Comment gagner la guerre contre le Hamas sans une forte cohésion nationale ?

Freddy Eytan

La décision du Premier ministre de lancer une nouvelle opération militaire pour pouvoir enfin contrôler la ville de Gaza est complexe et manque de cohérence. Malgré ses clarifications devant la presse israélienne et étrangère, Nétanyahou n’a pas convaincu sur ses véritables intentions. Plusieurs questions clés demeurent toujours sans réponses satisfaisantes.

Cette décision approuvée par le Cabinet de sécurité, à l’exception de Bezalel Smortrich, provoque au sein de l’état-major de Tsahal de nombreuses réticences, un tollé général au sein de la société israélienne, une forte opposition parmi les familles des otages, et des condamnations à travers le monde ; des vagues de manifestations anti-israéliennes et antisémites que nous n’avons pas connu depuis la Première guerre du Liban de 1982.

Le terrible massacre du 7 octobre 2023 perpétré sauvagement par le Hamas et la sympathie aux victimes israéliennes dans l’opinion internationale se sont rapidement estompés. La solidarité des chancelleries avec le juste combat de l’Etat juif a basculé vers des sévères critiques et des sanctions, notamment par un boycottage, sans précédent, de la part de l’Allemagne.

Devant la nouvelle donne géopolitique et diplomatique, les bourreaux du Hamas crient victoire et refusent tout compromis, Mahmoud Abbas, 89 ans, envisage de déclarer à l’ONU : « la Palestine est un Etat indépendant et souverain ».

Le monde arabe soutient le vieux leader palestinien et rejette la normalisation avec Israël, tandis que les Européens profitent du renversement des cartes pour reconnaitre l’Etat virtuel de la Palestine. Ils sont satisfaits de jouer le rôle d’arbitre, gagner des marchés commerciaux et apaiser les communautés musulmanes dans leurs pays.

Le Premier ministre, Benjamin Netanyahou, explique devant la presse étrangère les enjeux de la guerre contre le Hamas

Le Premier ministre, Benjamin Netanyahou, explique devant la presse étrangère les enjeux de la guerre contre le Hamas. (crédit GPO)

Nous regrettons profondément que le gouvernement israélien n’ait pas pris sérieusement les retombées diplomatiques et médiatiques de la guerre contre le Hamas.

Militairement, les objectifs ont certes été atteints et Tsahal demeure la puissante armée du Moyen-Orient, mais nous perdons, hélas, la « guerre des images » et la bataille diplomatique dans l’arène internationale. Israël se trouve plus isolé et les communautés juives vivent dans la crainte et le désarroi.

Manifestation des familles des otages détenus à Gaza

Manifestation des familles des otages détenus à Gaza (capture d’écran-chaîne 11)

En réalité, au-delà de la force militaire et des services efficaces de renseignement, de Tsahal, du Shin Beit et du Mossad, des atouts essentiels sont nécessaires pour gagner la guerre dans la bande de Gaza :

  • Définir une stratégie claire et adaptable aux conditions du terrain et des réseaux sociaux et ne pas se contenter de messages creux comme d’aboutir à « une victoire absolue ». Elaborer des plans d’action pragmatiques pour l’après-guerre avec nos voisins arabes en particulier sur les enjeux humanitaires.
  • Etudier minutieusement tous les caractéristiques du Hamas (organisation terroriste islamiste), ses réactions et ses capacités de résistance notamment à l’étranger. Planifier tous les scenarii et réagir intelligemment, sans passion et hystérie. Isoler le Hamas dans le monde arabe et au sein de la population palestinienne et l’écarter du pouvoir.
  • Un moral élevé et une forte motivation des soldats de Tsahal. Le prolongement de la guerre fatigue les troupes et met en danger les soldats et également les otages.
  • Une forte cohésion nationale. Le soutien de la population est crucial pour la longévité de la guerre surtout quand on envisage de mobiliser des dizaines de milliers de réservistes pour cette nouvelle opération.
  • Les retombées sur l’économie israélienne, les faillites des entreprises, le chômage, les investissements étrangers et la balance commerciale.
  • Préparer l’opinion internationale par une campagne efficace de toutes les ambassades israéliennes en collaboration avec les communautés juives et le soutien des associations pro-israéliennes.
  • Permettre à la presse étrangère de couvrir sur le terrain les difficultés de Tsahal et tous les inconvénients de mener une guerre de guérilla contre une organisation terroriste qui sape toutes les conventions internationales, utilise sa propre population comme bouclier humain et vole leur pain.
  • Etablir un dialogue franc et permanent avec les chefs d’Etat et de gouvernement et ne pas s’appuyer uniquement sur l’administration Trump. Le président américain demeure imprévisible.

Sans la combinaison de tous ces facteurs il est quasiment impossible de gagner la guerre de Gaza.

De ce fait, seule la voie politique et diplomatique pourra réaliser nos objectifs et retourner à une vie normale et rassurante.