Les discours pathétiques de politiciens et journalistes

Freddy Eytan

Ces jours-ci nous assistons à une mascarade médiatique et politique dangereuse dont nous devrions y mettre un terme. Au moment, où tout le pays est en état d’urgence, les ministères, les médecins, les hôpitaux et les laboratoires, l’armée, et la police travaillent d’arrache-pied pour assurer la sécurité et sauver des vies humaines, voilà que des politiciens de l’opposition, des intellectuels, et certains journalistes osent accuser le chef du gouvernement de « manipulation » « exagération des faits » de « semer la panique » et « tuer la démocratie » pour des motifs surtout personnels. Plus grave encore, certains hystériques lancent même des appels à sortir du confinement et à manifester en permanence devant la Knesset en brandissant des drapeaux noirs.

Des leaders politiques et des éditorialistes, soi-disant libéraux, prétendent  détenir le monopole de la vérité sur tous les événements de l’actualité et notamment sur les mesures à prendre pour éradiquer l’épidémie du coronavirus. Ils se permettent avec vanité et prétention de juger les décisions sans connaître les dossiers, en évoquant toujours les droits de l’Homme, la vérité absolue et le bien public. Au sein des pays démocratiques, ce phénomène de traiter systématiquement la politique gouvernementale de totalitarisme, discrimination, et d’apartheid est typiquement israélien.

Lors des débats publics, nous devinons le contenu de leur propos. Toujours la même rengaine, les mêmes discours rabâchés, populistes, ennuyeux et pathétiques. Certains journaux ne font pas la distinction entre la nouvelle brute et le commentaire et dès la première ligne nous savons par avance la suite. Les titres comme les articles relatent en réalité une humeur d’un jour sans fondement ni argument réel. Le lendemain, quand il s’avère que leurs propos sont contraires à la réalité, ils minimiseront leur gravité et poursuivront de plus belle la rhétorique.  Ainsi, on se dégage de toute responsabilité tandis que le Mal a été lourdement fait.

Aucun rapport avec la liberté d’expression ou les valeurs démocratiques.  Certes, la critique moqueuse et cynique est légitime et peut-être justifiée, mais elle a aussi des limites et des lignes rouges. Quant aux calomnies et aux insultes, elles sont inadmissibles.  

Le devoir du journaliste est de respecter le métier et d’assumer avec une honnêteté intellectuelle toutes les responsabilités éthiques et morales ainsi que les conséquences. Le journalisme idéologique et militant comme les querelles politiciennes sont en vérité dérisoires et leurs propos apparaissent creux et non crédibles sur les plateaux de télévision, devant la forte argumentation des experts et des médecins.

 

Knesset

(Gideon Sharon/Knesset)

Dans le contexte actuel notre démocratie est plus que jamais fragile mais bien entendu, nous devrions séparer les pouvoirs et respecter les lois.

Le parlement a le devoir de contrôler le gouvernement, mais ces jours-ci nous constatons un bras de fer inutile et enfantin entre les deux grandes formations politiques du pays. Dans un monde qui fonctionne en état d’urgence, les experts prennent des mesures, le chef de l’exécutif réfléchit sur tous les aspects et prend rapidement une décision pour éviter le pire. Il ne s’agit pas de transformer notre démocratie en un pouvoir totalitaire comme le prétendent les leaders de l’opposition. Non ! nous ne vivons pas en Corée du Nord, en Turquie ou en Chine.

En réalité, le véritable problème est ailleurs, il demeure dans le procédé machiavélique, dans la méfiance, le manque de confiance totale entre les chefs politiques et l’obsession de voir Nétanyahou derrière les barreaux.

Dans l’intérêt de l’Etat et de la population il est donc urgent de trouver une solide entente pour sortir enfin de cette crise. Dans le but de contrôler efficacement les décisions gouvernementales cessons de mettre des bâtons dans les roues, vulgariser le débat et banaliser nos valeurs.  

On reproche également au Premier ministre de « voler » chaque soir un temps d’antenne à des fins politiques et personnelles. N’est-ce pas son devoir pour rassurer une population en détresse ? Les présidents Trump et Macron ne s’adressent-ils pas eux aussi dans des discours à la nation ?

Le bras de fer entre le pouvoir exécutif et législatif nous rappelle le fameux référendum du 27 avril 1969 en France. Le président du Sénat, Gaston Monnerville, avait appelé à voter “non” au référendum sur la réforme du Sénat voulue par De Gaulle.

J’ai eu le privilège de rencontrer à plusieurs reprises ce grand ami d’Israel qui fut durant 22 ans le deuxième personnage de l’Etat. Le 18 juin 1980, lors d’un entretien avec lui sur les débats à la Knesset, il évoqua sa position courageuse face à De Gaulle en précisant que le texte de loi proposé par le général était à la fois inconstitutionnel, complexe, illégal et dangereux, et il risquait de conduire la France à l’aventure. Le président guyanais, descendant d’esclave, avait le courage de dire au tout puissant général : « Non, vous n’avez pas ce pouvoir ; la Constitution ne vous le donne pas, vous le prenez. »  

Bien entendu, notre système est différent et la crise aujourd’hui est planétaire. En dépit de sa fragile démocratie, l’Etat juif affronte également des querelles confessionnelles notamment sur son identité nationale, et surtout des épreuves quotidiennes de la guerre.

Cependant, certaines règles de conduite admises et pratiquées chez nous sont malheureusement bafouées au grand jour sans aucun scrupule ni aucune honte. Les valeurs morales et l’éthique ne sont plus appliquées avec rigueur et montrent un tournant négatif et dangereux également dans la société israélienne.

Dans cette nouvelle crise, nous devrions plus que jamais éviter que certaines parois de l’État s’enlisent et que le système politique, économique et social s’effrite.

Dans l’intérêt public, pour consolider notre démocratie et relever les nouveaux défis, nous devrions surtout adopter un code de conduite pour tous, et dans tous les domaines, sans aucune exception.

Il est plus facile de démolir l’édifice étatique et social, briser les espoirs, et casser le moral d’un peuple, comme le font, sans scrupule, toujours les mêmes observateurs, politiques irresponsables et cyniques journalistes.

Cessons donc de semer la division et la zizanie et de faire naître la discorde et des disputes inutiles. Unissons-nous pour pouvoir relever les défis et affronter les menaces. Soulignons, une fois encore, que nous sommes toujours en état de guerre et nos ennemis se réjouissent toujours quand Israël est en crise et plongé dans la division.