Israël est-il à la veille d’une guerre contre le Hezbollah et la Syrie ?
Depuis février 2010, la tension monte au nord d’Israël. Cela a débuté par une guerre verbale entre responsables syriens et israéliens et a été suivie par des menaces réciproques sur un changement de régime et des attaques contre les populations civiles. Quelques semaines plus tard, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a promis d’aller jusqu’au bout dans sa prochaine guerre contre Israël. Puis, Tsahal a entrepris des manœuvres militaires dans le nord du pays. Enfin, le 26 février dernier, le Président syrien Bechar el Assad a accueilli en grande pompe à Damas, le Président iranien Mahmoud Ahmadinejad et le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah. Il leur a offert un dîner de travail sans précédent.
Les préoccupations concernant la reprise des hostilités avec le Hezbollah ne sont pas nouvelles et elles sont basées sur des récentes déclarations en provenance de Damas. Dans le cas d’une détérioration de la situation, le conflit armé pourrait prendre une dimension régionale qui rappellera celle de la guerre de Kippour déclenchée par les Syriens et les Egyptiens en 1973.
Les responsables syriens ont souligné récemment, que contrairement à la deuxième guerre du Liban de l’été 2006, cette fois-ci, Damas ne « restera pas les bras croisés ». Bien que ces menaces soient déclarées par bravade, il n’est pas difficile d’imaginer une implication de la Syrie dans le conflit.
Le gouvernement israélien a pris des mesures adéquates afin d’atténuer les tensions, et le Premier ministre Netanyahu a interdit à ses ministres de se prononcer sur l’escalade verbale avec la Syrie. Cependant, la situation à la frontière Nord demeure explosive. Au mois de mars dernier, et durant trois jours consécutifs, nous avons enregistré plusieurs incidents: les forces armées libanaises (FAL) ont tiré sur des avions israéliens survolant l’espace libanais. Quatre ressortissants libanais ont été accusés d’espionnage au profit d’Israël et le Hezbollah a renforcé ses forces au nord du fleuve Litani. Selon le chef d’état major de Tsahal Gaby Ashkenazi, la frontière est actuellement calme, « mais cela peut changer brusquement. »
En effet, la situation peut se détériorer rapidement. Des représailles contre Israël suite à l’assassinat, en 2008, du chef des opérations militaires du Hezbollah, Imad Mugniyyeh, pourront déclencher un conflit armé. Le Hezbollah pourra également lancer des roquettes et des missiles au cas où Israël lancerait une attaque contre les installations nucléaires iraniennes. Le transfert de haute technologie sensible syrienne à la milice shiite pourrait également provoquer un raid israélien. En dépit du fait qu’Israël tente de désamorcer les tensions et étant donné le rôle clé de Téhéran dans la politique déterminée du Hezbollah, une troisième guerre du Liban serait inévitable.
Le 16 février dernier, lors de la commémoration annuelle des” héros du Hezbollah”, Nasrallah a prononcé un discours dans lequel il a défini une position plus agressive à l’égard d’Israël. Dans sa nouvelle stratégie de la terreur il a menacé l’Etat juif en ces termes: ” Si vous (Israël) osez bombarder l’aéroport international, Rafic Hariri, de Beyrouth, nous bombarderons l’aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv. Si vous bombardez nos quais, nous bombarderons les vôtres. Si vous bombardez nos raffineries de pétrole, nous bombarderons les vôtres. Si vous bombardez nos usines, nous ferons de même et si vous bombardez nos centrales électriques, nous bombarderons vos centrales.”
Selon des estimations, le Hezbollah possède actuellement plus de 40000 missiles et roquettes et donc les menaces de Nasrallah doivent être prises au sérieux. Ajoutant que la Syrie a fourni au Hezbollah des missiles russes antiaériens du type Igla S capables d’entraver les opérations aériennes israéliennes lors d’un futur conflit. Le transfert de cet équipement militaire a été défini par des responsables israéliens comme « ligne rouge ». Il est difficile de savoir si ce transfert d’armement n’est pas un cas de casus belli.
