La guerre au Yémen, tremplin iranien contre Israël

L’intervention de l’Iran au Yémen lui permet de transformer le champ de bataille dans la corne de la péninsule arabique en un gigantesque terrain d’essai militaire pour y développer ses capacités de Défense. Le soutien des Gardiens de la Révolution aux rebelles Houthis yéménites s’inscrit aussi dans une vaste opération hégémonique et dissuasive.

Les rebelles Houthis reçoivent du Hezbollah une assistance et une formation dans l’utilisation des missiles et des roquettes, des drones, des engins explosifs, et participent à des exercices tactiques sur le champ de bataille. Ils sont aujourd’hui capables avec leurs missiles Scud d’atteindre, à partir du territoire yéménite, différentes cibles stratégiques en Arabie saoudite, et notamment des aéroports et des infrastructures civiles.

Les Houthis sont aussi très actifs dans le détroit de Bab el-Mandeb qui, reliant la mer Rouge au golfe d’Aden dans l’océan Indien, sépare Djibouti, le Yémen, l’Arabie saoudite et l’Afrique. Il est clair qu’une présence iranienne permanente y aurait des conséquences géopolitiques graves sur toute la région. Elle menacerait notamment l’Egypte et son canal de Suez mais aussi Israël et la Jordanie.

Le chef du Conseil politique houthi Saleh al-Sammad (troisième à droite) et son ministre de la Défense Mohamed Nasir al-Atifi (à sa gauche) devant un drone Qasef-1

Le 10 février, 2017, Abd al-Malik al-Houthi, chef des Houthis au Yémen, a révélé la fabrication de drones et de diverses armes dont « des missiles sol-air pouvant intercepter des avions saoudiens et frapper tout le territoire de la péninsule et bien au-delà. » Le 30 Janvier, 2017, les Houthis ont attaqué la frégate saoudienne Al-Madinah près du port yéménite Hudeida par un navire sans pilote, commandé à distance. Ces navires constituent une nouvelle menace pour le trafic maritime civil et risquent d’aggraver non seulement les affrontements entre l’Iran et l’Arabie saoudite, mais ils pourraient aussi être utilisés par différentes organisations terroristes soutenues par les Iraniens à travers le monde.

L’Iran développe constamment ses capacités pour pouvoir mener une guerre maritime asymétrique, notamment contre la puissance américaine. L’attaque de la frégate saoudienne reflète cette doctrine de combat qui consiste à utiliser des moyens asymétriques contre les ennemis de l’Iran ayant un avantage technologique. Ainsi, les Houthis ont réussi à sauvegarder leur terrain durant plusieurs années, face à l’Arabie Saoudite et aux forces de la coalition arabe.

Durant le mandat du président Obama, les petites embarcations des Gardiens de la Révolution ont souvent été menaçantes et très proches des forces navales américaines dans le Golfe Persique. Les réactions américaines ont été insignifiantes par crainte d’un affrontement direct avec l’Iran. Des drones ont également survolé et photographié des navires américains sans aucune réaction ferme de la part de l’US Navy.

L’objectif de Téhéran était à la fois de se préparer à une éventuelle confrontation et de perturber les activités militaires américaines en cours dans la région. Lors des manœuvres navales, l’Iran effectua des essais de nouveaux missiles terre-mer, en imaginant le naufrage de « bateaux et porte-avions américains. »

Soulignons que la participation active de l’Iran dans le conflit au Yémen aura aussi des implications pour les différentes organisations terroristes palestiniennes et pour le Hezbollah dans les éventuelles futures guerres contre Israël. Des conseillers du Hezbollah prennent part aux combats et aux essais comme ils le font dans le conflit syrien aux côtés des forces du régime d’Assad.

Simulation d’attaque contre un navire de guerre américain dans le détroit d’Ormuz, 25 février 2015

La crise actuelle au Yémen, dont la fin n’est pas en vue, a permis aux rebelles Houthis de s’emparer de certaines zones du nord du pays et notamment de la capitale Sanaa.

Récemment, le Conseil politique suprême des Houthis a dévoilé ses capacités de fabriquer des drones capables d’effectuer des missions offensives et de collecter des renseignements sur des sites militaires et des infrastructures civiles.

L’arsenal des drones comprend :

  • Le Qasef-1 : drone d’attaque capable d’atteindre 150 km avec une durée de vol de plus de deux heures. Il est équipé d’un système sophistiqué pour détecter, surveiller, et atteindre sa cible.
  • Le Hudhud-1 : drone de reconnaissance. Il portée jusqu’à 30 km avec une durée de fonctionnement de  90 minutes. Caractérisé par une petite taille, équipé d’un petit radar transversal difficile à détecter, il peut être suivi et intercepté par des missiles à guidage infrarouge.
  • Le Rased : drone de reconnaissance. Détecteur d’incendies, il atteint 35 km sur une durée de vol maximale de deux heures.
  • Le Raqeeb : drone d’une portée de 15 km avec une durée de vol de 98 minutes. Equipé d’un système laser avec des techniques d’imagerie très précises, il participe activement aux opérations iraniennes au Yémen.

