Le témoignage de Moubarak sur les Frères musulmans en Egypte

Depuis la fondation de leur confrérie en 1928, les Frères musulmans (al-Ikhwan al-Muslimin ) ont évolué et grandi au fil des ans, en se transformant d’une organisation purement égyptienne en un réseau mondial ayant des branches dans plus de 70 pays. 

Dans ce contexte, il est fort important de mieux comprendre son objectif et d’examiner ses méthodes.

Récemment, l’ancien président égyptien Hosni Moubarak s’est exprimé sur le sujet. 

Moubarak était un opposant farouche aux Frères musulmans. Son témoignage devant le tribunal du Caire publié le 26 décembre 2018 est éloquent. Il révèle avec précision le rôle de la confrérie islamique dans les événements qui ont secoué le monde arabe en 2011, connus sous le nom de Printemps arabe. Il a décrit comment plus de 800 membres armés se sont infiltrés dans le Sinaï égyptien par les tunnels du Hamas avec l’aide des Frères musulmans. Comment ils avaient réussi à aider 20 000 détenus à s’échapper des prisons égyptiennes. Parmi eux figuraient des membres du Hezbollah, du Hamas et des Frères musulmans.

Depuis le terrible attentat spectaculaire du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, le débat mondial se focalise sur la question de savoir si la confrérie des Frères musulmans est une organisation terroriste islamiste dangereuse ou une véritable alternative au militantisme djihadiste observé par Al-Qaïda.

Parfois, il semblait qu’au Moyen-Orient et même en Occident on se dérobait à répondre clairement à cette question fondamentale.

Prenons, par exemple, l’organe de cette confrérie, Risalat al-Ikhwan ; celui-ci est interdit en Egypte, mais diffusé au Royaume-Uni. En première page de ce périodique est affiché en gros caractères cette en-tête : « Notre mission est la domination mondiale » (Siyadat al-Dunya). Figure également le célèbre slogan des Frères musulmans : « le djihad est notre voie – le martyre est notre aspiration ». Il n’existe donc aucune ambiguïté quant au but des Frères musulmans.

En effet, le fondateur des Frères musulmans, Hassan al-Banna, appelait à brandir le drapeau de l’Islam dans tous les territoires qui furent naguère sous son autorité, telle l’Andalousie en Espagne, la Sicile, les Balkans, la côte italienne et les différentes îles de la Méditerranée.

Dans les années 1980, Mustafa Mashour, l’un des chefs de la confrérie vivant en Allemagne, prononça un discours flamboyant apportant des louanges aux Afghans pour leur victoire contre l’Union soviétique : « De même que l’Union soviétique s’est écroulée, l’Amérique et tout l’Occident vont aussi s’effondrer avec l’aide d’Allah. » Il affirma clairement que le djihad devait se poursuive jusqu’au jour où tous les pays musulmans occupés seront libérés, tels que la Palestine, l’Inde et la Tchétchénie.

Rappelons que Mustafa Mashour est une figure emblématique au sein de la confrérie et deviendra Mourshid, guide suprême des Frères musulmans.

En 2004, un autre guide, Muhammad Akef, a déclaré « sa totale conviction que l’Islam envahira un jour l’Europe mais aussi l’Amérique, car cela est bien dans le sillage de la logique de sa mission sacrée ».

En 2002, le cheikh Youssef Qaradawi, chef spirituel du mouvement mondial des Frères musulmans vivant à Doha, Qatar, avait lancé une fatwa, un avis juridique islamique qui disait : « l’islam retournera en Europe en conquérant et en vainqueur, après en avoir été expulsé à deux reprises. » Il a ensuite lancé une mise au point : « Je maintiens que la conquête ne se fera pas, cette fois, par l’épée, mais par la prédication et l’idéologie. »

Une étude réalisée par les services du Renseignement des Pays-Bas conclut que le « but ultime » des Frères musulmans en Europe est de « créer, puis d’implanter et d’élargir un bloc musulman ultra-orthodoxe en Europe occidentale ».

