Réaction iranienne après la décision européenne d’inclure le Hezbollah sur la liste des groupes terroristes

wikipedia-segall* La décision de l’Union européenne d’inclure la branche militaire du Hezbollah sur la liste noire des groupes terroristes fait fi du principe fondamental qui structure le Hezbollah : cette organisation chiite présente une seule et unique formation hiérarchique. Le Secrétaire général adjoint du Hezbollah, Naim Qassem, a d’ailleurs été très clair sur le sujet : « Il n’existe pas chez nous deux branches, l’une militaire et l’autre politique » a-t-il déclaré en octobre 2012. Qassem a expliqué que « tous les commandants et les membres du Hezbollah sont au service de la Résistance. Tous appliquent les décisions prises par le Secrétariat général, qu’il s’agisse du travail politique et parlementaire, du social ou des actions de djihad. »

* L’ambassadrice de l’Union européenne au Liban, Angelina Eichhorst, s’est empressée de rassurer les responsables du Hezbollah en affirmant que la dite décision n’affectera pas les bonnes relations avec « la branche civile ». Suite à un entretien avec un ministre du Hezbollah au sein du gouvernement libanais, elle a précisé que « l’aide financière de l’UE se poursuivra » et que le Hezbollah avait le droit de contester et même de saisir les tribunaux européens. L’ambassadrice européenne a enfin souligné que cette décision serait réévaluée tous les six mois.

* L’Iran a condamné la décision européenne en soulignant qu’elle ne servait pas les intérêts des Etats-Unis et d’Israël. Le nouveau président Hassan Rohani a souligné le rôle important du Hezbollah et de son chef, Hassan Nasrallah, dans « le combat du peuple palestinien contre Israël jusqu’au jour de la victoire ».

* Cette réaction prouve que le front syro-libanais forme une composante importante de la stratégie iranienne et de ses aspirations régionales. En effet, les ayatollahs estiment que le front syro-libanais et le combat contre l’Etat juif pourront modifier la donne géopolitique au Moyen-Orient en leur faveur.

Dans ce contexte, la décision de l’UE d’inclure l’aile militaire du Hezbollah sur la liste noire des groupes terroristes omet complètement que le Hezbollah est une organisation unitaire dirigée par un Secrétaire général, Hassan Nasrallah. C’est bien lui qui dirige l’ensemble des institutions politiques, civiles, militaires et sécuritaires, notamment le Conseil exécutif et le Conseil du Djihad. De fait, toute séparation entre “l’aile militaire” et “l’aile politique” est une fausse distinction qui n’existe pas dans la réalité, ni dans la structure du Hezbollah ni sur le terrain.

Malgré la fausse distinction de l’Union européenne, il faut dire que le Hezbollah et l’Iran ont réagi durement. Ils voient dans cette décision une tentative européenne « désespérée » pour intervenir (à la demande des Etats-Unis et d’Israël) sur la scène politique libanaise et au sein des régimes arabes de la région. Nasrallah a déclaré que la décision de l’UE aiderait Israël à mener une opération militaire au Liban : « Cette décision offrira à Israël une “couverture légitime” pour une attaque éventuelle contre le Liban. » Selon Nasrallah, Israël pourra alors prétendre agir dans le cadre de la lutte internationale contre le terrorisme. Le chef chiite a mis en garde les Etats de l’UE en affirmant qu’ils porteront également la responsabilité de toute opération israélienne contre le Liban, contre le Hezbollah ou contre les bastions de la résistance dans le pays du Cèdre.

Le président iranien Rohani a lui aussi condamné la décision de l’UE en la qualifiant de « ridicule » et d’« hypocrite », au service des intérêts des Etats-Unis et d’Israël. Il a adressé un message de soutien à Nasrallah dans lequel il a fait l’éloge de « la résistance contre Israël » et a souligné le rôle clé du Hezbollah et de son dirigeant dans le combat contre l’Etat juif.

En conclusion, malgré la distinction faite par l’Union européenne entre l’aile politique et la branche militaire du Hezbollah, soulignons que les services de renseignement européens savent parfaitement que le Hezbollah est une organisation monolithique dirigée par Nasrallah et que celle-ci demeure religieusement et politiquement subordonnée au guide suprême de l’Iran, l’ayatollah Ali Khamenei.

Shimon Shapira et Michael Segall