L’enjeu des tunnels pour le Hamas
Le chef du gouvernement Hamas, Ismail Haniyeh, a souligné l’importance stratégique des tunnels dans son discours prononcé le 23 mars 2014. Selon lui, les tunnels « ont réussi à modifier l’équilibre des forces avec les sionistes et ont renforcé considérablement les capacités militaires » du Hamas.
La bataille contre les tunnels du Hamas fait rage. Tsahal a déjoué plusieurs tentatives d’infiltration dans les villages israéliens de Soufa et de Nirim. Deux groupes de combattants du Hamas, déguisés d’ailleurs avec des uniformes de Tsahal, ont tenté le 19 juillet dernier de pénétrer par la voie des tunnels dans les kibboutzim d’Erez et de Nir Am. Ils ont été repérés à temps, puis éliminés.
Depuis le déclenchement de l’opération « Bordure protectrice » des dizaines de tunnels d’attaque ont été découverts et détruits dans la bande de Gaza, le long de la frontière avec Israël. Plusieurs tunnels d’une longueur de plus de deux kilomètres ont été découverts en territoire israélien.
Le Hamas a gagné en grande expérience dans l’utilisation des tunnels à des fins opérationnelles. Depuis 2000, des centaines de tunnels ont été creusés le long de la frontière avec l’Egypte, fournissant ainsi une issue pour l’économie locale et pour renforcer le potentiel militaire du Hamas. Les tunnels ont servi comme moyen de transport principal pour les importations palestiniennes en provenance d’Egypte, qui sont estimées chaque année à plusieurs millions de dollars. Dans le cadre de la contrebande, le Hamas a acheminé de grandes quantités de matériel militaire et notamment des roquettes, missiles et munitions, mais aussi des matériaux nécessaires à la construction de nouveaux tunnels.
Au cours de la deuxième Intifada qui a débuté en septembre 2000, le Hamas a fait usage des tunnels le long du couloir de Philadelphie. Ces tunnels ont permis au Hamas de poser de puissantes charges explosives à proximité des positions de Tsahal. Le 25 juin 2006, une unité du Hamas affilié à al-Qaïda a attaqué des soldats israéliens installés à Kerem Shalom. C’est pendant cette attaque que le soldat franco-israélien Guilad Shalit a été enlevé, tandis qu’un officier et un soldat trouvaient la mort.
Le Hamas utilise les mêmes moyens que le Hezbollah au Liban et obtient une aide considérable de la part d’instructeurs iraniens. Au cours de la Seconde guerre du Liban, le Hezbollah avait considérablement élargi ses fortifications souterraines dans le sud du Liban. Les Gardiens de la Révolution islamique et des ingénieurs – certains venus également de Corée du Nord – ont enseigné au Hezbollah comment intégrer les tunnels dans sa doctrine militaire.
Il est difficile de repérer les rampes de roquettes et les missiles dissimulés dans des trappes et des tunnels même pour un Etat ayant une maîtrise totale de l’air. Soulignons qu’un tunnel est ouvert brièvement pour pouvoir lancer des roquettes à la sauvette, puis il est immédiatement refermé. La détection est encore plus difficile car les rampes sont dissimulées au sein de la population civile.
Durant la présidence de Morsi en Egypte et la montée en puissance des Frères musulmans durant les années 2012-2013, le Hamas, branche palestinienne de la confrérie, avait obtenu par la voie des tunnels des quantités considérable de missiles et de munitions ainsi que des matériaux nécessaires pour fabriquer sur place des roquettes.
Soulignons aussi que la moitié du budget de l’Autorité palestinienne, a été obtenu par des donateurs internationaux et notamment des pays européens, du Qatar et des Émirats du Golfe, et une grande partie a été destiné au Hamas.
Le Hamas profite également de l’aide de nombreuses organisations des droits de l’Homme, notamment israéliennes. Ces mouvement exercent de fortes pressions sur Israël pour permettre l’acheminement aux autorités du Hamas des produits de construction, dont du ciment et du fer. En réalité, ces matériaux ont servi principalement pour la construction de réseaux d’attaque par la voie des tunnels, et non pas pour le bâtiment civil.
Malgré l’accord de réconciliation avec le Fatah et la mise en place d’un gouvernement d’union nationale, l’un des objectifs du Hamas dans cette nouvelle guerre avec Israël consiste à provoquer une troisième Intifada en Cisjordanie. L’objectif est la chute du régime de l’Autorité palestinienne et la prise du pouvoir à Ramallah.
Dans ce contexte, l’Etat juif devrait renforcer son contrôle sécuritaire en Cisjordanie et maintenir des frontières défendables devant la possibilité de la création un jour d’un Etat palestinien.
Jonathan D. Halevi