Al Jazeera et le Qatar : l’obscurantisme de l’empire des Frères musulmans

alJazeeraDepuis la seconde moitié du 20ème siècle, il  existe une présence significative des Frères Musulmans au Qatar. La première vague est arrivée d’Egypte en 1954 suite au  démantèlement  de cette organisation par le président Nasser. Une deuxième est  arrivée de Syrie en 1962 après que Hafez al Assad ait bombardé leur fief à Hama et la dernière vague a débarqué après le 11 septembre 2001 au départ d’Arabie saoudite.
En 1995, l’actuel Emir du Qatar, Sheikh Hamad bin Khalifa Al-Thani, a destitué son père lors d’un renversement de palais et sans effusion de sang. Une de ses premières initiatives était de diffuser une chaîne de télévision par satellite. Depuis 1996, Al Jazzera, est la chaîne la plus regardée dans le monde arabe avec une audience estimée à 60 millions de téléspectateurs.
Il n’y a jamais eu de doute sur l’orientation politique du réseau. Juste après son lancement, Al Jazzera a immédiatement lancé des attaques cinglantes contre Israël. Elle l’a fait pendant la Deuxième Intifada et elle a continué par des diffusions incendiaires contre les Etats-Unis lors des conflits en Afghanistan et en Irak. Plus tard, le contact avec Ben Laden, a été révélé lorsque des cassettes vidéo et audio de Ben Laden et de ses hommes ont été transférées à cette chaine.
Au cours de l’invasion des Etats-Unis en Irak, en mars 2003, les Américains ont accusé la station d’être pro Saddam, et après la guerre, cette chaine a présenté les groupes terroristes actifs dans le pays sous un jour positif. Un de ses reporters en poste à Bagdad, arrivait rapidement sur les lieux des attentats et, avec sa caméra, il filmait les attaques terroristes. Pendant la Seconde guerre du Liban en juillet 2006, Al Jazzera s’est comportée comme-ci elle était  la  porte parole du Hezbollah. Au cours de l’offensive israélienne à Gaza, un grand reporter  d’Al Jazzera s’est posté à l’hôpital Shifa de la ville et il a diffusé un flux d’images-choc et d’horreur, soigneusement sélectionnées.
L’égyptien Maamun Fendi a écrit dans le journal  Asharq Alawsat que 50% du personnel de la chaine sont des membres de la confrérie. Il estime que le Qatar, en amadouant les Frères Musulmans tout en accueillant des bases américaines, a trouvé une parfaite formule contre des représailles éventuelles  de  la part des dirigeants arabes et des extrémistes. Al Jazzera est devenue une arme dans les mains d’un Emir ambitieux; il risque de  conduire les Frères Musulmans à  menacer la stabilité du Moyen-Orient.
Au cours de ces dernières années, les Frères musulmans s’alignent, de plus en plus,  à l’Iran. Ils  s’attaquent à maintes reprises  aux régimes sunnites arabes et  incitent contre eux.  Al Jazzera sert d’instrument important pour Téhéran dans ses efforts de compromettre la stabilité de ces régimes.

