de trouver des publications sur Facebook de résidents de Cisjordanie s’identifiant à Jérusalem. Ce qui se passe quotidiennement dans la ville n’intéresse guère les habitants des autres villes de Cisjordanie.

Selon certaines sources à Naplouse, l’Autorité palestinienne avait tenté de recruter des personnalités publiques à Naplouse pour s’associer au conflit concernant Khan al-Ahmar, un camp de squatters situé sur la route de Jéricho, mais elles avaient refusé.

Les institutions publiques à Jérusalem-Est ont annoncé que l’Autorité palestinienne avait cessé de les financer. Cela inclut des hôpitaux tels que Makassed, qui accueille des patients de l’Autorité palestinienne  et de l’hôpital Augusta Victoria.

L’université Al-Qods a demandé à rejoindre le Conseil israélien de l’Enseignement supérieur. L’Autorité palestinienne a limogé certains conférenciers de Jérusalem-Est, pour les remplacer par des universitaires soutenant le Fatah.

L’ancien président de l’université, Sari Nusseibeh, est un conférencier reconnue pour son attachement à l’intégration de Jérusalem-Est à Israël. Depuis que le principal rival de Mahmoud Abbas au Fatah, Muhammad Dahlan, s’est installé confortablement dans les Emirats du Golfe, on suppose que Nusseibeh est l’un de ses partisans à Jérusalem-Est.

Sari Nusseibeh sur le mont du Temple (extrait de son livre Once Upon A Country)

Face à la capacité du Hamas de tirer parti des tensions à la frontière de Gaza, l’Autorité palestinienne met au premier plan la protection du mont du Temple, ainsi que d’autres problèmes liés à Jérusalem, tel que le possible démantèlement du camp bédouin Khan Ahmar sur la route Jérusalem-Jéricho.

À cet égard, l’Autorité palestinienne et la Jordanie ont des intérêts similaires. Toutes deux observent les activités juives sur le mont du Temple. La Jordanie et les Palestiniens semblent croire que les Juifs veulent installer une synagogue sur le Mont du Temple et prétendent que des organisations juives veulent rouvrir la Porte de la Miséricorde ( Shaar HaRachamim / Bab el-Rahma ).

La Jordanie cherche à empêcher l’ouverture d’une synagogue sur le mont du Temple car elle se considère comme la gardienne des Lieux saints. Un tel événement porterait un sévère camouflet à l’honneur de la famille royale hachémite et à sa légitimité à régner, dans un contexte fragile de discorde entre les différentes tribus bédouines du royaume.

Outre les préoccupations de Ramallah et d’Amman concernant les intentions juives à l’égard du mont du Temple, il existe une autre cause de tension, celle des intentions de l’Arabie saoudite à l’égard de l’esplanade sacrée.

Cette tension découle du plan de Trump concernant l’avenir de Jérusalem, et principalement de la crainte qu’il veuille rendre l’Arabie saoudite responsable des Lieux saints au sein d’un Conseil administratif panarabe. Ces préoccupations des Palestiniens et des Jordaniens, ainsi que les inquiétudes suscitées par les intentions des Juifs, ont créé de nouvelles tensions au sein du Waqf, chargé depuis 1967 de la gestion des Lieux saints.

Manifestation de musulmans priant devant la porte de la Miséricorde (photo Arab Press)

Ramallah et Amman craignent vivement qu’Israël « amène » l’Arabie saoudite sur le mont du Temple. Ils pensent que le plan de Trump établira un conseil intra-arabe dirigé par les Saoudiens. Cela changerait le statu quo actuel, avec de nouvelles dispositions transférant la responsabilité du mont du Temple de Jordanie à ce conseil dirigé par des Saoudiens.

Le roi Abdallah ne pourra pas accepter la perte du statut spécial de la Jordanie sur le mont du Temple. Cela éliminerait la légitimité même de son propre règne. Ainsi, il perçoit deux dangers pour le rôle des Hachémites sur le mont du Temple : la prétendue aspiration juive d’ouvrir une synagogue à côté des mosquées et la volonté d’Israël de faire venir l’Arabie saoudite sur le site.

L’Arabie saoudite a récemment franchi un pas important en ce qui concerne le problème palestinien qui, selon les observateurs à Jérusalem-Est, fait partie de l’accord Trump. Riyad a refusé de reconnaître les documents de voyage autres que des passeports valables. Cela signifie que les habitants de Jérusalem-Est doivent choisir entre un passeport palestinien ou israélien, et pour la plupart choisissent l’option israélienne. Les Saoudiens appellent la Jordanie à donner la citoyenneté à de nombreux Palestiniens qui ne sont pas encore considérés comme des nationaux.

