Les Palestiniens et le front du refus face aux Accords d’Abraham

La Maison Blanche, le 15 septembre 2020. Le Premier ministre Nétanyahou avec le Président américain Trump, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale des Émirats arabes unis, Sheikh Abdullah Bin Zayed (à l’extrême droite) et le ministre des Affaires étrangères de Bahreïn Abdullatif Al Zayani (à l’extrême gauche).

La Maison Blanche, le 15 septembre 2020. Le Premier ministre Nétanyahou avec le Président américain Trump, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale des Émirats arabes unis, Sheikh Abdullah Bin Zayed (à l’extrême droite) et le ministre des Affaires étrangères de Bahreïn Abdullatif Al Zayani (à l’extrême gauche). (Official White House Photo by Shealah Craighead)

L’avertissement sans équivoque de l’ancien Secrétaire d’État américain John Kerry en 2016 selon lequel « il n’y aura pas de paix séparée avec les pays arabes » est une bonne illustration de la mauvaise interprétation de la nouvelle carte politique du Moyen-Orient suite aux Accords d’Abraham. 

Les dirigeants palestiniens ont dénoncé ces accords pourtant signés par des alliés arabes de longue date et des donateurs financiers. Ils préfèrent donc se joindre au camp du refus, celui des régimes fanatiques, iranien et turc, qui parrainent et encouragent le terrorisme. 

Des Palestiniens de Jérusalem-Est ont même brûlé des drapeaux des Émirats arabes unis et des photos du prince héritier Mohammed Bin Zayed. Le mufti palestinien a même émis une fatwa interdisant aux citoyens du Soudan, des Émirats arabes unis, de Bahreïn ou de tout pays arabe susceptible de normaliser ses relations avec Israël de prier à la mosquée Al-Aqsa.

Abbas a qualifié les EAU, Bahreïn et même l’Arabie saoudite d’infidèles et a qualifié leurs actions de « coup de poignard dans le dos » et de « trahison à la mosquée al-Aqsa et à la question palestinienne ». 

Le sommet de la Ligue arabe de 1967 à Khartoum dirigé par (de gauche à droite) le roi Faisal d'Arabie saoudite, Gamal Abdel Nasser d'Égypte et des dirigeants du Yémen, du Koweït et de l'Irak.

Le sommet de la Ligue arabe de 1967 à Khartoum dirigé par (de gauche à droite) le roi Faisal d’Arabie saoudite, Gamal Abdel Nasser d’Égypte et des dirigeants du Yémen, du Koweït et de l’Irak. (Wikipedia)

L’accueil chaleureux du président turc Erdoğan aux dirigeants du Fatah, du Hamas et d’autres factions palestiniennes a intensifié les tensions existantes de longue date avec l’Égypte, la Jordanie et les États du Golfe. Rappelons qu’Istanbul sert de quartier général à la confrérie des Frères musulmans et aux dirigeants du Hamas pour mobiliser les cellules terroristes en Cisjordanie et mener des opérations de cyberguerre et de contre-espionnage contre Israël.

La majorité des Etats-arabes a ras-le-bol de l’intransigeance, de la corruption et du rejet des Palestiniens à toute normalisation avec l’Etat Juif. Pourtant, les Accords d’Abraham favorisent la reconnaissance mutuelle inconditionnelle et à la normalisation des relations avec Israël en tant que clés de l’ouverture d’un accord politique et diplomatique viable qui peut offrir d’énormes avantages au peuple palestinien.

Un réalignement palestinien avec des États arabes pacifiques permettra à l’Autorité palestinienne de s’asseoir à la table des négociations avec son voisin israélien sans conditions préalables, en acceptant le principe de normalisation, d’acceptation mutuelle et de bonne volonté des accords d’Abraham pour aboutir à une négociation réussie et faire des compromis.

La signature en septembre 2020 des accords d’Abraham effondre en réalité l’orthodoxie de longue date qui existe au sein des cercles diplomatiques occidentaux selon laquelle la paix au Moyen-Orient exige d’abord une résolution du conflit israélo-palestinien.

Aujourd’hui, les puissances occidentales réalisent qu’ils avaient négligé ou sous-estimé la rapidité des changements dans les priorités des États arabes, en particulier concernant l’Iran.  

Comment être aveugle à l’incitation et les menaces des régimes iranien et turc contre les dirigeants arabes, israéliens et occidentaux ? Comment ne pas s’inquiéter des insultes contre le président français Emmanuel Macron, et la justification des récents attentats terroristes islamistes à Nice et à Vienne ? La radicalisation palestinienne ne sape pas-t-elle la normalisation avec les Etats arabes et la stabilité au Moyen-Orient ?

Réunion des dirigeants du Fatah et du Hamas à Istanbul, septembre 2020. Le deuxième à gauche est Salih al Aruri du Hamas. Le troisième à gauche est Jibril Rajoub du Fatah.

