La détresse de l’Iran et la faiblesse de l’Occident
Les Ayatollahs iraniens violent clairement et systématiquement l’accord nucléaire signé à Vienne le 14 juillet 2015 (JCPOA). Ils viennent d’annoncer pouvoir enrichir de l’uranium à un niveau de 20% pour montrer que la politique de « pression maximale » du président sortant Donald Trump avait bien échoué.
En fait, la situation est totalement différente de l’image que l’Iran tente de formuler. Les Occidentaux répondent timidement mais il existe des leviers et outils pour punir le régime des l’Ayatollahs, et donc il est bien temps d’envisager de les utiliser.
L’enrichissement de l’uranium à un niveau de 20% est sans doute une nouvelle violation flagrante des engagements iraniens. Dans la même veine, l’Iran souligne que son action est réversible et qu’il est prêt à revenir à ses obligations si les États-Unis revenaient à l’accord et levaient les sanctions.
La décision iranienne vise à atteindre plusieurs objectifs. Le premier, raccourcir la période nécessaire pour atteindre des quantités adéquates d’uranium enrichi à un niveau supérieur à 90% pour la production d’un dispositif explosif nucléaire. L’Iran possède actuellement 4,5% de matières fissiles qui, si elles seront plus encore enrichies, sont suffisantes pour pouvoir fabriquer deux bombes atomiques.
Le laps de temps nécessaire est d’environ deux mois pour que l’Iran obtienne une quantité requise d’uranium. Mais si l’enrichissement à 20% est effectué uniquement par les 1000 centrifugeuses opérant dans les installations souterraines de Fordo, comme les Iraniens l’ont fait jusqu’à présent, cela prendra plus de temps. Soulignons que les Iraniens ont récemment installé des centrifugeuses perfectionnées également à Natanz.
La politique de « pression maximale » sur l’Iran adoptée par l’administration Trump a en réalité empêché l’Iran d’avancer dans son projet de fabriquer une bombe atomique.
L’enrichissement de l’uranium à un niveau de 20% est un pas sans risque immédiat qui ne provoquera pas une forte réaction de la part des États-Unis. Cette décision fait suite aux menaces implicites de Téhéran de réagir violement contre les Américains à l’occasion du premier anniversaire de l’assassinat de Qasem Soleimani. Pour l’heure, aucune action n’a été entreprise contre les Américains après l’élimination de Soleimani ni non plus après celle la mort du scientifique iranien Mohsen Fakhrizadeh.
La dernière mesure iranienne d’enrichir de l’uranium à 20 % vise à détourner l’attention de l’opinion internationale et reflète en réalité un grand désarroi devant une confrontation généralisée avec les États-Unis, à la lumière des avertissements américains.
L’objectif principal des Iraniens est de faire comprendre au nouveau président Biden que la meilleure option serait pour lui de revenir rapidement à l’accord nucléaire original. Bien entendu, sans modifier les caractéristiques et la portée de l’accord ou même de discuter sur d’éventuels changements.
La réponse internationale initiale à cette décision a été bien timide. Leur attention a été focalisée sur l’interception d’un pétrolier sud-coréen, une tactique iranienne contre Séoul, en prévision de la libération de fonds iraniens gelés.
Par sa timide réaction, il est clair que l’Occident ne souhaite pas de confrontation et reviendra à l’accord nucléaire selon les diktats iraniens. Jake Sullivan, nouveau conseiller à la Sécurité nationale dans l’administration Biden, en a clairement exprimé cette position de ce qu’il décrit comme l’échec de la pression américaine. Sullivan réitère la nécessité de revenir au JCPOA avant même le début des négociations sur un accord plus large. D’autre part, l’administration Trump a déterminé qu’il s’agissait de la part de l’Iran une « tentative de chantage qui visiblement échouera ».
À la lumière des pressions économiques paralysantes et la pandémie du COVID 19, la situation iranienne est totalement différente de l’image que ses dirigeants tentent de créer. Les nouvelles mesures iraniennes reflètent une forte détresse.
Les « accords d’Abraham » et la réconciliation entre le Qatar et l’Arabie saoudite inquiètent également Téhéran. L’accélération de l’enrichissement d’une matière fissile est certes inquiétante, mais elle nécessite de franchir un seuil dangereux où une action militaire contre l’Iran peut se produire tout en poursuivant les sanctions économiques qui pourraient mettre en péril la stabilité du régime.
Pour l’heure, les Ayatollahs préfèreront la voie d’un accord nucléaire qui leur offrira non seulement une bombe atomique mais un vaste arsenal d’armes nucléaires dans une prochaine décennie, tout en évitant de souffrir militairement ou économiquement. La volonté déclarée de l’Iran de revenir à l’accord témoigne de ses préférences.
La réponse appropriée à la décision iranienne est d’indiquer clairement que toute tentative visant à acquérir suffisamment d’uranium enrichi pour la production d’armes nucléaires devrait être répliquée par une réponse limpide : « toutes les options sont sur la table ». Dans le même temps, la pression économique doit être maintenue afin de contraindre l’Iran à accepter un nouvel accord qui empêcherait minutieusement toute possibilité de stockage d’armes nucléaires, qui permettrait un contrôle complet partout et une inspection à tout moment, la levée des restrictions à long terme, le démantèlement du site d’enrichissement de Fordo et l’inclusion de missiles balistiques dans l’accord.
L’application de tous ces gages et clauses par l’administration Biden est peu probable, mais si l’Iran se moque éperdument des accords signés et poursuit sa voie vers le nucléaire, le nouveau président aura de bonnes chances de forcer l’Iran à accepter un nouvel accord selon les conditions américaines. Cette ferme position de la part du nouveau président aura sans doute un écho favorable de la part de l’Union européenne, du monde arabe et de la part d’Israël.
Enfin, si l’Iran ose prendre des mesures contre les intérêts américains, on ne peut exclure une escalade en ces derniers jours de l’administration Trump.