L’apathie des Arabes concernant le sort de Jérusalem a conféré à la mosquée Al-Aqsa une nouvelle importance pour les Palestiniens. De lieu saint de tous les musulmans, elle est devenue un symbole national palestinien qui accentue leur isolement. Ils se considèrent comme des Murabitoun, gardiens de Jérusalem, défendant eux-mêmes Jérusalem jusqu’à ce que le monde arabe se réveille. Mahmoud Abbas a déclaré à l’hebdomadaire égyptien Al-Yom Al-Sabea : « Jérusalem est notre capitale éternelle. Les Jérusalemites sont des Murabitoun (défenseurs) de Jérusalem et ceux qui les ont négligés ne leur ont pas fait de mal  » Saeb Erekat a récemment déclaré que les Arabes ne pouvaient pas négliger la place des Isra et des Mi’raj (Un voyage nocturne de Mahomet à la mosquée Al-Aqsa, selon l’Islam).

Il explique pourquoi la nouvelle loi fondamentale d’Israël : Israël État-nation du peuple juif est diabolique, car elle annule la tradition arabe selon laquelle Mahomet est monté au ciel de Jérusalem. Tout comme la mosquée Al-Aqsa est la source légitime de la dynastie hachémite, elle est également devenue une source d’honneur pour les Palestiniens et un symbole de leur isolement.

Ces sentiments ont rapproché la Jordanie des Palestiniens, comme en témoigne le nouveau Waqf formé à son initiative.

Un député jordanien expulsé après une question sur la protection jordanienne sur al-Aqsa (Facebook)

En ce qui concerne le pouvoir bureaucratique de ce Conseil, la Jordanie a une position forte parce qu’elle paie des salaires. La présence de membres du Fatah n’a fait que renforcer le statut administratif de la Jordanie.

L’adhésion de membres du Fatah au Conseil suprême musulman ne peut être perçue comme une véritable unification des forces avec Ramallah, mais plutôt comme une tentative jordanienne d’établir un organisme qui le représentera et ira au-delà du cadre religieux étroit du Waqf. Ce serait plus une assemblée pour l’OLP et la Jordanie, exprimant la création d’une sorte de « municipalité » conjointe à Jérusalem-Est.

Rappelons que les Jordaniens attribuent leur autorité au Sharif (descendant du prophète Mahomet) Hussein bin Ali, roi de Hedjaz (1854-1931), celui qui était le « gardien des Lieux saints ». Le roi hachémite/Sharif fut conduit hors d’Arabie par les Saoudiens en 1924. Aujourd’hui, les Jordaniens ne disent pas que leur droit à la tutelle d’Al-Aqsa découle de son statut de Sharif de La Mecque et de Médine, mais ils utilisent cette formulation pour décrire leur rôle dans la surveillance d’Al-Aqsa.

Alors que l’expression « gardien des deux Lieux saints » (La Mecque et Médine) est réservée à la Maison des Saoud, les Hachémites utilisent le terme « gardien des Lieux saints à Jérusalem ».

Puisque les Hachémites refusent catégoriquement d’abandonner leur héritage historique à La Mecque, l’utilisation des termes Sharif et « gardien des Lieux saints » inquiète les Saoudiens. L’utilisation de ces termes à Jérusalem préserve le droit des Hachémites de retourner à La Mecque et à Médine, et leur droit l’emporte sur celui de la Maison de Saoud, car ils sont les descendants du prophète Mahomet.

La Jordanie fait le raisonnement suivant : lorsque l’Arabie saoudite était l’ennemi d’Israël, Israël a accepté de lui accorder une préférence sur le mont du Temple. À l’heure actuelle, au moment où Israël et l’Arabie saoudite se rapprochent, Israël peut changer de position et donner préférence à l’Arabie saoudite pour pouvoir gérer le statut du mont du Temple.

Pourquoi cette logique ? L’Arabie saoudite peut ignorer les besoins des Palestiniens, contrairement à la Jordanie, dont la moitié des habitants sont des Palestiniens. Le royaume hachémite a besoin de la coopération des Palestiniens pour maintenir sa position sur le mont du Temple. Ce n’est pas obligatoirement ainsi que cela se déroulera, mais c’est probablement ce que le roi hachémite soupçonne.

Pinhas Inbari

 


Pour citer cet article

Pinhas Inbari, « Les Musulmans se disputent l’hégémonie sur Jérusalem-Est », Le CAPE de Jérusalem, publié le 30 juin 2019: http://jcpa-lecape.org/les-musulmans-se-disputent-lhegemonie-sur-jerusalem-est/

NB : Sauf mention, toutes nos illustrations sont libres de droit.

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