Réunion des dirigeants du Fatah et du Hamas à Istanbul, septembre 2020. Le deuxième à gauche est Salih al Aruri du Hamas. Le troisième à gauche est Jibril Rajoub du Fatah. (Presse arabe)

L’annonce par les États-Unis, le 22 octobre 2020, d’un accord de paix et de normalisation entre le Soudan et Israël a provoqué une troisième onde de choc en huit semaines au sein de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP. L’utilisation par les dirigeants palestiniens du terme « karetha » (catastrophe) pour caractériser le changement de cap du Soudan reflète bien « le tremblement de terre » provoqué dans les relations Etats arabes-OLP. 

Abbas aurait facilement pu tirer profit du succès des Émirats arabes unis pour forcer le Premier ministre Nétanyahou à reporter son projet d’appliquer la souveraineté israélienne sur les implantations juives en Cisjordanie et dans la vallée du Jourdain. Abbas aurait pu utiliser la concession israélienne et annoncer un retour aux négociations avec un soutien arabe irréprochable dans le cadre de la proposition de paix de l’administration américaine pour un État palestinien sur environ 70% du territoire, y compris des propositions d’échange de terres dans le Néguev et en Galilée, et en obtenant des garanties financières extravagantes.

Abbas a rejeté cette approche. Il a continué à boycotter toute coopération avec Israël, les États-Unis, les Émirats arabes unis, Bahreïn, le Soudan et d’autres États arabes qui se sont engagés ou envisageaient des efforts régionaux de paix et de sécurité. En revanche, Abbas et son frère ennemi, le Hamas, ont préféré tenir des pourparlers de réconciliation à Istanbul, sous le patronage de Recep Tayyip Erdoğan. 

Rappelons que le président turc menace la sécurité et la stabilité de Jérusalem. Depuis 2018, la Turquie encourage la provocation islamiste sur le mont du Temple. Le 1er octobre 2020, Erdogan a déclaré devant le Parlement turc « Jérusalem est notre ville », allusion à sa vision islamiste globale pour le rétablissement de la souveraineté de l’Empire ottoman sur tout le Moyen-Orient.  

Erdoğan accueille la direction du Hamas dans son bureau, 22 août 2020

Erdoğan accueille la direction du Hamas dans son bureau, 22 août 2020 (Bureau du président)

Erdoğan accueille Mahmoud Abbas de l'AP

Erdoğan accueille Mahmoud Abbas de l’AP (Facebook)

Le régime iranien a également tiré parti de la colère palestinienne face aux accords d’Abraham. Téhéran soutient depuis longtemps le Hamas et le Jihad islamique à Gaza ainsi que la Brigade des martyrs Al-Aqsa affiliée à l’OLP en Cisjordanie.

Le soutien financier et opérationnel iranien et la pénétration idéologique à Gaza ont augmenté depuis la violente prise de contrôle du Hamas en 2007. L’Iran et les dirigeants palestiniens avaient également coordonné le transfert d’armes des navires iraniens, qui ont été interceptés par Israël entre 2001 et 2014.

La délégitimation et la dénonciation par Mahmoud Abbas des accords de paix d’Abraham, l’effondrement de ses relations avec les États du Golfe dirigés par l’Arabie saoudite et sa sensibilisation au régime iranien et turc laissent présager des problèmes pour une éventuelle réactivation du processus de paix au Moyen-Orient. Certains des principaux États parmi les puissances arabes dirigées par l’Arabie saoudite ont brisé le tabou de sept décennies et ont publiquement contacté Israël en tant que partenaire pour empêcher l’Iran de se doter de l’arme nucléaire et lutter contre ses tentatives hégémoniques.

La coopération et la coordination arabo-israélienne en matière de sécurité sont devenues plus publiques depuis 2010. La coopération commerciale et énergétique et les relations d’affaires avaient commencé à prospérer. Ce n’était qu’une question de temps avant que les États arabes reconnaissent publiquement qu’Israël n’était pas le problème de la région, mais plutôt un élément crucial de sa solution.

Si l’Autorité palestinienne cherche à obtenir l’indépendance souveraine du peuple palestinien, il serait conseillé de suivre l’exemple des Émirats arabes unis, de Bahreïn et du Soudan, soutenus par l’Arabie saoudite. Les dirigeants palestiniens devraient de la même manière honorer l’appel des Accords d’Abraham pour une reconnaissance mutuelle inconditionnelle et une normalisation des relations avec Israël comme les clés de l’ouverture d’un accord politique et diplomatique viable qui peut offrir d’énormes avantages au peuple palestinien. 

 Aujourd’hui, les dirigeants palestiniens font face à une épreuve importante. Une paix durable avec Israël avec un large soutien du monde arabe est possible à condition de couper tous les liens dangereux avec le régime iranien, la Turquie islamiste, leurs mandataires terroristes radicaux et les groupes alliés. 

C’est un impératif diplomatique pour la nouvelle administration américaine et les puissances européennes qui ont investi de nombreux efforts pour pouvoir aboutir enfin à une paix israélo-palestinienne. Ce réalignement avec des États arabes pacifiques permettra à l’Autorité palestinienne de s’asseoir à la table des négociations avec son voisin israélien sans conditions préalables, après avoir accepté le principe de normalisation, d’acceptation mutuelle et de bonne volonté des accords d’Abraham. 

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