En 2007, des documents récemment révélés par la Cour fédérale américaine au Texas ont permis de révéler la pensée idéologique des Frères musulmans. Dans un document de 16 pages, en arabe, sur l’« objectif stratégique » nous pouvons lire que les prédicateurs de la confrérie en Amérique travaillent dans le cadre d’un grand djihad visant à éliminer et à détruire la civilisation occidentale de l’intérieur pour que « l’Islam soit enfin victorieux sur toutes les autres religions de la planète. »

Pourtant aux États-Unis, certains ont tenté de présenter une image modérée des Frères musulmans. En février 2011, James Clapper, ancien conseiller du président Obama, avait déclaré devant la commission sénatoriale chargée du contrôle du Renseignement: « Le terme Frères musulmans concerne une variété de mouvements. En Égypte, il s’agit d’un groupe hétérogène, en grande partie laïque, qui évite de pratiquer la violence et a décrit Al-Qaïda comme une perversion de l’islam ».  [Sic]

En juin 2011, la secrétaire d’État américaine, Hillary Clinton, a déclaré que la politique des États-Unis à l’égard des Frères musulmans était caractérisée par des « contacts limités », soulignant que ces groupes devaient être « pacifiques et attachés à la non-violence ».

Pourtant au Moyen-Orient, dans le berceau des mouvements islamistes, ce point de vue est loin d’être partagé. En 2005, un ancien ministre de l’Éducation du Koweït a écrit dans le journal Asharq al-Awsat : « les débuts du terrorisme religieux, dont nous sommes témoins, font partie de l’idéologie des Frères musulmans ». Il a précisé que tous ceux qui avaient collaboré avec Oussama ben Laden et avec al-Qaïda faisaient partie des Frères musulmans ». En fait, Ben Laden a lui-même étudié à l’Université King Abdelaziz de Jiddah, en Arabie saoudite, sous l’autorité de deux dirigeants clés des Frères musulmans, Abdullah Azzam et Muhammad Qutb (le frère de Sayed Qutb, principal idéologue des Frères musulmans dans les années 1960).

Le Hamas, qui se définit comme la branche palestinienne des Frères musulmans, est engagé dans le terrorisme depuis sa fondation. La confrérie islamique n’a jamais critiqué ni condamné les nombreux attentats à la bombe ou les attaques à la roquette contre des civils israéliens. Sur le plan organisationnel, et déjà dans les années 1940, les Frères musulmans avaient obtenu clandestinement des armes. Ils avaient même assassiné le Premier ministre égyptien Noukrashi Pacha en décembre 1948. En réalité, ils formaient une organisation terroriste par excellence. Ces dernières années, les Frères musulmans ont été interdits non seulement en Égypte, mais également au Bahreïn, en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis.

Le débat autour des Frères Musulmans a persisté également au Royaume-Uni. En avril 2014, le Premier ministre David Cameron avait demandé une étude approfondie sur le sujet à Sir John Jenkins, ancien ambassadeur britannique en Arabie saoudite. Dans ses principales conclusions, ce dernier affirme que les Frères musulmans ont « accepté depuis son origine l’utilité politique de la violence ». Ils ont adopté la doctrine du takfirisme, le terme takfir signifie littéralement ‘excommunication’ prononcée contre les kâfir, (les mécréants) une accusation qui justifie qu’ils pouvaient aussi être attaqués et mis à mort.

Le témoignage éloquent du président Moubarak concernant la coordination étroite entre les Frères musulmans et les organisations terroristes internationales contredit l’idée selon laquelle cette confrérie s’est transformée en un groupe pacifique renonçant à la violence.

Cela confirme aussi les analyses et études de spécialistes en Israël et au Moyen-Orient sur les véritables dangers des Frères musulmans de leur origine à ce jour.

Dore Gold

 


Pour citer cet article

Dore Gold, « Le témoignage de Moubarak sur les Frères musulmans en Egypte », Le CAPE de Jérusalem, publié le 10 janvier 2019 : https://jcpa-lecape.org/le-temoignage-de-moubarak-sur-les-freres-musulmans-en-egypte/

Illustration : Manifestation de Frères musulmans en Egypte, en 2015 (photo Belal Darder/AP)

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