Les Ayatollahs iraniens soutiennent fortement Poutine

Michael Segall

Le régime iranien soutient pleinement « l’opération spéciale » de Vladimir Poutine en Ukraine. Pour le Guide suprême Ayatollah Khamenei : « Moscou n’avait pas le choix d’envoyer ses troupes pour assurer la sécurité du peuple ukrainien et d’empêcher à « un comédien juif » de joindre le dangereux bloc militaire ( l’OTAN ). »

Selon le régime islamique, la politique américaine est la principale responsable de cette crise. L’implication de l’Occident et leurs tentatives d’intégrer l’Ukraine dans l’OTAN, porte atteinte aux intérêts sécuritaires de la Russie. 

Toutefois, parmi les cercles réformistes et pragmatiques iraniens et dans certains médias, on critique le soutien à la Russie et le prix que l’Iran pourrait payer à l’avenir pour sa présence en Syrie et concernant le dossier nucléaire.

Certains observateurs iraniens avertissent que la politique officielle de l’Iran ne soutient pas les séparatistes notamment l’indépendance de Donetsk et Louhansk. Selon eux, ils pourraient un jour servir de boomerang dans les provinces iraniennes sujettes au séparatisme notamment en Azerbaïdjan oriental et au Khûzistân. Ils évoquent des souvenirs amers de l’emprisonnement des rois perses par le tsar russe, qui avait conduit à la perte du territoire iranien.

Les pourparlers nucléaires de Vienne se déroulent parallèlement à la crise ukrainienne. La Russie joue un rôle central dans les pourparlers et en faveur d’un accord. Le 26 février, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, a assuré à son homologue iranien Hossein Amir-Abdollahian que « la Russie a toujours soutenu la position de l’Iran lors des pourparlers de Vienne et que la coopération avec l’ami iranien se poursuivra de plus belle ». De ce fait, il n’est pas inconcevable que l’Iran durcisse sa position avec des exigences de dernière minute face à la guerre en cours en Ukraine.

Iranians demonstrated in front of the Ukrainian Embassy in Tehran

(Iran International)

Ned Price, porte-parole du département d’État américain, a déclaré qu’en dépit des sanctions, les États-Unis continueraient à dialoguer avec la Russie sur “des problèmes importants de sécurité nationale”, notamment en veillant à ce que l’Iran n’obtienne jamais l’arme nucléaire. « Le fait que la Russie ait maintenant envahi l’Ukraine ne devrait pas donner à l’Iran le prétexte, le feu vert, pour développer des armes nucléaires.

L’accord nucléaire a également été évoqué lors d’un appel téléphonique de Vladimir Poutine à son homologue iranien, Ebrahim Raisi. Le président russe a informé Raisi de sa décision d’envahir l’Ukraine “afin de protéger le peuple du Donbass conformément aux accords internationaux et bilatéraux signés par la Russie avec les Républiques populaires de Donetsk et Louhansk”. Raisi a exprimé sa compréhension aux préoccupations de Poutine.

Poutine, Raisi

Ikremlin.ru)

Concernant les discussions à Vienne, Raisi a déclaré que l’Iran recherche « un accord robuste et durable et une véritable levée des sanctions. » 

Les réseaux sociaux affiliés aux Gardiens de la révolution ont souligné la responsabilité des États-Unis et de l’Europe dans la crise et le besoin russe de protéger ses intérêts. Les messages soulignaient en outre que l’Iran « ne tolérera pas non plus la présence d’éléments infidèles [État islamique, Kurdes] ou d’éléments sionistes à ses frontières nord”. L’Iran fait référence à ses allégations d’une présence israélienne croissante en Azerbaïdjan et à la poursuite des actions kurdes contre l’Iran depuis les provinces kurdes du nord de l’Irak. Il convient de souligner que l’agence de presse russe Spoutnik en persan a cité ces informations issues des réseaux sociaux des Gardiens de la révolution.

Poutine, Raisi

(kremlin.ru, president.ir)

Dans le même contexte, le Hezbollah a publié une vidéo sur les réseaux sociaux décrivant comment les États-Unis avaient abandonné le Vietnam, l’Afghanistan et l’Ukraine.

Allusion au sort attendu des États du Golfe soutenus par les États-Unis, ils s’interrogent : « Qui sera le prochain pays ? Que pensent les princes, les rois et les héritiers des trônes des États du Golfe ? »… 

L’ancien président Mahmoud Ahmadinejad, qui est devenu ces dernières années l’un des critiques les plus virulents des dirigeants du régime iranien, a republié sa longue lettre au président Poutine de mai 2021.

Il avertissait sur la longévité au pouvoir du président russe qui deviendrait tôt ou tard une source de corruption. Ahmadinejad a recommandé à Poutine de mettre fin à son règne et de permettre à d’autres de lui succéder…

Poutine, Ahmadinejad

(kremlin.ru)

Concernant l’avenir du projet nucléaire, la Russie favorisera un accord dans le cadre des pourparlers à Vienne. Cependant, il est possible que l’Iran durcisse encore plus sa position à la lumière de la nouvelle donne géopolitique suite à la crise ukrainienne. Il n’est donc pas exclu que la signature de l’accord nucléaire soit reportée ou supprimée de l’ordre du jour à la lumière du nouvel agenda international.

Dans ce contexte, l’Iran renforcera sa sécurité nationale selon laquelle il faut s’appuyer sur la capacité de production locale dans les secteurs militaires, économiques et énergétiques, notamment nucléaires. L’imposition de sanctions à la Russie place Téhéran et Moscou dans une sorte de partenariat fatidique contre l’Occident.

Voir l’intégralité de l’article et ses références sur le site du Jerusalem Center
https://jcpa.org/article/iranian-regime-supports-putins-special-operation-in-ukraine/

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