Dans les années 50, les Frères Musulmans ont exercé une profonde influence sur la société conservatrice bédouine du Qatar, elle comptait à l’époque moins d’une centaine de milliers d’habitants. Ils ont essentiellement agi individuellement, comme prédicateurs et conseillers religieux, tout en s’infiltrant lentement dans les arcanes du pouvoir. Ils ont aidé  à mettre en place un ministère de l’Education et de la Culture ainsi qu’un institut d’études religieuses – deux institutions que l’émirat manquait.
L’actuel émir le cheikh Habad Bin Khalia Al-Thani aspire à apporter la gloire à son pays. Au départ, il a établi la chaîne de télévision par satellite Al Jazzera, il a fermé le ministère de l’Information et a supprimé la censure. Il a également mis en place le Conseil de la Shura, une  consultation de la loi islamique du Parlement sans exercer un pouvoir réel. En outre, il a accordé aux femmes le droit de vote pour un nombre limité d’institutions politiques qu’il a créées. Ces mesures avaient pour but de montrer qu’il était aussi libéral que démocrate. Toutefois, il serait difficile de trouver une seule voix dans le monde arabe prête à  croire qu’un émir jouissant d’un pouvoir absolu accepterait une véritable libéralisation. Hamad bin Khalifa règne toujours en solitaire. Il a nommé un cousin lointain, Sheikh Hamad bin Thamar Al-Thani, comme président du Conseil d’administration d’Al Jazzera pour pouvoir surveiller ses activités.
Le Qatar est devenu une plaque tournante de l’activité politique et accueille des dizaines de réunions importantes à Doha, la capitale. Une liste partielle des conférences comprend l’Organisation mondiale du Commerce, réunie en 2001 ; les Jeux olympiques asiatiques, tenus en 2006, la Table ronde réunissant sunnites et chiites en 2007, et la première Commission arabe des droits de l’Homme réunie en 2008. En juin 2008, c’est à Doha que des négociations ont été entreprises entre le Hezbollah et des représentants de la coalition majoritaire au parlement libanais. Cette conférence a réussi à aboutir  à « l’accord de Doha » ouvrant la voie à un gouvernement d’unité nationale avec le Hezbollah et en  accordant  un droit de veto sur toutes les décisions en cours. Cet accord a été possible en raison des fortes pressions exercées par le Hezbollah,  la Syrie et l’Iran. Leur intervention a mis en lumière le rapprochement de l’émir du Qatar avec le camp islamiste radical au sein du monde arabe. Cela n’est pas surprenant, l’année précédente, l’émir a surpris et a embarrassé les membres du Conseil de coopération du Golfe en invitant le Président iranien Ahmadinejad au sommet annuel. De ce fait, il a violé les règles très strictes concernant la participation des nations arabes aux différents sommets.
En janvier 2009, l’émir du Qatar a tenu une réunion de certains dirigeants arabes pour pouvoir discuter de la guerre dans la bande de Gaza. Cette conférence a convié Ahmadinejad et les dirigeants du Hamas (jamais invités aux réunions interarabes). Cette réunion a appelé tous les pays arabes à rompre les relations diplomatiques avec Israël et à annuler  l’initiative de paix arabe. L’Egypte et l’Arabie saoudite ont rejeté catégoriquement ces décisions et la Ligue arabe a déclaré qu’elles sont nulles et non avenues.
Toutefois, l’émir a décidé de fermer le Bureau du Commerce de l’Etat d’Israel qui a été ouvert à Doha juste après  la signature des accords d’Oslo.

En mars 2009, juste avant la réunion annuelle du Sommet arabe à Doha, le souverain Qatari a ébauché un accord entre le gouvernement soudanais et une des organisations rebelles du Darfour.
Cette apparente volonté du président Omar al Bachir de montrer une volonté d’apaisement et de réconciliation sur la question du Darfour a été destinée à convaincre les Nations Unies et la Cour pénale internationale d’annuler le mandat émis contre lui pour génocide. Cette tentative a échoué et le mandat d’arrêt est resté en vigueur. Cela n’a pas empêché l’émir du Qatar d’inviter Omar al-Bachir au sommet arabe, au mépris de la communauté internationale. Le Président soudanais a révélé après dans une interview télévisée sur la chaîne Al Jazzera  que l’émir lui avait proposé de tenir le sommet arabe à Khartoum comme geste de solidarité mais qu’il avait rejeté l’offre.
Le Président Moubarak d’Egypte n’a pas assisté au sommet de Doha et son représentant a appelé tous les pays arabes à adopter une position ferme contre l’ingérence de l’Iran dans leurs affaires intérieures, il a également lancé une attaque contre Al Jazzera, et l’a accusé d’inciter les populations arabes contre leurs dirigeants et de menacer  la stabilité des régimes. Ainsi et au grand jour on dévoile une divergence importante au sein du monde arabe, entre le camp des extrémistes auquel désormais le Qatar et le camp pragmatique dirigé par l’Egypte et l’Arabie saoudite.

Cependant, le Qatar accueille toujours un nombre d’installations militaires américaines transférées d’Arabie saoudite. Suite aux attentats du 11 septembre 2001, le Qatar a demandé aux Etats-Unis une aide pour pouvoir combattre contre les vagues de terrorisme. Durant la dernière guerre en Irak déclenchée en mars 2003, les conférences de presse et les briefings du commandement central de l’armée américaine, ont été organisés dans une de ces bases.
Le Qatar demeure un petit pays peuplé de Bédouins, son économie n’est pas assez développée et son armée est inexistante. Certes, ce pays bénéficie de revenus considérables de l’exportation de gaz, et possède une des plus grandes réserves du monde mais il ne peut être qualifié de médiateur politique influent dans le monde arabe. Seule la chaîne Al Jazzera est capable d’influencer les masses. Selon l’émir du Qatar, la diffusion d’images par satellite  pourrait même changer la réalité sur le terrain et créer une ère  nouvelle pour le monde arabe. L’émir a recruté du personnel chevronné parlant couramment l’anglais et l’arabe, des anciens journalistes infortunés de la BBC anglaise diffusant en arabe. Cette nouvelle station a diffusé des nouvelles et des commentaires autour de l’horloge. Depuis son lancement, Al Jazzera a assumé un rôle de premier plan dans le système de communication arabe. Elle est aujourd’hui un vaste empire comprenant une chaîne d’informations une chaîne sportive, une chaîne documentaire, et une chaîne pour enfants. Ses émissions sont accessibles par le biais de téléphones cellulaires. La chaîne possède un site web mis à jour par des dépêches du monde entier et elle se prépare à lancer une station radio à ondes courtes qui diffuserait en permanence vers le monde arabe.

