Les défaillances de Tsahal sont plus graves que celles de la guerre de Kippour
L’enquête publiée par Tsahal sur le massacre du 7 octobre 2023 prouve clairement que l’état-major de l’armée israélienne n’a pas vraiment tiré des leçons sur les graves erreurs commises avant le déclenchement de la terrible guerre du Yom Kippour d’octobre 1973. Durant plus de cinq décennies, Tsahal n’a pas modifié profondément sa vision sur le monde arabo-musulman et sur les réelles intentions des mouvements terroristes islamistes. La confiance aveugle des généraux, la mauvaise interprétation des services du renseignement sur les nombreux signes d’attaque, le mépris constant de l’adversaire depuis sa forte humiliation lors de la guerre des Six Jours, ainsi que l’indifférence du gouvernement face aux menaces éventuelles, sont toujours les mêmes indices et symptômes qui brisent à chaque fois la crédibilité de Tsahal. Hier comme aujourd’hui, ils plongent le pays dans l’incertitude et l’angoisse avec une amère frustration.
Durant la guerre de Kippour d’octobre 1973, nous avons vu la mort en face, la destruction totale de notre cher foyer national. Rappelons que les Arabes attaquèrent avec plus de 5500 chars. Sur le front de Suez, les Egyptiens alignèrent deux fois plus de chars que Montgomery et Rommel dans le désert de Libye durant la bataille d’El Alamein ; tandis que les Syriens attaquèrent avec une force égale à celle que l’Allemagne lança à l’époque contre la France.
Le général légendaire Moshé Dayan évoqua même, dans une allusion biblique, la fin du troisième Temple. En dépit de certaines informations alarmantes du Mossad et d’un sérieux avertissement du roi Hussein de Jordanie sur un éventuel conflit armé, les Arabes ont surpris l’Etat juif pour la première fois.

Le chef d’état-major, Herzi Halevi avec les officiers du commandement Nord.
Cette guerre du Yom Kippour a secoué la société israélienne sur tous les plans. Ce fut un « tremblement de terre » dans la vie politique et militaire que personne n’a osé imaginer. Cependant, la victoire militaire fut totale. Elle a été acquise grâce à une foi inébranlable, un courage et une solidarité exemplaires. Les combats acharnés menés avec brio par le général David Elazar ont stupéfait tous les états-majors étrangers. Après 18 jours de combat, les chars de Tsahal étaient arrivés à 101 km du Caire et à 40 km de Damas.
La maudite guerre contre le Hamas est bien différente, l’attaque a été planifiée minutieusement durant plusieurs années sans vraiment alerter sérieusement nos services du renseignement car depuis le retrait de Tsahal de la bande de Gaza en 2005, les généraux comme les chefs du gouvernement avaient négligé les intentions de ce mouvement religieux fanatique, filière de la confrérie des Frères musulmans, capable des pires cruautés et crimes de guerre. Pour la première fois depuis la guerre d’Indépendance, une organisation terroriste a conquis un territoire souverain de l’Etat d’Israël. Plus de cinq mille terroristes du Hamas ont envahi une vingtaine de localités du sud du pays. Ils ont assassiné 1200 personnes dont des vieillards, femmes et enfants, et pris en otage 251 soldats et civils sans que Tsahal puisse intervenir à temps et sauver des vies humaines. L’armée de défense de l’Etat d’Israël a perdu durant plusieurs heures sa première vocation, celle de défendre ses citoyens.

Le général Herzi Halevi dans le QG du commandement Sud.
Un échec colossal pour l’armée considérée comme la plus puissante du Moyen-Orient. Tsahal et le Shin Beit n’ont pas pris des actions préventives. Durant deux décennies, les gouvernements successifs ont cru que le Hamas était dissuadé, qu’il ne représentait pas une menace réelle et que l’Iran devenait l’ennemi numéro un. La conception défensive de Tsahal a échoué dans la bande de Gaza comme sur le canal de Suez en 1973.
Les défaillances sont plus accablantes que celles de la guerre de Kippour, mais aujourd’hui après la publication du rapport militaire, nous devrions procéder à des enquêtes approfondies du Shin Beit et de la police ainsi que du leadership politique. Le rapport de la commission Agranat publié après la guerre de Kippour avait épargné les graves défaillances du gouvernement Golda Meir et surtout celles du ministre de la Défense, Moshé Dayan. Ne répétons pas cette faute lourde de conséquences.

Le chef d’état-major Halevi analyse les opérations devant le PM Nétanyahou et le ministre de la Défense Katz.
Hier comme aujourd’hui, il est regrettable que la presse a couvert les activités de Tsahal sans aucune critique, sans émettre un doute. La majorité des correspondants militaires n’ont pas eu le courage d’alerter sur les défaillances et s’est contentée de réciter comme des perroquets les communiqués de l’armée sans vérifier la réalité sur le terrain. L’ignorance de la civilisation, de la mentalité et de la langue arabe par les leaders du pays devra aussi être remédiée.
Malgré le triste constat, nous sommes fiers que Tsahal est la seule armée au monde qui enquête sérieusement ses défaillances et que ses généraux avouent leurs échecs publiquement. Dès le départ, le chef d’état-major Herzi Halevi a pris ses responsabilités. Il a prouvé ses nobles capacités et un courage exemplaire en dépit du tohu-bohu du premier jour de l’attaque. Ces jours-ci, il achève sa riche carrière militaire dans la dignité, en véritable officier gentleman.
Enfin, malgré les graves lacunes et le lourd tribut que nous payons depuis le 7 octobre 2023, Tsahal a réussi à surmonter les difficultés et promet à ne plus commettre les mêmes erreurs. Son devoir est de poursuivre la guerre et chasser le Hamas de la bande de Gaza et surtout gommer la défiance du peuple israélien à l’égard de son armée.
Soulignons que le combat contre le terrorisme palestinien a débuté depuis plus d’un siècle. Notre indépendance nationale, notre sécurité absolue, et nos libertés ne sont toujours pas acquises. La lutte est pénible et de longue haleine mais ne perdons jamais l’espoir pour des jours meilleurs, méditons quotidiennement notre hymne national, Hatikva.