Haim Weizman : premier président de l’Etat d’Israël
Haim Weizman est avant tout un homme des sciences. Ce professeur de chimie mondialement reconnu s’est investi dans l’effort de guerre de l’Angleterre pendant la Première guerre mondiale. Il a ainsi contribué à la victoire des Britanniques contre l’empire Ottoman mettant fin à 400 ans d’occupation turque en Palestine.
Né en 1874 dans un petit village de Biélorussie, le jeune Haim, troisième de 12 enfants, a poursuivi ses études à l’université de Berlin et de Fribourg en Suisse. Emporté par les discours flamboyants de Théodore Herzl, Weizman se joint au mouvement sioniste et participe en 1898 au deuxième Congrès sioniste. Pragmatique et d’esprit pédagogue, il se distingue rapidement des thèses diplomatiques et politiques d’Herzl et avec des amis de Genève et de Pinsk forme « la fraction démocratique », mettant l’accent sur la décentralisation du pouvoir autoritaire d’Herzl et sur les activités éducatives et culturelles.
En 1904, Weizman s’installe à Manchester et se marie avec Vera Katzman. Il deviendra le leader sioniste le plus influent de Grande Bretagne et sera l’architecte de la déclaration Balfour qui octroie en novembre 1917 un foyer national juif en Palestine. Ses opinions libérales et modérées l’ont mis dans l’opposition et parfois même en minorité. Il défendra avec acharnement ses idées en conjuguant les efforts diplomatiques avec des activités concrètes telles que la collecte des fonds, l’immigration en Palestine et la création d’une université hébraïque et des instituts de recherches scientifiques.
Elu président du mouvement sioniste, il signe le 3 janvier 1919 un accord historique avec l’émir Fayçal. Dans ce document, le leader arabe déclare textuellement : « Nous sommes convaincus que les Arabes et les Juifs sont cousins de race… le mouvement juif est comme le nôtre national et non impérialiste. Il y a en Palestine assez de place pour les deux peuples »…Des paroles à méditer aujourd’hui à Gaza et dans les capitales arabes.
Weizman est considéré une colombe en politique et il a soutenu l’idée du partage de la Palestine en deux Etats séparés. Contre l’avis de ses adversaires politiques et en particulier de Zéev Jabotinsky, il demeurera un fervent défenseur de la politique britannique et ami inconditionnel de Winston Churchill.
Les débats aux Congrès sionistes étaient houleux. Weizman est l’objet d’attaques virulentes mais le célèbre chimiste persiste à croire que les Anglais sont de bonne foi. Il s’accroche pathétiquement à ses positions modérés : « Si vous voulez, s’écrit-il, obtenir votre salut par des moyens qui ne sont pas en harmonie avec l’esprit juif, avec la morale juive ou l’histoire juive, je vous dis que vous adorez de faux dieux…Relisez nos prophètes, Sion sera sauvée par la justice et non autrement. »
Suite à de longues démarches, Weizman réussira à fonder une brigade juive au sein de l’armée Britannique et ainsi apaisera les esprits.
Le 9 mai 1942, Weizman soutient le plan de Ben Gourion de créer « un Commonwealth (Fédération) juive en Palestine. (Plan Biltmore du nom du palace New-yorkais où se sont réunis les délégués juifs). Ce plan deviendra par la suite le programme officiel du mouvement sioniste. Toutefois et contrairement à Ben Gourion et à la majorité des leaders sionistes qui vivaient en Palestine, Weizman n’a pas été un homme de terrain et a préféré mener le combat pour la création de l’Etat juif à partir de Londres et des Etats-Unis. Il aura du mal. En dépit des réticences de la communauté juive américaine contre sa politique probritannique, Weizman oeuvre inlassablement devant l’administration américaine et surtout auprès du président Harry Truman pour obtenir la reconnaissance des Etats-Unis à la création d’un Etat juif indépendant et souverain en Palestine incluant le désert du Néguev. Il obtiendra gain de cause.
Le 17 février 1949, Haim Weizman, 75 ans, est élu par la première Knesset, premier président de l’Etat juif.
Haim Weizman a été la figure emblématique du mouvement sioniste durant de longues années. Charismatique, populaire et élégant, le professeur de chimie se distinguait par sa haute silhouette. Crâne dégarni et barbiche soignée, il portait des lunettes fines et rondes et impressionné ses interlocuteurs. Il marquera par son empreinte, l’histoire du mouvement sioniste jusqu’à l’aboutissement de la création de l’Etat d’Israël. Durant sa longue et riche carrière, il a affronté de dures batailles politiques et a connu plusieurs échecs et humiliations. Toujours la tête haute et dévoué cœur et âme à son peuple, il réussit à surmonter les difficultés mais gardera au fond de lui une certaine amertume. Au crépuscule de sa vie, il a regretté que son âge avancé ne lui ait pas permis d’assumer les responsabilités de l’Etat qui venait de naître. Il a été profondément déçu que les membres de la Knesset, sous l’impulsion de Ben Gourion, aient limité ses fonctions en lui offrant un poste purement honorifique. Weizman meurt en 1952 à Rehovot, aigri et malade. Il repose près du campus de l’Institut qui porte son nom pour la postérité.
Freddy Eytan