Le Hamas dans le collimateur du président égyptien
Le Procureur général de la République égyptienne vient de déposer plainte contre la branche militaire du Hamas, Ezzedine Al Qassam, avec l’intention de déclarer le Hamas comme organisation terroriste et lui interdire toute activité sur le sol égyptien.
Selon le Hamas, il s’agit bien d’une directive signée par le président Sissi lui-même.
La décision du procureur égyptien à l’encontre du Hamas vient juste après une attaque terroriste dans le nord du Sinaï dans laquelle 33 soldats égyptiens ont été tués. Bien que le groupe Ansar Beit al Maqdes, affilié récemment à Daesh, avait revendiqué sa responsabilité dans l’attentat, les services de renseignements égyptiens sont convaincus que le Hamas est bien impliqué dans l’affaire, étant notamment responsable d’avoir permis l’acheminement d’explosifs et de combattants à travers les tunnels construits dans la bande de Gaza.
Les services égyptiens accusent le chef du Hamas, Khaled Meshaal, d’orchestrer des opérations dans le Sinaï avec le soutien logistique des services de renseignement turcs et le financement du Qatar. Le coût de l’opération est estimé à plus de 6 millions de dollars.
Le Hamas lui, nie toujours toute attaque contre l’armée égyptienne. Dans un communiqué publié le 25 Octobre 2014, le mouvement palestinien affirme qu’il est étranger aux affaires égyptiennes dans le Sinaï et précise que la frontière entre Gaza et l’Egypte est sécurisée et surveillée par un contrôle très sévère.
Ce n’est pas la première fois que l’Egypte accuse le Hamas de lancer des attaques terroristes contre son armée :
– Le 5 août 2012, à l’époque où Mohammed Morsi est encore président de l’Egypte et représente la confrérie des Frères musulmans, 16 soldats égyptiens sont tués à Rafah dans une embuscade terroriste perpétrée par des extrémistes djihadistes. Ils avaient attaqué un poste frontalier à la fin du repas du Ramadan.
48 heures après cette attaque, le Conseil militaire des Forces armées égyptiennes publie un communiqué accusant le Hamas d’être impliqué dans l’attentat et d’avoir aidé et encouragé des djihadistes à l’intérieur de la bande de Gaza.
L’armée égyptienne exige également du Hamas d’extrader trois membres des Brigades Ezzedine Al Qassam entrés clandestinement dans le Sinaï pour fournir des armes et une aide logistique aux djihadistes.
-Le 24 décembre 2013, un attentat terroriste est perpétré à Mansoura, dans le delta du Nil, tuant 16 personnes et en blessant 130. Le groupe Ansar al Beit Maqdes, précédemment associé à Al-Qaïda, revendique sa responsabilité dans cet attentat. Le ministre égyptien de l’Intérieur Mahmud Ibrahim accuse pourtant le Hamas. Dans une conférence de presse tenue au Caire, il affirme qu’un certain Amar Massoud, membre actif de la confrérie des Frères musulmans, a avoué avoir commis plusieurs attentats à Mansoura. Il dévoile même ses liens avec les chefs du Hamas, notamment concernant sa formation militaire à Gaza. Pour sa part, le Hamas nie tout lien avec ces attaques et qualifie les accusations du ministre de l’Intérieur égyptien de « fausses et sans fondement».
Le Hamas affirme que la campagne égyptienne contre ses membres fait partie de la déclaration de guerre du président Fatah al-Sissi contre le mouvement des Frères musulmans récemment proclamé organisation terroriste.
Selon le site officiel du Hamas, l’ultime objectif du président égyptien est « d’éradiquer la résistance armée dans la bande de Gaza ». Cette politique selon le Hamas, sert les intérêts d’Israël et fait partie d’une stratégie égypto-arabe pour former un front commun contre l’axe irano-syro-yéménite.
Sans aucun doute, le régime du Maréchal Fatah al-Sissi considère le Hamas comme un mouvement subversif agissant contre la sécurité nationale du pays, en conformité avec la confrérie des Frères musulmans, récemment interdite en Egypte. Après la dernière attaque contre des soldats égyptiens dans le nord du Sinaï le président égyptien a pris une série de mesures contre le Hamas et notamment :
- La suspension des négociations entre les équipes israéliennes et palestiniennes au Caire pour la mise en œuvre de la trêve signée après la dernière opération Bordure protectrice ;
- La fermeture du poste frontalier de Rafah entre la bande de Gaza et la péninsule du Sinaï ;
- La création d’une large zone tampon le long de la frontière égyptienne avec la bande de Gaza. Plus d’un millier de maisons palestiniennes ont déjà été démolies.
- L’accélération de la destruction des tunnels du côté égyptien.
Le Hamas soupçonne que ces mesures sont coordonnées avec Israël et que leur but est de resserrer le blocus de Gaza, de détruire les tunnels, et tout trafic de contrebande, et de provoquer ainsi un fait accompli de la démilitarisation de la bande de Gaza.
Yoni Ben Menahem