Certains pays, comme l’Algérie et l’Arabie saoudite, n’ont pas permis à Al Jazzera d’installer des bureaux sur leur sol. D’autres, qui l’avaient d’abord permis, comme l’Irak, le Koweït, Bahreïn et l’Autorité palestinienne, les ont fermé rapidement. Mais pas pour longtemps, arrivant à la conclusion que la fermeture n’a pas aidé à changer le contenu des émissions. L’Arabie saoudite, déjà en mauvais termes avec le Qatar a pris une mesure efficace contre Al Jazzera et ne diffuse plus des messages publicitaires. L’Arabie saoudite a également lancé sa propre chaîne de télévision par satellite Al Arabiya. Bien que cette chaîne ait  progressé rapidement en raison de la qualité de ses programmes elle n’a pas réussi a gagné l’audience d’Al Jazzera, estimée à 60 millions de téléspectateurs. D’autres pays arabes ont tenté d’installer des chaînes par satellite mais ils n’ont pas réussi, non plus.
Les Etats-Unis ont également mis en place une chaîne en arabe, Al Hurra.
Elle a commencé à diffuser en février 2004 et elle est destinée à lutter contre l’attitude antioccidentale d’Al Jazzera. Au cours de l’opération américaine en Afghanistan, la chaîne qatarie a encouragé le Taliban et a incité contre l’occident, tout en encourageant les actes terroristes et en diffusant des cassettes vidéo. Cela a conduit à l’attentat à la bombe des bureaux d’Al Jazzera à Bagdad et à Kaboul par les Américains. En Europe, un reporter d’Al Jazzera installé à Madrid a été accusé d’avoir des liens avec Al Qaïda.
La religion domine les émissions de la chaîne et le théologien des Frères Musulmans, Yousouf al-Qaradawi, installé à Doha depuis les années 1950 est considéré aujourd’hui comme l’une des voix les plus autoritaires de l’Islam sunnite.
Qaradawi n’interdit pas aux américains musulmans de combattre au sein de l’armée américaine contre d’autres musulmans en Irak. Son plan à long terme est de préserver l’identité musulmane dans les pays occidentaux jusqu’au jour où les musulmans seraient assez forts pour prendre en charge ces pays par des moyens démocratiques ou par la force.

Al Jazzera mène une campagne systématique et totale contre Israël et tous ses reportages ne sont pas objectifs et ne rapportent pas la réalité sur le terrain.   L’objectif est d’amener tous les arabes à soutenir les Palestiniens et plus particulièrement, le Hamas, qui est après tout, la branche palestinienne des Frères musulmans. Nuls efforts ne sont épargnés pour présenter les Palestiniens comme les ultimes victimes. Les représentants du Hamas sont chaleureusement reçus sur les plateaux d’Al Jazzera et obtiennent de longues minutes d’antenne au détriment des délégués de l’Autorité palestinienne.
Au cours de la Deuxième guerre du Liban, en juillet 2006, Al Jazzera s’est comportée comme porte parole du Hezbollah  et a diffusé tous les communiqués du mouvement chiite sans se soucier de leur crédibilité et les reportages de la chaine Al Manar du Hezbollah a délibérément manipulé les images et a grossièrement exagéré  les dégâts. Dans tous les reportages, Al Jazzera n’a pas pris en considération la version israélienne des faits. Cela fut le cas au cours de l’offensive de Tsahal à Gaza.

Avec l’aide d’un puissant réseau satellite, l’émir du Qatar, est également  considéré comme le leader arabe le plus  proche de l’Iran en dépit du fait qu’il soit chiite. Les Frères musulmans se sont alignés au cours des dernières années avec l’Iran, et attaquent systématiquement les régimes sunnites arabes en incitant contre eux. Al Jazzera sert d’important instrument à Téhéran pour compromettre la stabilité interne de ces régimes.

Au départ, Al Jazzera a été considérée comme le présage d’une nouvelle ère dans le monde arabe. Les observateurs  ont estimé que cette nouvelle chaîne de télévision par satellite, ouvrirait la voie à une plus grande liberté d’expression et l’acceptation de l’autre. Toutefois, il n’a  fallu que peu de temps pour comprendre que ce n’était pas l’objectif d’Al Jazzera. Le Qatar fait désormais partie de « l’empire de l’obscurantisme » des Frères Musulmans. Dans les arcanes du monde arabe et derrière les coulisses, il   réalise lentement et surement  son objectif dangereux afin d’imposer  l’islam par le biais de la persuasion, la subversion, la déstabilisation, par des mensonges et la déformation de la réalité et en utilisant la force, éventuellement.