Divergences à Paris, entente à Budapest et coordination à Washington

Freddy Eytan

L’accueil chaleureux qu’a offert Viktor Orban à Benjamin Netanyahu contraste avec la froideur du gouvernement français à l’égard du ministre des Affaires étrangères Gideon Saar. Certes, un président français n’est pas dans l’obligation protocolaire de recevoir à l’Élysée le chef de la diplomatie israélienne, mais son refus cette fois-ci démontre qu’Emmanuel Macron est quelqu’un de rancunier, profondément mécontent de la politique du gouvernement Netanyahu sur les dossiers palestinien et libanais.

Et pourtant, depuis la rencontre du général De Gaulle avec Abba Eban, la majorité des ministres israéliens des Affaires étrangères ont été reçus à l’Élysée. Entre pays alliés et amis, chaque geste compte. Un dialogue franc et sincère réussit généralement à dissiper les malentendus.

Depuis le 7 octobre 2023, Emmanuel Macron a choisi de plaider la cause palestinienne.

Il n’a pas œuvré avec tous les moyens et les leviers dont dispose la France pour libérer les otages détenus à Gaza dont de nombreux sont des ressortissants français.

Le ministre israélien des Affaires étrangères Gideon Sa'ar avec le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot.

Le ministre israélien des Affaires étrangères Gideon Sa’ar avec le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot. (Shalev Mann/GPO)

Depuis son installation à l’Élysée, il n’a pas effectué une seule visite d’État exclusivement en Israël. Pour régler la crise humanitaire à Gaza, il préfère voyager en Égypte et visiter El Arish dans la péninsule du Sinaï, rencontrer les pauvres réfugiés palestiniens rescapés de la barbarie du Hamas.

A-t-il une solution géniale ? Rabâcher dans tous les discours le slogan de la création d’un État palestinien n’est sans doute pas une politique cohérente et alternative. Pourquoi lors de ce voyage au Caire, le président français n’essaye pas de convaincre le président Sissi d’installer provisoirement une grande partie des réfugiés palestiniens dans cette région du Sinaï, proche de Gaza ?

Le Premier ministre hongrois Viktor Orban (à gauche) et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu sont accueillis par une garde d'honneur militaire le 3 avril 2025 à Budapest, en Hongrie

Le Premier ministre hongrois Viktor Orban (à gauche) et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu sont accueillis par une garde d’honneur militaire le 3 avril 2025 à Budapest, en Hongrie. (Avi Ohayon/GPO)

Pense-t-il que le roi Abdallah de Jordanie va lui offrir une solution miracle pour Gaza ? Comment explique-t-il un sommet trilatéral au Caire sans la participation d’Israël, principal concerné ?

En réalité, Macron est venu dans le pays des pharaons pour signer de nouveaux fabuleux contrats d’armements avec l’Égypte. La question essentielle qui devra se poser : contre qui ces armes françaises seront-elles un jour utilisées ?…

Le Premier ministre Netanyahou est reçu à la Maison Blanche par le président américain Donald Trump

Le Premier ministre Netanyahou est reçu à la Maison Blanche par le président américain Donald Trump (GPO)

Concernant le dossier libanais, Macron propose d’envoyer des soldats français dans le cadre de la FINUL pour assurer la sécurité d’Israël. Macron devrait savoir que l’État juif compte uniquement sur son armée de défense, Tsahal. Durant plusieurs décennies aucune force étrangère, notamment française, n’a réussi à empêcher l’installation et le réarmement du Hezbollah au Sud Liban. Comment concevoir une milice chiite, satellite de l’Iran, à nos portes ?

Pour l’heure, il n’existe entre la France et Israël qu’une concordance sur le dossier nucléaire iranien : une opposition intransigeante, notamment par des moyens militaires, pour ne pas permettre à l’Iran de se doter de l’arme atomique. Toutefois, la France privilégie ces jours-ci l’option diplomatique et un nouvel accord avec les ayatollahs. Le double jeu toujours fonctionne.

La visite de Netanyahu à Budapest confirme que l’Europe est divisée sur la solution du conflit israélo-arabe, et que les pays du centre et de l’Est du Vieux continent souhaitent renforcer leurs relations bilatérales, les séparant ainsi du problème palestinien. La décision de la Hongrie de quitter la Cour Pénal de Justice (CPI) pour permettre au Premier ministre israélien de venir à Budapest, malgré le mandat d’arrêt visé contre lui, confirme la totale concordance sur le rejet de la politisation du CPI.

L’intention des Tchèques de transférer leur ambassade de Tel-Aviv à Jérusalem prouve aussi que certains pays européens préfèrent s’aligner sur les États-Unis plutôt qu’à l’Union européenne de Bruxelles, incapable de trouver une solution, même à la crise ukrainienne.

Dans ce contexte, la nouvelle rencontre de Netanyahu à la Maison Blanche renforce la position israélienne sur les plans militaire et économique. Elle permettra au gouvernement israélien de poursuivre son combat contre les islamistes chiites et sunnites tout en recherchant la normalisation avec tous ceux, dans le monde arabo-musulman, souhaitant élargir le cercle de la paix dans le cadre des accords d’Abraham.