Genève II : les forces en présence et l’avenir de la Syrie
La conférence de paix dite « Genève II » s’est réunie le 22 janvier 2014 à Montreux suite à un accord parvenu entre les États-Unis et la Russie. Cependant, le principal obstacle demeure l’importante présence d’al-Qaïda en Syrie. La suite des événements en Syrie dépendra de la manière dont sera orientée cette conférence et comment il sera possible d’écarter le danger islamique et terroriste.
L’opposition syrienne estime que les deux grandes puissances se trouveront dans l’obligation de conserver Bachar el-Assad au pouvoir. Leur dilemme consiste à choisir entre l’actuel régime sanguinaire ou celui qui sera dirigé un jour par al-Qaïda.
La conférence Genève II a été convoquée en raison de la faiblesse de l’Armée Libre de Syrie (ALS) et de son échec de ne pouvoir remplacer Bachar el-Assad. L’opposition syrienne n’a pas réussi à consolider ses rangs ni à parler d’une seule voix. Dans son profond désarroi elle a enfin cédé au diktat des grandes puissances, et n’a pu empêcher la présence à Montreux d’une délégation officielle représentant l’actuel régime de Damas. Toutefois, l’ALS a conditionné sa participation aux pourparlers de paix à un refus catégorique à la présence d’une délégation iranienne. L’Iran est toujours considéré comme pays envahisseur puisque des forces du Hezbollah chiite sont déployées sur le sol syrien et soutiennent le régime d’Assad.
Soulignons que les chefs de l’ALS qui combattent actuellement sur le champ de bataille comme d’ailleurs les différents groupes affilés à al-Qaida, et avec eux des djihadistes européens, ne sont pas présents à cette conférence. Al-Qaïda n’a jamais participé à ce genre de pourparlers ; quant à l’ASL, son commandant, Salim Idris, n’est toujours pas disposé à siéger autour de la même table avec des fidèles d’Assad, en dépit des fortes pressions exercées par les Occidentaux.
L’opposition est représentée par plusieurs factions venues principalement de la diaspora syrienne. Certains délégués sont soutenus par l’Arabie saoudite, d’autres par la Turquie et le Qatar. Une autre faction de l’opposition formée de rebelles du parti Baath est soutenue par la Russie.
D’autres mouvements islamiques sont également déployés sur le sol syrien ; parmi eux deux groupes djihadistes jouant un rôle déterminant pour l’avenir de la Syrie : « al-Nusra », le groupe dirigé par Abou Muhammad al-Jawlani, et « Daash Ash-Sham », un mouvement islamique pro-irakien. Quant aux Kurdes de Syrie, ils demeurent divisés et ne seront pas représentés à Montreux en raison d’un refus américain de les voir siéger aux côtés de l’opposition. Tous les mouvements kurdes exigent avec force une autonomie spécifique dans le cadre de l’État syrien.
Tandis que la première conférence de Genève de juin 2012 présentait un plan pour un gouvernement temporaire et des élections pour élire un nouveau président, la conférence actuelle proposera probablement un gouvernement transitoire et de nouvelles élections présidentielles, en offrant à Assad un honorable départ.
Israël suit ces pourparlers avec intérêt et vigilance. Le résultat des négociations sera déterminant pour l’avenir du plateau du Golan mais aussi pour la solution du problème palestinien. Il n’est pas exclu que des pressions soient exercées sur Israël, en prétextant qu’un retrait du Golan pourra « renforcer » le nouveau gouvernement à Damas et « garantir » une certaine stabilité dans le pays et toute la région.
Cet article est notamment basé sur des conversations téléphoniques avec des membres de l’opposition syrienne.
Pinhas Inbari