L’Iran a déjà testé ces armes dans différents endroits et les a déployées sur plusieurs arènes. Des dispositifs explosifs ont déjà été utilisés contre Tsahal au Liban, contre les forces américaines et de la coalition en Irak ; les Houthis les déploient actuellement au Yémen.

Soulignons que le Hamas et le Hezbollah déploient déjà des engins sans pilote fabriqué par l’Iran dans le but de poursuivre leur combat contre Israël.

Des petits navires de guerre sans pilote comme ceux utilisés au Yémen poseraient un nouveau type de menace, à la fois pour la marine israélienne mais aussi et surtout pour les plateformes d’exploitation de gaz naturel en Méditerranée.

Le conflit au Yémen offre à l’Iran et au Hezbollah un tel avantage stratégique et tactique qu’ils ne veulent pas mettre un terme à leur intervention militaire et souhaitent la poursuite de cette guerre.

Dans ce contexte, fort est de constater que la signature à Vienne le 14 juillet 2015 du projet nucléaire de l’Iran n’a pas mis un terme à la volonté des dirigeants religieux, politiques et militaires de l’Iran, et notamment au guide suprême Ali Khamenei, de détruire l’Etat d’Israël. Ils le qualifient d’« illégal et sale régime sioniste », de tumeur cancéreuse au cœur du Moyen-Orient.

Les Occidentaux ont scandaleusement ignoré, lors des pourparlers avec les Iraniens, le vaste programme de missiles balistiques que développe l’Etat islamique chiite.

Ce programme se trouve au cœur de la menace iranienne pour détruire Israël. Sur certains des missiles à longue portée que l’Iran a testés, nous pouvons lire, parfois en gros caractères hébraïques : « Israël doit être rayé de la carte ». Une déclaration claire qui manifeste l’objectif à long terme de l’Iran.

Sur les réseaux sociaux, sur Facebook ou Twitter, le guide suprême ouvre ses pages aux Gardiens de la Révolution pour publier des slogans et discours belliqueux dans le but d’« d’éliminer Israël ».

La combinaison d’une idéologie islamiste extrémiste qui prêche répétitivement la destruction d’Israël, et se vante par ailleurs de son programme de missiles balistiques, est très dangereuse au moment où des voix s’élèvent en Occident pour se réconcilier avec l’Iran et y faire des affaires.

Dominateur dans la région et trop confiant dans son avenir expansionniste, l’Iran poursuit de plus belle ses activités terroristes. Il soutient les organisations palestiniennes, le Hezbollah, et les groupes subversifs dans les Etats du Golfe, dont certains portent atteinte à des intérêts américains, au Yémen ou au Bahreïn.

Le Hamas présente sa version d’un drone iranien

Au cours des dernières années, les dirigeants iraniens ont fait de nombreuses déclarations appelant à la destruction d’Israël et le peuple juif.

Voici la page Twitter du Guide suprême, ainsi que des citations de divers dirigeants du régime islamique :

Le 1 juillet 2016, le principal conseiller du guide suprême iranien, le général de brigade Yahya Rahim Safavi, a déclaré à l’occasion de la journée al Qods International (Jérusalem) :

  • « L’Amérique et la Grande-Bretagne ont voulu créer insécurité et tension au Moyen-Orient. Ils souhaitaient faire respecter leur domination sur les pays arabes et islamiques, en Afrique du Nord et à l’ouest de l’Asie. C’est pourquoi ils ont créé cette tumeur cancéreuse [Israël] … ” »
  • « Il y a 1,6 milliard de musulmans, et seulement 18 millions de Juifs. Supposons que chacun de ces musulmans verse une seule tasse d’eau sur la tête de ces sionistes, ils mourront tous noyés. »
  • « L’unité des musulmans, le soutien à la Résistance islamique et la poursuite du djihad armé [guerre sacrée] sont la principale stratégie pour la libération de la Palestine … l’armement du peuple de la Cisjordanie, avec ses 3 millions d’habitants est l’un des devoirs des musulmans …. L’armement de la Cisjordanie fera perdre aux sionistes le contrôle de la Cisjordanie. »
  • « La seule façon de libérer la Palestine occupée et d’éliminer ce régime criminel, méchant, inhumain, et antimusulman est la résistance islamique et la poursuite du djihad armé. »

Le 9 septembre 2015, l’Ayatollah Khamenei avait prédit que « dans 25 ans Israël disparaîtra complètement de la carte. »

Ahmad Karimpour, conseiller principal auprès du commandant de la Force al Qods, Qasem Soleimani, a déclaré : « Avec les installations et l’équipement dont nous disposons, nous pouvons raser le régime sioniste au sol en moins de huit minutes sur la base des ordres du guide suprême ».

Michael Segall

 


Pour citer cet article :

Michael Segall, « La guerre au Yémen, tremplin iranien contre Israël », Le CAPE de Jérusalem, publié le 12 mars 2017 : https://jcpa-lecape.org/la-guerre-au-yemen-tremplin-iranien-contre-israel/


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