La voix d’Israël à Paris
Une fois encore, une nomination d’un ambassadeur à Paris est prise à la légère. Cette décision irréfléchie avait essentiellement pour but d’offrir un poste vacant à une fidèle amie. Depuis toujours et en raison des caprices d’une coalition et pour des motifs de politique intérieure, le chef de la diplomatie israélienne a le droit de nommer 11 ambassadeurs et consuls.
Dans le cas précis de la France, aucun rapport si la personnalité en question n’est pas francophone, ne parle pas couramment le français et ses convictions idéologiques sont opposées à celle du gouvernement en place. Ces dernières années, plus que jamais, les intérêts politiques et personnels prévalent sur l’avenir des relations bilatérales. Malheureusement, cela concerne actuellement plusieurs capitales importantes de la planète.
Madame Yaël German, 73 ans, a occupé dans sa riche carrière politique des postes importants. Elle a été maire de la ville d’Herzliya, députée et même ministre de la santé, mais est-elle vraiment le bon choix ?
Voilà déjà deux ans que le gouvernement n’a pas nommé un ambassadeur en France et puis nous nous étonnons pourquoi notre Hasbara (Information) est en faillite, que nous avons une mauvaise image en Europe et que les messages ne passent plus. Il existe bien entendu plusieurs raisons à ce triste phénomène, mais la plus importante est celle de l’incompétence des représentants choisis, leur connaissance médiocre de la langue de Molière et leur hésitation, voire leur peur, d’intervenir sur un plateau de télévision ou devant un micro de radio. N’ont-ils rien à dire ? A expliquer ? A défendre ? Suffit-il de le dire timidement en anglais, au Quai d’Orsay ou à l’Elysée ?
Pour justifier la nomination de Yaël German, Lapid nous dit que la langue française n’est pas un obstacle. Pire encore, certains diplomates actuels à l’ambassade ne parlent pas couramment le français.
La langue d’un grand pays est-elle si négligeable pour le représentant du peuple du Livre ? Les mots justes et précis n’ont-ils plus de poids dans les conversations diplomatiques ? Comment négliger une langue, une riche Histoire, toute une civilisation, et en même temps revendiquer la pleine participation à la Francophonie ? Comment améliorer les relations culturelles et artistiques ? Réunir des journalistes pour un briefing ou organiser un diner à la résidence, en parlant hébreu ou anglais ?
Durant de nombreuses années et à chaque conflit militaire, la majorité des intervenants dans les médias français n’étaient que des anciens diplomates ou journalistes…le mutisme plané au 3 rue Rabelais, siège de l’ambassade à Paris. Seule dans la dernière opération Gardiens des Murs à Gaza, le chargé d’affaires, a eu le courage d’intervenir.
Soulignons qu’un ambassadeur israélien représente également la communauté juive. Les Juifs français vivent dans une certaine détresse face à la montée en puissance de l’islamisme et l’antisémitisme. Les dirigeants de la communauté sont perplexes pour la marche à suivre. Ils ont besoin d’être réconfortés, recevoir des conseils, des directives, et seront fiers d’entendre un ambassadeur parler couramment le français et répondre aux détracteurs d’Israël avec des arguments irréfutables.
Comment Madame German, longtemps membre active du parti d’extrême gauche Meretz, de la Paix maintenant, pourrait-elle justifier la politique intransigeante de Bennet sur le dossier palestinien ? Sur le dossier iranien ?
Bien entendu, la France officielle l’accueillera avec tous les égards et applaudira avec une certaine presse ses opinions pacifistes. Toutefois comment pourrait-elle encourager la majorité de la communauté juive pour dénoncer le BDS et la vague antisioniste, antisémite dans les médias et les réseaux sociaux ?
Souvenons-nous de Walter Eytan, Asher Ben Nathan, Meir Rosenne ou Avi Pazner, tous étaient des diplomates chevronnés et très populaires au sein de la communauté et dans la presse.
Nous pouvons comprendre qu’il serait difficile de trouver un diplomate israélien parlant parfaitement le chinois mais le français, manque-t-il des francophones au ministère ? Il est impensable que Lapid décide un jour de nommer un ambassadeur à Washington ne connaissant pas l’anglais ou l’Histoire américaine. Pourquoi cause- t-il ce préjudice injustifié à la France ? Lapid n’est sans doute pas un francophile comme l’était Shimon Pérès mais pourquoi humilier un pays ami ? Ne s’agit-il pas d’un véritable camouflet au gouvernement français ? A la francophonie ? A la riche culture et civilisation françaises ? N’est-elle pas une gifle à la communauté juive, la plus forte et la plus influente en Europe ? Pourtant, Lapid, Gantz, Rivlin et Herzog ont été averti à temps et de sérieux candidats ont été proposés.
Nous constatons avec tristesse que le chef de la diplomatie israélienne n’est pas vraiment préoccupé par l’avenir des relations franco-israéliennes et ses pensées son vraiment ailleurs.
Une amitié personnelle avec le président Macron, à la veille d’une campagne électorale présidentielle en France, est-elle justifiable pour nommer un compagnon de route dont la voix en français est cassée ?