Abbas ne représente pas tous les Palestiniens
Le Secrétaire d’Etat américain John Kerry est de retour au Moyen-Orient pour trouver une solution au conflit israélo-palestinien. Lors d’une première étape, il encouragera les deux parties à signer un accord-cadre au mois d’avril prochain, le texte devant servir de base à la signature d’un traité de paix l’année prochaine. L’accord-cadre devrait traiter de toutes les questions essentielles, notamment les mesures de sécurité, le statut de Jérusalem et le sort des réfugiés.
Selon la politique américaine actuelle, un accord est possible entre Israël et les Palestiniens représentés par l’Autorité palestinienne sous la direction de Mahmoud Abbas. Toutefois, l’Autorité palestinienne ne représente pas toutes les composantes du peuple palestinien. Elle n’a pas non plus de mandat pour prendre des décisions sur les questions politiques fondamentales au nom du peuple palestinien.
L’Autorité palestinienne sous la direction de Mahmoud Abbas contrôle la Cisjordanie, mais la bande de Gaza densément peuplée est gouvernée par son ennemi le Hamas, lequel ne reconnaît pas la légitimité de la présidence d’Abbas. Ce dernier est même persona non grata à Gaza. Le mouvement Hamas, grand vainqueur des élections de 2006 au parlement palestinien, s’oppose à toute négociation avec Israël, dénie à l’Autorité palestinienne le rôle de représentant légitime du peuple palestinien et répète avec force considérer tout accord conclu avec Israël comme nul et non avenu.
Récemment encore, à l’occasion de l’anniversaire de la guerre d’al-Furqan (l’opération israélienne « Plomb durci ») le 29 décembre 2013, le Hamas a réaffirmé sa position en déclarant adhérer à la lutte armée et « suivre la voie des martyrs pour réaliser nos objectifs nationaux et la libération de la terre palestinienne ». Il a également souligné son opposition à la négociation avec « l’occupant sioniste ».
L’initiative américaine ignore la réalité de l’arène politique palestinienne : le dirigeant palestinien à Ramallah, Mahmoud Abbas, ne jouit pas d’un statut lui permettant de prendre des décisions historiques au nom du peuple palestinien, et encore moins d’aller à contre-courant de son opinion publique concernant « Jérusalem sous domination arabe et islamique » et le « droit du retour ».
En fait, le camp dirigé par Mahmoud Abbas au sein de l’Autorité palestinienne, et même au sein du Fatah, représente seulement une minorité en Cisjordanie, dans la bande de Gaza et dans la diaspora palestinienne.
Même si un traité était imposé avec Israël par le gouvernement américain, le véto du Hamas et celui d’autres organisations entraveraient sans aucun doute sa mise en œuvre et le videraient de tout contenu. Ainsi, cet accord s’inscrirait dans la série d’échecs et de réconciliations avortées entre Mahmoud Abbas, et avant lui Yasser Arafat, avec la direction du Hamas.
Lt.-Col. Jonathan D. Halevy