Nasrallah a également réitéré sa promesse de venger tôt ou tard l’assassinat de Mugniyyeh et a déclaré « guerre ouverte » contre Israël: “Toutes nos options sont valables et nous avons tout le temps du monde. » a-t-il affirmé.
Ces dernières années, les rencontres Assad- Ahmadinejad sont devenues un fait de routine. De hauts responsables syriens et iraniens se rencontrent souvent dans leurs capitales respectives et ont signé des accords d’économie et de défense, même après la visite de hauts-fonctionnaires américains à Damas.
Ahmadinejad est arrivé dans la capitale syrienne, suivi de Nasrallah, quelques jours seulement après la visite du sous- Secrétaire d’Etat, William Burns.
Dans une conférence de presse tenue le 25 février dernier, Assad s’est manifestement moqué de Madame Hilary Clinton et de ses manœuvres d’écarter la Syrie de l’Iran. Il a affirmé que son “soutien pour la résistance est un devoir moral et national pour chaque nation, et il est également un devoir religieux juridique. » Il a également révélé qu’il a discuté avec son homologue iranien de la “manière de combattre le terrorisme israélien ».
Ces propos ont été confirmés par la revue du Hezbollah, Al Intiqad, qui a également estimé que la guerre avec Israël était à l’horizon et elle serait inévitable.
En été 2006, lors de la deuxième guerre du Liban, la Syrie n’a pas participé au combat et a “accepté” les promesses publiques du Premier ministre Ehoud Olmert, que la Syrie n’était pas dans cette guerre dans le “collimateur israélien.” Depuis lors, la Syrie a amélioré son soutien rhétorique et matériel à la milice shiite. Damas a aidé le Hezbollah à se réarmer pleinement, lui fournissant de l’armement nouveau de fabrication russe et en approvisionnant les stocks. Dans ce contexte, les responsables syriens ont poursuivi leur soutien et leur fidélité à la milice shiite résistance, et la presse officielle contrôlée par le gouvernement, proclame actuellement que la politique étrangère syrienne dépend du soutien de la résistance.
Lors du dernier Sommet arabe en Libye en mars 2010, Assad a exhorté le Président palestinien Mahmoud Abbas d’abandonner les négociations soutenues par les Américains et « de prendre les armes contre Israël ». Il a affirmé que selon sa propre expérience « le prix de la résistance n’est pas plus élevé que le prix de la paix. »
Toutefois, et en dépit de la rhétorique, il n’est pas évident que la Syrie provoquerait actuellement une guerre contre Israël. Après des années d’isolement diplomatique, Damas a finalement brisé sa quarantaine avec l’Europe, et la venue d’un nouvel ambassadeur américain indique une volonté de réviser les sanctions et de modifier les pressions économiques américaines sur Damas. Actuellement, la Syrie semble être en position où elle peut renforcer ses liens avec l’occident sans sacrifier son soutien au terrorisme.
Dans le cas d’un conflit armé entre Israël et le Hezbollah, des pressions seront exercées sur la Syrie pour qu’elle participe aux combats. En outre, la Syrie pourrait-elle observer une attaque israélienne contre les installations nucléaires iraniennes sans pouvoir réagir?
En conclusion, il semble que la guerre suit lentement son chemin et L’Iran a intérêt à renforcer l’arsenal du Hezbollah jusqu’à jour où une attaque israélienne sera déclenchée. En tout état de cause, il est quasiment certain que la guerre sur le front nord d’Israël ne serait déterminée au moins en partie par Téhéran.
Au début du mois de février dernier, le ministre de la Défense, Ehoud Barak a déclaré devant des officiers de Tsahal: ” en l’absence d’un arrangement avec la Syrie, nous risquons d’entrer en conflit qui pourrait même s’étendre à une guerre régionale ».
Enfin, il est clair et sans rapport à l’avenir des relations entre la Syrie et Israël, la décision de déclencher une guerre ou de préserver la paix avec le Hezbollah ne se trouve pas dans le camp israélien.