Le « droit de retour » pour les Palestiniens existe-il dans le Droit international ?

Alan Baker

La question des réfugiés palestiniens est considérée comme le principal obstacle pour aboutir à une solution du conflit entre Israël et les Palestiniens. L’origine du problème remonte aux années 1946-48 lorsque des résidents arabes locaux ont été déplacés ou ont choisi de renoncer à leurs foyers au cours de la guerre déclenchée par les Etats arabes juste après la fin du Mandat britannique.

Dans le but de soutenir ces réfugiés, l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens au Proche-Orient (UNRWA) a été créé en 1949 avec un budget de 50 millions de dollars. 

À ce jour, l’UNRWA soutient plus de cinq millions de réfugiés palestiniens enregistrés. Cependant, l’UNRWA inclut les descendants des réfugiés, bien qu’ils ne sont pas inclus dans la Convention de 1951 sur les réfugiés en général.

Plusieurs documents juridiques et politiques internationaux tentent d’aborder la question du retour des réfugiés, mais ils n’établissent aucun droit au retour pour les réfugiés palestiniens. 

La résolution 194 de l’Assemblée générale des Nations-Unies stipule que « les réfugiés souhaitant rentrer chez eux et vivre en paix avec leurs voisins devraient être autorisés à le faire », mais aucune résolution de l’Assemblée générale n’a la capacité de déterminer des lois ou d’établir des droits. Le terme « devrait » souligne qu’il s’agit uniquement d’une recommandation.

De plus, un « droit au retour » n’apparaît pas dans les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) ou dans la documentation du processus de paix israélo-palestinien.

L’Assemblée générale des Nations-Unies.

L’Assemblée générale des Nations-Unies. (UN Photo)

Le 9 Novembre, 2021, le Comité spécial politique de l’Assemblée générale de Nations Unies a adopté lors de sa 76 e session un projet de résolution intitulé « Aide aux réfugiés de Palestine. » 

Cette résolution appelle notamment à une assistance continue aux réfugiés palestiniens et à un soutien à l’UNRWA.

La résolution a été adoptée par 160 membres et 9 abstentions (Cameroun, Canada, Îles Marshall, États fédérés de Micronésie, Nauru, Palau, Papouasie-Nouvelle-Guinée, États-Unis et Uruguay). Israël était seul contre.

Les États-Unis ont changé leur opposition traditionnelle au projet de résolution et se sont abstenus. En réalité, toutes les administrations précédentes, à l’exception de l’administration Obama, ont voté contre cette résolution.

En fait, le changement de vote américain ne signifie rien sur le fond et donc l’abstention des États-Unis n’implique aucun soutien pour un droit au retour.

Plusieurs documents juridiques et politiques internationaux telle que la Résolution 194 (III) de l’Assemblée générale des Nations Unies adoptée le 11 décembre 1948, tentent d’aborder la situation difficile du retour des réfugiés. Mais ils ne semblent établir aucun droit au retour pour les réfugiés palestiniens.

Cependant, un « droit au retour » n’apparaît pas dans les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, seul organisme habilité à adopter des résolutions obligatoires. La question des personnes déplacées palestiniennes a été abordée par le Conseil de sécurité de l’ONU à la suite de la « guerre des six jours » de 1967 dans la résolution 237 (4 juin 1967). La résolution a appelé le gouvernement d’Israël à « faciliter le retour des habitants (…) qui ont fui les zones depuis le début des hostilités. » La résolution, adoptée en vertu du chapitre VI de la Charte des Nations Unies, traitant du règlement pacifique des différends, n’était pas une résolution obligatoire et ne faisait aucune référence à un « droit » des réfugiés au retour. 

Par ailleurs, dans sa fameuse résolution 242 (22 novembre 1967), qui sert de base au processus de paix au Moyen-Orient, le Conseil de sécurité se borne à « affirmer davantage la nécessité de parvenir à un règlement juste du problème des réfugiés. »  Si un droit au retour avait été préalablement établi par la Résolution 194 (III) de 1948, alors il aurait sûrement figuré ici comme la base du règlement du problème des réfugiés.

Enfin, la question des réfugiés palestiniens est abordée par des accords bilatéraux contraignants prioritaires entre Israël et ses voisins.

Le président égyptien Anwar Sadate, le président américain Jimmy Carter et le Premier ministre israélien Menahem Begin lors des négociations de paix à Camp David, 1978

Le président égyptien Anwar Sadate, le président américain Jimmy Carter et le Premier ministre israélien Menahem Begin lors des négociations de paix à Camp David, 1978 (Archives américaines, Wikipédia)

L’article A (3), alinéa 5 du « Cadre pour la paix au Moyen-Orient entre Israël et l’Égypte » de 1978, négocié à Camp David, a établi un « comité permanent pour décider d’un commun accord sur les modalités d’admission des personnes déplacées de Cisjordanie et de la bande de Gaza en 1967. » Au paragraphe 6 de cet accord, l’Égypte et Israël ont convenu de « travailler ensemble et avec d’autres parties intéressées pour établir des procédures convenues pour une mise en œuvre rapide, juste et permanente de la résolution du problème des réfugiés. »

La « Déclaration de principes sur les arrangements intérimaires d’autonomie » israélo-palestinienne de 1993 (Oslo 1), et l’Accord intérimaire israélo-palestinien de 1995 sur la Cisjordanie et la bande de Gaza » (Oslo 2), font aussi référence aux réfugiés comme une question à négocier dans le cadre des négociations sur le statut permanent. 

À l’article 8 du traité de paix entre Israël et la Jordanie (1994), les parties ont convenu de chercher à établir un comité quadripartite avec l’Égypte et les Palestiniens pour s’occuper des personnes déplacées, ainsi qu’un groupe de travail multilatéral pour s’occuper des réfugiés. 

La « feuille de route » du Quartet formé en 2003 faisait référence à la convocation d’une conférence internationale pour traiter, « entre autres des réfugiés ».  Il prévoyait dans le cadre d’un accord final et global sur le statut permanent mettant fin au conflit israélo-palestinien :« une solution convenue, juste, juste et réaliste à la question des réfugiés. »  

En conclusion, un « droit au retour » aux Palestiniens n’apparaît pas dans les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU, ni dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) ou dans aucune documentation sur le processus de paix israélo-palestinien.

Voir l’intégralité de l’article et ses références sur le site du Jerusalem Center-CAPE

https://jcpa.org/article/does-a-palestinian-right-of-return-exist-in-international-law/